Chemin des cols alpins : Étape 32, de la cabane Brunet à Bourg St-Pierre
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English version
Pour la première fois depuis le début de nos vacances il y a cinq jours, nous sommes accueillis par la pluie au réveil. Elle continue de tomber pendant le petit déjeuner : pourtant les prévisions météo pour la journée sont bonnes et l’animation satellite suggère que les dernières gouttes auront fini de tomber le temps de nous préparer. Comme par magie, c’est exactement ce qui se passe, il fait gris mais sec quand nous commençons à marcher. Certains vêtements laissés par accident dehors sous la pluie hier soir n’ont pas séché, et je commence l’étape avec une jolie petite collection de chaussettes et de slips humides accrochés à mon sac à dos.
C’est la journée la plus longue jusqu’à présent en termes de distance, mais c’est aussi la plus facile techniquement. Après cinq jours de marche sur des chemins de montagne balisés en rouge et blanc, une bonne partie de cette étape se fait sur des sentiers balisés en jaune, en principe plus faciles, bien que nous ne remarquions pas vraiment de différence par rapport à hier. Depuis la cabane Brunet (2104 m), nous descendons d’abord d’une centaine de mètres, puis restons plus ou moins à la même altitude pendant environ une heure, même si le sentier ne semble jamais vraiment être horizontal, c’est plutôt une suite de courtes descentes et montées. La pluie a cessé mais il reste beaucoup de nuages accrochés aux arbres et aux versants des montagnes : c’est une ambiance complètement différente des jours précédents, tout en des nuances de vert et de gris accompagnés du bruissement de l’eau qui dévale les pentes dans des torrents gonflés.
La brume commence à se lever alors que nous atteignons l’alpage des Golassons (2071 m), où se trouvent quelques vieux bâtiments et beaucoup de vaches. Ces dernières ont passé la nuit à labourer le terrain sous la pluie, nous avons l’impression de marcher sur un sol composé entièrement de boue et de bouses de vache liquéfiées. L’endroit est quand même très beau, d’autant plus que le ciel commence à se dégager pour de bon, le bleu l’emporte désormais sur les quelques rubans résiduels de nuages gris et blancs sur le flanc des montagnes à l’arrière-plan, de l’autre côté du val de Bagnes. Nous quittons la zone occupée par les vaches, sur un sentier qui longe de petits lacs et traverse plusieurs ruisseaux sur des passerelles en bois. Nous pouvons maintenant voir la suite de l’itinéraire jusqu’au col de Mille. Le paysage est très différent de celui des jours précédents : les montagnes sont vertes jusqu’à la ligne de crête, leurs versants parsemées de bâtiments agricoles. La grande variété de paysages traversés par le chemin suisse No. 6 en fait tout l’intérêt.
Après une montée très raide entre deux ravins, le reste du chemin jusqu’au col est facile. À un certain moment, le balisage jaune devient rouge et blanc, sans que la difficulté technique du sentier augmente. Pendant que nous avançons, des nappes de brume commencent à monter depuis la vallée en contrebas, et c’est dans un épais brouillard que nous atteignons le col (2472 m), à tel point que la cabane de Mille, située quelques mètres en dessous du col sur son versant ouest, est complètement invisible. Un panneau au col nous informe (en anglais) que les randonneurs et les vététistes partagent ce chemin, et que nous devons sourire et dire “Hi !” lorsque nous croisons des représentants de l’autre communauté. Comme il n’y a pas de cyclistes visibles, nous nous entraînons à nous dire “Hi !” tout en faisant un signe de la main.
