Chemin des cols alpins : Étape 33, de Bourg St-Pierre au col du Grand St-Bernard
|
||||||||||||||||||||||||
![]() |
![]() |
English version
Sur un itinéraire de randonnée qui traverse un pays d'un côté à l'autre, il y a inévitablement des endroits où les marcheurs sont confrontés aux grands axes routiers. C’est le cas du chemin national No. 6, qui croise les trois principaux passages routiers entre la Suisse et l'Italie : après les routes du Gothard et du Simplon que nous avons rencontrées lors de nos étapes en 2022, aujourd'hui c'est le tour de la route du Grand St-Bernard, principal itinéraire entre la Suisse romande et la vallée d'Aoste. Avouons-le tout de suite : cette étape est probablement la moins intéressante des 43, mais c'est aussi l'une des plus courtes.
Avec toute la journée devant nous et moins de cinq heures de marche, nous nous accordons une petite grasse matinée et ne prenons le petit déjeuner que vers 8 heures 30, puis nous allons acheter à manger pour le pique-nique d'aujourd'hui et de demain. Bourg St-Pierre n'a plus d’épicerie (c'est sans doute le plus grand village de tout le chemin No. 6 à ne pas en avoir), mais la station-service en face de notre hôtel propose l'essentiel : viande séchée, fromage, crackers, fruits et chocolat. Il y a aussi une sélection impressionnante de de chiens St-Bernard en peluche, mais nous n’en avons pas besoin.
Nous passons devant le camping et l’arrêt de bus du village, où nous échangeons des bonjour avec quelques-unes des personnes rencontrées au cours des jours précédents et qui ont décidé de faire de cette étape un jour de repos, utilisant les transports en commun au lieu de marcher. Nous continuons le long de la rue principale du village, tristounette avec ses magasins, restaurants et bars tous fermés et à l’abandon, tombant lentement en ruine. Un vieux bâtiment qui a dû connaître un passé glorieux (un panneau nous indique que c’était un hôtel, puis un bureau de poste, et que Napoléon y a déjeuné) est dans un tel état de délabrement que nous nous demandons si quelqu'un trouvera un jour une raison ou de l'argent pour réparer son toit remplacé par une bâche en plastique et colmater les fissures des murs où poussent des mauvaises herbes.
Nous descendons dans une petite vallée où nous traversons la Dranse d'Entremont à la lisière de la forêt. Un paysan local a exprimé son opinion sur la biodiversité au moyen d’un panneau écrit à la main au bord du chemin, expliquant qu'il laissait autrefois ses moutons ici jusqu'à ce que "le loup TUEUR" arrive dans la vallée, et que nous, randonneurs, devrions rester sur nos gardes au risque de subir le même sort.
Maintenant en montée, une piste forestière grimpe vers la base du barrage que nous avons vu hier après-midi dans la descente, et qui domine maintenant la vue. Près d'un chalet au bord du chemin, une Peugeot 404 parfaitement restaurée semble incongrue. De l'autre côté de la vallée, parallèle à notre itinéraire, se trouve la route principale, la plupart du temps sous des galeries paravalanches qui amplifient le bruit des voitures, camions et (surtout) des motos qui montent en direction de l'Italie.
Sortis de la forêt, deux ou trois lacets nous mènent au-dessus du barrage à l'extrémité nord du lac des Toules (1822 m). Il y a ici un camping improvisé, occupé principalement par des camping-cars. Il est à peine dix heures et demie du matin, mais c’est déjà l'heure de l'apéro et sous un grand auvent, les vacanciers sont en train d’engloutir des verres de fendant, tout en chantant qu’ils sont fiers d'être Valaisans. Nous passons notre chemin, pas convaincus que deux randonneurs étrangers seraient les bienvenus à leur fête. Le lac fait environ deux kilomètres de long, et le chemin longe sa rive ouest, en surplomb au-dessus de l'eau. Près de l’autre bout, un grand ensemble de panneaux solaires a été installé sur la surface du lac : c'est laid, mais la route a déjà envahi et enlaidi le paysage, l’emplacement n’est peut-être pas si mal choisi.
