Bivacco de Zen, en plein été

Deux tentatives, en terrain sauvage aux difficultés croissantes, fin juillet 2022 et 2023, pour accéder à ce bivouac au pied des faces de glace du Fletschhorn et de Senggchuppa qui incitent au déplacement.
Le chemin de départ est vite très joli. Le matin, le torrent Senggibach a un débit faible qui le rend facile à franchir. En juillet 2022, il fallait passer de pierres en pierres. En 2023, il y a deux planches qui permettent un passage sans peine. Suit une montée sur un chemin évident, qui longe le torrent, sur une ancienne moraine. La vallée s'ouvre au fur et à mesure de la progression, et l'on arrive sur une vaste cuvette de prairie, avec même un petit coin de marais. Au point 2289, c'est une vue plongeante sur le Rossbodegletscher: les ruissellements abondants forment, au pied de l'énorme moraine, un petit lac glaciaire. C'est aussi la fin de la ballade facile en jolis gazons fleuris.
En observant vers le haut, il est impossible de voir le vallon dans lequel il faudra passer. Le chemin disparaît, la direction est alors donnée par des kern (les Steinmann des descriptions alémaniques) abondants et souvent bien placés. Il faut viser le flanc gauche d'un torrent à sec en été (la trace GPS prend un peu plus bas).
Il n'y a pas de sentier, le terrain est stable et la progression assez évidente. Sur la carte topographique, un pointillé va au point 2626. C'est bien pour qui veut escalader l'arête. C'est mauvais pour qui veut remonter le vallon.
La cote 2600 passée, plein ouest, il n'y a plus de repères, rien; c'est le glacier rocheux, assez actif, avec une progression sur blocs de taille moyenne. Une fois au pied du vallon, on tourne plein sud pour remonter toute la combe, bien visible. Depuis là, les difficultés vont aller croissant. La trace GPS jointe n'indique qu'une direction générale. Tout est en mouvement, et il faut choisir l'itinéraire en fonction de la pente et de la stabilité du terrain. Le problème majeur est la faible couche de roche recouvrant le glacier. Les graviers comme le sable sont détrempés, mortier mouvant, et les blocs de toutes tailles sont posés dessus, avec une stabilité toute relative. Plus la pente s'accentue et plus on aperçoit des plissements de reptation, comme sur une table dont la nappe serait mal posée... Pour être franc, on dira qu'il faut éviter de déclencher un petit éboulement qui mettrait en mouvement un bloc de forte masse, posé juste au dessus de soi... La marche est difficile, pénible. Plus on monte, plus la pente s'accentue, le tout sur du mortier mou. Vers 2870, une nouvelle fois, je renonce. N'ai pas envie de me trouver avec une jambe coincée par un bloc en mouvement ou de ramasser un rocher volant, détaché du glacier de Sengschuppa qui domine le coin, bien exposé au soleil.
En conclusion, à mon avis, pour monter à ce bivouac, en randonnée, c'est fin du printemps, droit en haut sur le névé, avec crampons, ou en octobre, avec fort gel nocturne qui solidifie le mortier. Ou alors, en été, par l'arête, mais ce n'est plus de la randonnée, c'est de l'escalade (avec encordement, donc être au moins deux participants). Reste la saison de ski, depuis Egga.
Au retour, le torrent, juste derrière la voiture, peut apporter quelques surprises, croissantes selon la température...