Au col de Mille, nous quittons le val de Bagnes et changeons de vallée. Même si nous ne pouvons pas la voir à cause du brouillard, nous sommes désormais dans le val d’Entremont, qui mène au col du Grand Saint-Bernard, voie de passage importante entre la Suisse et l’Italie. Le nom me fait surtout penser à cette marque française de fromage à raclette dont la publicité TV des années 80 se moquait outrageusement de l’accent suisse. Quittant le col, nous suivons un sentier étroit en balcon qui continue de monter lentement. Ceux qui pensaient que montée était terminé en arrivant au col vont être surpris, car il reste encore près de cent mètres de dénivelé positif avant d’atteindre le point culminant de la journée à une altitude de 2562 mètres. Le versant de la montagne est très raide, il est difficile de dire à quel point il y a du vide sur la droite à cause du brouillard, mais ça a l’air de descendre assez loin.
Après le point culminant, le sentier descend jusqu’à une cuvette herbeuse parsemée de rochers (Plan Sevéreu, 2492 m), pendant que le brouillard se dissipe aussi vite qu’il est arrivé. À quelques mètres du sentier, nous trouvons un endroit agréable pour pique-niquer. Nous devrons acheter à manger pour les deux prochains jours ce soir à Bourg Saint-Pierre : nous n’avons pas fait le plein de provisions depuis Arolla et il ne reste plus grand-chose du pique-nique fourni par la cabane de Louvie. Il n’y a plus qu’une barre Snickers au fond de mon sac, et elle y restera, fondant petit à petit jusqu’au dernier jour où nous mangerons tous les restes. Pour la première fois depuis le deuxième jour, nous faisons la sieste. Le soleil est revenu et des oiseaux jouent à cache-cache entre les rochers près de nous.
Nous continuons, sans vrai changement d’altitude, vers la colline herbeuse de La Vouardette, tournant vers le sud juste avant d’atteindre son sommet. Le reste de l’étape est entièrement en descente, avec environ 800 mètres de dénivelé négatif sur une distance de près de dix kilomètres : descente relativement et douceur donc, sans passages très raides. Le son de centaines de cloches de vaches remonte depuis les pâturages en contrebas alors que nous descendons vers l’alpage du Cœur (2238 m), c’est tout droit sorti de la Symphonie alpestre de Richard Strauss. Depuis ici, la vue s’étend sur toute la partie sud du val d’Entremont. Juste en dessous, au fond de la vallée verte, le village de Bourg-Saint-Pierre où nous passerons la nuit s’étire le long de la route du Grand Saint-Bernard. Au-delà de l’extrémité du village, nous pouvons voir un lac de barrage : après la Grande Dixence et Mauvoisin, cette fois-ci il s’agit du barrage et du lac des Toules, que nous longerons demain. Plus loin encore, les montagnes s’élèvent jusqu’à la frontière italienne.
Nous continuons à descendre à travers des pentes herbeuses raides couvertes de fleurs de toutes les couleurs, puis traversons deux gros torrents juste en dessous du chalet au toit rouge de Boveire d’en Bas (2267 m). Le sentier se transforme en piste caillouteuse qui fait de larges lacets agréablement ombragés à la lisière de la forêt. Sur les talus à côté du chemin, des scarabées bleu foncé mangent les feuilles des buissons : il doit y en avoir des centaines, voire des milliers qui profitent du festin. Nous continuons de descendre vers la vallée, émergeant enfin de la forêt juste à côté de l’hôtel où nous avons réservé.
Notre chambre se trouve dans une annexe à quelques mètres du bâtiment principal de l’hôtel. Pour la première fois depuis Arolla, nous avons une salle de bain privée : plus besoin de faire la queue pour la douche, ni de laver nos vêtements à la hâte parce que quelqu’un d’autre attend d’utiliser le lavabo. Nous buvons une bière fraîche à l’ombre des parasols de la terrasse, regardant les gens du coin et les de touristes de passage qui arrivent et repartent : la frontière n’est pas loin et presque tout le monde parle italien. Nous nous reposons ensuite dans la chambre jusqu’à l’heure du souper, avec un plat principal de très bons filets de perche. La journée a été très variée, aussi bien au niveau du paysage que de la météo. L’étape de demain sera plus courte et, après plusieurs jours où nous avons marché tantôt vers le nord, tantôt vers le sud, le chemin No. 6 nous emmènera au point le plus méridional du Valais avant de prendre définitivement la direction du nord.