Nous atteignons Bourg St-Bernard, nom un peu pompeux pour ce qui est essentiellement un café au bord de la route et le péage du tunnel routier qui plonge sous terre ici, ressortant 6 kilomètres plus au sud, du côté italien du massif. La circulation routière diminue un peu à partir d’ici, bien que la pollution sonore subsiste avec ceux (surtout des motards une fois de plus) qui ont préféré la route du col au tunnel.
Un peu plus loin, nous trouvons un endroit relativement calme sur une pente herbeuse au-dessus du chemin pour déjeuner. Et là, alors que nous nous préparons à repartir après avoir mangé notre pique-nique, il se passe l'une des choses les plus étranges que j'aie jamais vues en randonnée. Deux hommes remontent le sentier, plus jeunes que nous, dont l'un est vêtu d’une tenue complète de curé à l'ancienne : col romain, longue soutane noire et, le plus étrange étant donné qu'il s'agit d'un sentier de randonnée en montagne, une Bible à la main. Son compagnon de route est habillé de manière plus conventionnelle ; tous deux semblent trouver ce sentier (pourtant très facile) assez exigeant. Ils nous disent bonjour en anglais avec un accent américain et nous demandent si c'est bien le chemin pour l’hospice du Grand St-Bernard. Mon soupçon qu'ils ne sont pas habitués aux chemins de randonnée suisses se confirme dix minutes plus tard, à l’alpage de la Pierre, où malgré les panneaux de balisage, nous les voyons partir dans la mauvaise direction vers la combe du Drône et devons leur faire signe de revenir. Nous les voyons une fois de plus, un peu plus haut, où le sentier traverse la route près d'un arrêt de bus, assis sur un rocher, l'air épuisés et surchauffés.
Pour le dernier kilomètre avant le col, dans la combe des Morts au nom lugubre, le chemin de randonnée s’éloigne un peu de la route, qui zigzague là-haut sur l'autre versant de la vallée étroite. Bien qu'invisible, la route reste malheureusement audible depuis le chemin pierreux que nous suivons au fond de la vallée. Le sentier rejoint la route au col du Grand St-Bernard (2469 m ou 2473 m, selon qu'on se fie plutôt à la carte ou au panneau routier). Il y a de l’animation au col : il y a des randonneurs, des cyclistes, des motards, des touristes, beaucoup de voitures garées, et un bar en plus des vieux bâtiments en pierre de l'hospice, qui occupent les deux côtés de la route.
L’ambiance ici est très différente de celle de l'hospice du Simplon, où nous avons passé une nuit lors de la première partie de notre chemin No. 6 en 2022. Au Simplon tout était froid et très austère, avec une clientèle composée principalement de religieuses et de familles en retraite spirituelle. Bien que géré par le même ordre religieux, l'hospice du St-Bernard semble s'être davantage ouvert au tourisme commercial, peut-être aidé par son emplacement. En plus de l'hospice lui-même, où nous dormons, le chanoines gèrent un hôtel et un restaurant, où nous prenons un verre avant de faire le check-in. A la table voisine, un homme accompagné d'un petit chien nous raconte qu'il fait la Via Alpina dans son intégralité, de la Slovénie à Monaco… cela a dû être une expérience très hivernale jusqu'aux deux dernières semaines !
L'ambiance pendant le souper est également beaucoup plus chaleureuse que ce à quoi je m'attendais après l’expérience du Simplon. Presque toutes les personnes assises aux longues tables du réfectoire sont des randonneurs : bizarrement, la seule personne qui ne semble pas à sa place ici est le prêtre américain que nous avons vu plus tôt. La plupart des marcheurs font une partie de la Via Francigena, un itinéraire de grande randonnée dont je n'avais jamais entendu parler, mais qui va de Canterbury à Rome, en traversant la France, la Suisse et l'Italie… une option pour de futures vacances peut-être ? Nous nous retrouvons à une table très multilingue : il y a un Anglais (moi), une Belge francophone, deux Flamands, un couple suisse romande et une suisse alémanique professeure de français en Argovie. Nous discutons longuement des langues et des minorités linguistiques pendant et après le repas, c'est une soirée vraiment agréable.
