De Saas-Fee à Arolla sur le Chemin des cols alpins : J3, de Gruben à l’hôtel Weisshorn

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La première chose dont je suis conscient en me réveillant, ce sont mes cuisses. Après deux journées de marche longues et parfois difficiles sans réelle préparation physique, mes quadriceps ne sont pas contents, mais vraiment pas ! Les bruits d’agonie que j’émets en allant à la salle de bain sur le palier ont probablement réveillé tout l'hôtel. Heureusement, cette troisième étape est à la fois plus courte et plus facile que les précédentes. Nous nous accordons une petite grasse matinée et un petit déjeuner sans nous presser, et nous avons bien l'intention de profiter du temps ensoleillé pour faire une pause prolongée à midi.

La montée de Gruben (1819 m) au Meidpass ne comporte aucune difficulté. La seule partie que l'on pourrait qualifier de raide vient au début, entre le fond du Turtmanntal et Mittelstafel (2267 m). Le sentier serpente sur le flanc de la montagne à travers la forêt, avec de temps en temps des percées dans les arbres qui offrent une jolie vue vers les montagnes qui dominent le bout de la vallée : le Zinalrothorn et le Barrhorn sont très en évidence. Par rapport à que ce que nous avons vu en Valais il y a un an, il semble y avoir davantage de neige sur les sommets : la première partie de l'été a été moins chaude et plus humide qu’en 2022.

Au-dessus de la limite supérieure de la forêt, moins raide désormais, nous montons vers l'ouest le long du Meidtälli, avec le sommet dentelé du Meidspitz en ligne de mire. Peu après midi, nous atteignons le Meidsee (2261 m), un lac de montagne parfait qui invite au pique-nique et à la sieste. Après les déjeuners tardifs des deux jours précédents, ça fait bizarre de manger à midi : c’est presque comme au bureau ! Nous trouvons une pente herbeuse au-dessus de la rive est du lac et nous nous y installons avec nos saucisses, notre fromage et nos tomates pour profiter de la vue sur l'eau bleue. Alors que l’heure de la sieste sonne, un grand groupe d'Américains accompagnés d'un guide arrivent depuis le col et choisissent eux aussi notre rive du lac casser la croûte, ce qui perturbe quelque peu le calme des lieux.  

Du lac au Meidpass, il n’y a que 120 mètres de montée facile. Au col (2789 m), nous franchissons la frontière linguistique et passons en Suisse romande pour la première fois depuis St. Moritz. A nos pieds, vers l'ouest, se trouve le Val d'Anniviers avec sa "couronne impériale" de sommets de 4000 mètres, bien que ceux-ci ne soient pas encore visibles. Les Aiguilles Rouges d'Arolla se voient bien à l'horizon : dans quatre jours, nous serons juste en dessous. L'Hôtel Weisshorn, où nous dormirons ce soir, est également bien visible, sur un promontoire surplombant la vallée et le village de Saint-Luc. L'hôtel n'est pas très loin à vol d'oiseau : malheureusement, seuls les oiseaux sont capables de survoler le vallon assez profond qui se trouve entre nous et notre hébergement : les êtres humains sont priés de descendre, puis de remonter en face.

Nous descendons vers un grand replat parsemé de petits lacs. Au loin, de l'autre côté de la vallée du Rhône, un grand glacier incliné domine la vue. Pas assez plat pour être la Plaine Morte, j'apprends par la suite que c'est celui des Diablerets. Nous atteignons le bas de cette descente à Combavert (2199 m), : à partir d’ici, il y a beaucoup de monde sur le sentier. C'est ici que notre itinéraire rejoint du chemin qui descend de l’arrivée du funiculaire à Tignousa, et il s'agit manifestement d'une excursion familiale très prisée. A partir d’ici nous nous trouvons aussi sur le parcours de la course de trail Sierre-Zinal, qui est balisé par de grands "Z" jaunes peints sur les rochers, d’une esthétique très discutable. Une montée raide de 150 mètres nous mène à l'hôtel (2337 m), que nous atteignons vers 16 heures.

L'hôtel Weisshorn est un bâtiment du XIXe siècle qui est intentionnellement resté "dans son jus". Les murs des couloirs sont en bois, il y a un salon à l'ancienne au rez-de-chaussée, les escaliers grincent, il n'y a pas un seul sol qui soit horizontal ni un mur qui soit vertical. Les chambres sont plutôt basiques, mais les sanitaires sont neufs et l'eau est chaude. La table à laquelle nous soupons offre une vue magnifique sur la vallée : nous regardons les nuages aller et venir au fur et à mesure que le crépuscule avance. Les derniers rayons du soleil qui apparaît de temps en temps entre les nuages éclairent différents points des versants la montagne les uns après les autres. A la tombée de la nuit, les lampadaires s'allument à St Luc en contrebas, puis dans les autres villages et hameaux du val d'Anniviers, puis à Crans-Monata de l'autre côté de la vallée du Rhône, c’est magnifique. L'étape de demain est courte, mais si la pluie annoncée ne se concrétise pas, nous ne manquons pas d'idées pour la rallonger. 

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