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Pour la première fois depuis le début de nos vacances il y a cinq jours, nous sommes accueillis par la pluie au réveil. Elle continue de tomber pendant le petit déjeuner : pourtant les prévisions météo pour la journée sont bonnes et l’animation satellite suggère que les dernières gouttes auront fini de tomber le temps de nous préparer. Comme par magie, c’est exactement ce qui se passe, il fait gris mais sec quand nous commençons à marcher. Certains vêtements laissés par accident dehors sous la pluie hier soir n’ont pas séché, et je commence l’étape avec une jolie petite collection de chaussettes et de slips humides accrochés à mon sac à dos.
C’est la journée la plus longue jusqu’à présent en termes de distance, mais c’est aussi la plus facile techniquement. Après cinq jours de marche sur des chemins de montagne balisés en rouge et blanc, une bonne partie de cette étape se fait sur des sentiers balisés en jaune, en principe plus faciles, bien que nous ne remarquions pas vraiment de différence par rapport à hier. Depuis la cabane Brunet (2104 m), nous descendons d’abord d’une centaine de mètres, puis restons plus ou moins à la même altitude pendant environ une heure, même si le sentier ne semble jamais vraiment être horizontal, c’est plutôt une suite de courtes descentes et montées. La pluie a cessé mais il reste beaucoup de nuages accrochés aux arbres et aux versants des montagnes : c’est une ambiance complètement différente des jours précédents, tout en des nuances de vert et de gris accompagnés du bruissement de l’eau qui dévale les pentes dans des torrents gonflés.
La brume commence à se lever alors que nous atteignons l’alpage des Golassons (2071 m), où se trouvent quelques vieux bâtiments et beaucoup de vaches. Ces dernières ont passé la nuit à labourer le terrain sous la pluie, nous avons l’impression de marcher sur un sol composé entièrement de boue et de bouses de vache liquéfiées. L’endroit est quand même très beau, d’autant plus que le ciel commence à se dégager pour de bon, le bleu l’emporte désormais sur les quelques rubans résiduels de nuages gris et blancs sur le flanc des montagnes à l’arrière-plan, de l’autre côté du val de Bagnes. Nous quittons la zone occupée par les vaches, sur un sentier qui longe de petits lacs et traverse plusieurs ruisseaux sur des passerelles en bois. Nous pouvons maintenant voir la suite de l’itinéraire jusqu’au col de Mille. Le paysage est très différent de celui des jours précédents : les montagnes sont vertes jusqu’à la ligne de crête, leurs versants parsemées de bâtiments agricoles. La grande variété de paysages traversés par le chemin suisse No. 6 en fait tout l’intérêt.
Après une montée très raide entre deux ravins, le reste du chemin jusqu’au col est facile. À un certain moment, le balisage jaune devient rouge et blanc, sans que la difficulté technique du sentier augmente. Pendant que nous avançons, des nappes de brume commencent à monter depuis la vallée en contrebas, et c’est dans un épais brouillard que nous atteignons le col (2472 m), à tel point que la cabane de Mille, située quelques mètres en dessous du col sur son versant ouest, est complètement invisible. Un panneau au col nous informe (en anglais) que les randonneurs et les vététistes partagent ce chemin, et que nous devons sourire et dire “Hi !” lorsque nous croisons des représentants de l’autre communauté. Comme il n’y a pas de cyclistes visibles, nous nous entraînons à nous dire “Hi !” tout en faisant un signe de la main.
Au col de Mille, nous quittons le val de Bagnes et changeons de vallée. Même si nous ne pouvons pas la voir à cause du brouillard, nous sommes désormais dans le val d’Entremont, qui mène au col du Grand Saint-Bernard, voie de passage importante entre la Suisse et l’Italie. Le nom me fait surtout penser à cette marque française de fromage à raclette dont la publicité TV des années 80 se moquait outrageusement de l’accent suisse. Quittant le col, nous suivons un sentier étroit en balcon qui continue de monter lentement. Ceux qui pensaient que montée était terminé en arrivant au col vont être surpris, car il reste encore près de cent mètres de dénivelé positif avant d’atteindre le point culminant de la journée à une altitude de 2562 mètres. Le versant de la montagne est très raide, il est difficile de dire à quel point il y a du vide sur la droite à cause du brouillard, mais ça a l’air de descendre assez loin.