Quand je vais payer après le souper, je me retrouve dans la file derrière le prêtre américain, qui se dispute avec le chanoine de l’hospice qui tient la caisse. L'Américain lui demande s'il peut célébrer une messe privée dans la chapelle de l'hospice demain matin avant le petit-déjeuner, disant qu'il est prêtre (comme si on aurait pu croire que sa tenue était un simple déguisement) et qu’il a "tout ce qu'il faut" avec lui : je ne peux m’empêcher de me demander si son sac à dos est rempli d'eau bénite, d’hosties, de vin de messe et d'encens. Le chanoine lui dit que ce n'est pas possible car la chapelle est utilisée toute la matinée pour la prière, et, clairement irrité par cette apparition tout droit sortie du dix-neuvième siècle, lui dit sèchement "Vous êtes en vacances quand même, non ?" Sans doute exacerbée par la barrière de la langue, la discussion se poursuit, l’Américain semblant penser qu’en tant que prêtre, il n’a pas besoin de payer sa demi-pension. Pendant ce temps, la file de personnes qui veulent simplement régler l’addition ou commander une bière s'allonge.
Bien que notre dortoir de 8 lits soit un peu exigu, l’espace est bien organisé, avec de la place suffisante pour ranger les sacs et de nombreux crochets et cintres pour faire sécher le linge. Nous partirons tôt demain matin, donc nous nous assurons que tout est facilement accessible, comme ça nous pourrons nous lever, prendre nos affaires et quitter la chambre sans déranger personne.
Étape suivante
Étape précédente
Sur un itinéraire de randonnée qui traverse un pays d'un côté à l'autre, il y a inévitablement des endroits où les marcheurs sont confrontés aux grands axes routiers. C’est le cas du chemin national No. 6, qui croise les trois principaux passages routiers entre la Suisse et l'Italie : après les routes du Gothard et du Simplon que nous avons rencontrées lors de nos étapes en 2022, aujourd'hui c'est le tour de la route du Grand St-Bernard, principal itinéraire entre la Suisse romande et la vallée d'Aoste. Avouons-le tout de suite : cette étape est probablement la moins intéressante des 43, mais c'est aussi l'une des plus courtes.
Avec toute la journée devant nous et moins de cinq heures de marche, nous nous accordons une petite grasse matinée et ne prenons le petit déjeuner que vers 8 heures 30, puis nous allons acheter à manger pour le pique-nique d'aujourd'hui et de demain. Bourg St-Pierre n'a plus d’épicerie (c'est sans doute le plus grand village de tout le chemin No. 6 à ne pas en avoir), mais la station-service en face de notre hôtel propose l'essentiel : viande séchée, fromage, crackers, fruits et chocolat. Il y a aussi une sélection impressionnante de de chiens St-Bernard en peluche, mais nous n’en avons pas besoin.
Nous passons devant le camping et l’arrêt de bus du village, où nous échangeons des bonjour avec quelques-unes des personnes rencontrées au cours des jours précédents et qui ont décidé de faire de cette étape un jour de repos, utilisant les transports en commun au lieu de marcher. Nous continuons le long de la rue principale du village, tristounette avec ses magasins, restaurants et bars tous fermés et à l’abandon, tombant lentement en ruine. Un vieux bâtiment qui a dû connaître un passé glorieux (un panneau nous indique que c’était un hôtel, puis un bureau de poste, et que Napoléon y a déjeuné) est dans un tel état de délabrement que nous nous demandons si quelqu'un trouvera un jour une raison ou de l'argent pour réparer son toit remplacé par une bâche en plastique et colmater les fissures des murs où poussent des mauvaises herbes.
