Brienzergrat

La crête le long du lac de Brienz entre le Brienzer Rothorn et Interlaken est composée de plusieurs crêtes successives, dont les plus connues sont la Brienzergrat et la Hardergrat, mais qu'on appelle en général Brienzergrat pour simplifier - et souvent en y ajoutant la partie depuis le Brünigpass. C'est un parcours qui n'est pas officiel, avec une grosse partie intermédiaire qui n'est pas marquée.

Quoi qu'il en soit, l'envie de la parcourir me démangeait depuis longtemps. Mais cela ne se décide pas la veille au soir, un minimum de préparation est nécessaire et il y eut plusieurs reports. La dernière proposition incluait de passer la nuit au Rothorn Kulm (2258m) et de partir au petit matin. Très bonne idée, car on est reposé et on peut aussi profiter du copieux petit déjeuner ainsi que d'un peu de fraîcheur matinale... L'inconvénient, ce sont des sacs nettement plus lourds, ce qui n'est pas néglieable au vu de la longueur de la randonnée et de la nécessité de garder son équilibre sur le chemin étroit.

En partant à 8h, on a le soleil dans le dos et quelques zones d'ombres bienvenues sur la première partie du parcours. Le sol est sec, ce qui aide beaucoup côté confiance. On atteint très rapidement la cheminée du Lättgässli (2125m) et ses marches en béton, pour quitter le chemin officiel à hauteur du Chruterepass (2053m). A partir de là, on sort les bâtons et on commence à sentir les montées et les descentes : d'abord le Briefenhörnli (2165m) puis le Balmi (2141m) et enfin le Tannhorn (2221m), imposant et dont les premiers mètres d'ascension requièrent concentration et équilibre - mais qui heureusement se trouve au début de la randonnée.

Le premier tiers (en durée) de la journée est atteint. Les sommets suivants deviennent de plus en plus exigeants, car la pente à gravir grandit à chaque fois. On n'a d'ailleurs pas l'impression de se rapprocher de l'Augstmatthorn, la dernière difficulté sur le chemin. Mais entre chaque sommet, les passages aériens sur la crête sont magnifiques et exactement comme je me les imaginais. On ne voudrait pas que ça s'arrête ! Mais l'ascension du Wytlauwihorn (2106m), un pré-sommet de l'Augstmatthorn (2136m) me fait beaucoup de mal à cause d'une fringale mal gérée...

Une pause pour reprendre des forces juste avant le Suggiture (2084m), et on entreprend le dernier tiers de la randonnée (en durée, car ça représente presque la moitié de la distance...). Les bâtons sont encore utiles dans la partie la plus pentue jusqu'à Tritt (1860m), mais je les range une fois dans la forêt.  Même si on a l'impression d'être plutôt rapides, on mettra exactement le temps indiqué (2h30 depuis le Suggiture) pour parvenir au Harder Kulm (1322m), sans faire une seule pause. Il y a sans doute une sous-estimation du temps de parcours sur les panneaux...

On aura été sur la Brienzergrat pendant 9 heures exactement (un peu moins de 8h30 de marche), L'arrivée au Harder Kulm est un choc - et presque un choc culturel ! Il y a des touristes de tous les pays, qui clairement n'ont pas 20 kilomètres dans les jambes :) On s'empresse de prendre le funiculaire pour pouvoir faire le plein de boissons à la gare d'Interlaken - la gestion de l'eau était bonne, mais c'était limite ! Les genoux ont aussi bien tenu, mais on n'est pas mécontents de s'asseoir dans le train...

En conclusion : un grand bonheur - et une fierté - d'avoir parcouru la Brienzergrat, dans des conditions idéales et avec une logistique insipirée (la nuit au Rothorn, des bâtons, des chaussures légères, ...). Je ne suis pas un trail runner, loin de là, donc je ne cherche pas la performance ni l'exploit. Cela reste d'ailleurs l'une des randonnées les plus exigeantes que j'ai pu faire, mais à aucun moment je n'ai douté. Cette crête n'est pas à la portée de tout le monde - et c'est mieux comme cela - mais il faut tout de même le rappeler, la démocratisation de la montagne apportant son lot d'insconcients.