Après le point culminant, le sentier descend jusqu’à une cuvette herbeuse parsemée de rochers (Plan Sevéreu, 2492 m), pendant que le brouillard se dissipe aussi vite qu’il est arrivé. À quelques mètres du sentier, nous trouvons un endroit agréable pour pique-niquer. Nous devrons acheter à manger pour les deux prochains jours ce soir à Bourg Saint-Pierre : nous n’avons pas fait le plein de provisions depuis Arolla et il ne reste plus grand-chose du pique-nique fourni par la cabane de Louvie. Il n’y a plus qu’une barre Snickers au fond de mon sac, et elle y restera, fondant petit à petit jusqu’au dernier jour où nous mangerons tous les restes. Pour la première fois depuis le deuxième jour, nous faisons la sieste. Le soleil est revenu et des oiseaux jouent à cache-cache entre les rochers près de nous.
Nous continuons, sans vrai changement d’altitude, vers la colline herbeuse de La Vouardette, tournant vers le sud juste avant d’atteindre son sommet. Le reste de l’étape est entièrement en descente, avec environ 800 mètres de dénivelé négatif sur une distance de près de dix kilomètres : descente relativement et douceur donc, sans passages très raides. Le son de centaines de cloches de vaches remonte depuis les pâturages en contrebas alors que nous descendons vers l’alpage du Cœur (2238 m), c’est tout droit sorti de la Symphonie alpestre de Richard Strauss. Depuis ici, la vue s’étend sur toute la partie sud du val d’Entremont. Juste en dessous, au fond de la vallée verte, le village de Bourg-Saint-Pierre où nous passerons la nuit s’étire le long de la route du Grand Saint-Bernard. Au-delà de l’extrémité du village, nous pouvons voir un lac de barrage : après la Grande Dixence et Mauvoisin, cette fois-ci il s’agit du barrage et du lac des Toules, que nous longerons demain. Plus loin encore, les montagnes s’élèvent jusqu’à la frontière italienne.
Nous continuons à descendre à travers des pentes herbeuses raides couvertes de fleurs de toutes les couleurs, puis traversons deux gros torrents juste en dessous du chalet au toit rouge de Boveire d’en Bas (2267 m). Le sentier se transforme en piste caillouteuse qui fait de larges lacets agréablement ombragés à la lisière de la forêt. Sur les talus à côté du chemin, des scarabées bleu foncé mangent les feuilles des buissons : il doit y en avoir des centaines, voire des milliers qui profitent du festin. Nous continuons de descendre vers la vallée, émergeant enfin de la forêt juste à côté de l’hôtel où nous avons réservé.
Notre chambre se trouve dans une annexe à quelques mètres du bâtiment principal de l’hôtel. Pour la première fois depuis Arolla, nous avons une salle de bain privée : plus besoin de faire la queue pour la douche, ni de laver nos vêtements à la hâte parce que quelqu’un d’autre attend d’utiliser le lavabo. Nous buvons une bière fraîche à l’ombre des parasols de la terrasse, regardant les gens du coin et les de touristes de passage qui arrivent et repartent : la frontière n’est pas loin et presque tout le monde parle italien. Nous nous reposons ensuite dans la chambre jusqu’à l’heure du souper, avec un plat principal de très bons filets de perche. La journée a été très variée, aussi bien au niveau du paysage que de la météo. L’étape de demain sera plus courte et, après plusieurs jours où nous avons marché tantôt vers le nord, tantôt vers le sud, le chemin No. 6 nous emmènera au point le plus méridional du Valais avant de prendre définitivement la direction du nord.
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Tourengänger:
stephen

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