Nous descendons dans une petite vallée où nous traversons la Dranse d'Entremont à la lisière de la forêt. Un paysan local a exprimé son opinion sur la biodiversité au moyen d’un panneau écrit à la main au bord du chemin, expliquant qu'il laissait autrefois ses moutons ici jusqu'à ce que "le loup TUEUR" arrive dans la vallée, et que nous, randonneurs, devrions rester sur nos gardes au risque de subir le même sort.
Maintenant en montée, une piste forestière grimpe vers la base du barrage que nous avons vu hier après-midi dans la descente, et qui domine maintenant la vue. Près d'un chalet au bord du chemin, une Peugeot 404 parfaitement restaurée semble incongrue. De l'autre côté de la vallée, parallèle à notre itinéraire, se trouve la route principale, la plupart du temps sous des galeries paravalanches qui amplifient le bruit des voitures, camions et (surtout) des motos qui montent en direction de l'Italie.
Sortis de la forêt, deux ou trois lacets nous mènent au-dessus du barrage à l'extrémité nord du lac des Toules (1822 m). Il y a ici un camping improvisé, occupé principalement par des camping-cars. Il est à peine dix heures et demie du matin, mais c’est déjà l'heure de l'apéro et sous un grand auvent, les vacanciers sont en train d’engloutir des verres de fendant, tout en chantant qu’ils sont fiers d'être Valaisans. Nous passons notre chemin, pas convaincus que deux randonneurs étrangers seraient les bienvenus à leur fête. Le lac fait environ deux kilomètres de long, et le chemin longe sa rive ouest, en surplomb au-dessus de l'eau. Près de l’autre bout, un grand ensemble de panneaux solaires a été installé sur la surface du lac : c'est laid, mais la route a déjà envahi et enlaidi le paysage, l’emplacement n’est peut-être pas si mal choisi.
Nous atteignons Bourg St-Bernard, nom un peu pompeux pour ce qui est essentiellement un café au bord de la route et le péage du tunnel routier qui plonge sous terre ici, ressortant 6 kilomètres plus au sud, du côté italien du massif. La circulation routière diminue un peu à partir d’ici, bien que la pollution sonore subsiste avec ceux (surtout des motards une fois de plus) qui ont préféré la route du col au tunnel.
Un peu plus loin, nous trouvons un endroit relativement calme sur une pente herbeuse au-dessus du chemin pour déjeuner. Et là, alors que nous nous préparons à repartir après avoir mangé notre pique-nique, il se passe l'une des choses les plus étranges que j'aie jamais vues en randonnée. Deux hommes remontent le sentier, plus jeunes que nous, dont l'un est vêtu d’une tenue complète de curé à l'ancienne : col romain, longue soutane noire et, le plus étrange étant donné qu'il s'agit d'un sentier de randonnée en montagne, une Bible à la main. Son compagnon de route est habillé de manière plus conventionnelle ; tous deux semblent trouver ce sentier (pourtant très facile) assez exigeant. Ils nous disent bonjour en anglais avec un accent américain et nous demandent si c'est bien le chemin pour l’hospice du Grand St-Bernard. Mon soupçon qu'ils ne sont pas habitués aux chemins de randonnée suisses se confirme dix minutes plus tard, à l’alpage de la Pierre, où malgré les panneaux de balisage, nous les voyons partir dans la mauvaise direction vers la combe du Drône et devons leur faire signe de revenir. Nous les voyons une fois de plus, un peu plus haut, où le sentier traverse la route près d'un arrêt de bus, assis sur un rocher, l'air épuisés et surchauffés.
Pour le dernier kilomètre avant le col, dans la combe des Morts au nom lugubre, le chemin de randonnée s’éloigne un peu de la route, qui zigzague là-haut sur l'autre versant de la vallée étroite. Bien qu'invisible, la route reste malheureusement audible depuis le chemin pierreux que nous suivons au fond de la vallée. Le sentier rejoint la route au col du Grand St-Bernard (2469 m ou 2473 m, selon qu'on se fie plutôt à la carte ou au panneau routier). Il y a de l’animation au col : il y a des randonneurs, des cyclistes, des motards, des touristes, beaucoup de voitures garées, et un bar en plus des vieux bâtiments en pierre de l'hospice, qui occupent les deux côtés de la route.
L’ambiance ici est très différente de celle de l'hospice du Simplon, où nous avons passé une nuit lors de la première partie de notre chemin No. 6 en 2022. Au Simplon tout était froid et très austère, avec une clientèle composée principalement de religieuses et de familles en retraite spirituelle. Bien que géré par le même ordre religieux, l'hospice du St-Bernard semble s'être davantage ouvert au tourisme commercial, peut-être aidé par son emplacement. En plus de l'hospice lui-même, où nous dormons, le chanoines gèrent un hôtel et un restaurant, où nous prenons un verre avant de faire le check-in. A la table voisine, un homme accompagné d'un petit chien nous raconte qu'il fait la Via Alpina dans son intégralité, de la Slovénie à Monaco… cela a dû être une expérience très hivernale jusqu'aux deux dernières semaines !
L'ambiance pendant le souper est également beaucoup plus chaleureuse que ce à quoi je m'attendais après l’expérience du Simplon. Presque toutes les personnes assises aux longues tables du réfectoire sont des randonneurs : bizarrement, la seule personne qui ne semble pas à sa place ici est le prêtre américain que nous avons vu plus tôt. La plupart des marcheurs font une partie de la Via Francigena, un itinéraire de grande randonnée dont je n'avais jamais entendu parler, mais qui va de Canterbury à Rome, en traversant la France, la Suisse et l'Italie… une option pour de futures vacances peut-être ? Nous nous retrouvons à une table très multilingue : il y a un Anglais (moi), une Belge francophone, deux Flamands, un couple suisse romande et une suisse alémanique professeure de français en Argovie. Nous discutons longuement des langues et des minorités linguistiques pendant et après le repas, c'est une soirée vraiment agréable.
Quand je vais payer après le souper, je me retrouve dans la file derrière le prêtre américain, qui se dispute avec le chanoine de l’hospice qui tient la caisse. L'Américain lui demande s'il peut célébrer une messe privée dans la chapelle de l'hospice demain matin avant le petit-déjeuner, disant qu'il est prêtre (comme si on aurait pu croire que sa tenue était un simple déguisement) et qu’il a "tout ce qu'il faut" avec lui : je ne peux m’empêcher de me demander si son sac à dos est rempli d'eau bénite, d’hosties, de vin de messe et d'encens. Le chanoine lui dit que ce n'est pas possible car la chapelle est utilisée toute la matinée pour la prière, et, clairement irrité par cette apparition tout droit sortie du dix-neuvième siècle, lui dit sèchement "Vous êtes en vacances quand même, non ?" Sans doute exacerbée par la barrière de la langue, la discussion se poursuit, l’Américain semblant penser qu’en tant que prêtre, il n’a pas besoin de payer sa demi-pension. Pendant ce temps, la file de personnes qui veulent simplement régler l’addition ou commander une bière s'allonge.
Bien que notre dortoir de 8 lits soit un peu exigu, l’espace est bien organisé, avec de la place suffisante pour ranger les sacs et de nombreux crochets et cintres pour faire sécher le linge. Nous partirons tôt demain matin, donc nous nous assurons que tout est facilement accessible, comme ça nous pourrons nous lever, prendre nos affaires et quitter la chambre sans déranger personne.
Étape suivante
Étape précédente
Tourengänger:
stephen

Communities: Randonneur
Minimap
0Km
Klicke um zu zeichnen. Klicke auf den letzten Punkt um das Zeichnen zu beenden
Kommentare