De Saint-Moritz à Saas-Fee sur le Chemin des cols alpins : Deuxième partie

J3, de l’Alp Flix à Savognin
6 heures 15 minutes, +850 m, -1610 m, T2

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Départ un peu tardif pour cette troisième étape, car le bus alpin qui monte à l’Alp Flix ne part qu’à 9 h 36. A côté de l’arrêt de bus, il y a une épicerie bien achalandée qui, à notre surprise, vend même du matériel de randonnée. Les orages nocturnes sont partis ailleurs, mais il reste beaucoup de nuages résiduels et c’est sous un ciel gris que nous entamons la montée depuis le hameau de Tgalucas (1969 m).

Cette étape est moins alpine que les deux précédentes : dans sa première partie on évolue dans un paysage d’alpages, ensuite sur des chemins forestiers. Nous montons le long d’un torrent, le franchissons sur une passerelle, avant d’atteindre le niveau des nuages vers 2400 mètres. Ça se dégage provisoirement au niveau de la bifurcation pour le Piz Colm, mais c’est dans un brouillard parfois assez épais que nous arrivons à la Furschela da Colm (2398 m), seul col du jour. Il faut faire attention au balisage ici : juste après le col il faut tourner à gauche, alors que le sentier le plus évident continue tout droit.

Nous descendons vers l’Alp d’Err, d’abord en pente douce puis, après être passés au milieu d’un troupeau de vaches, plus raide à flanc de montagne. En bas de cette descente, nous profitons de l’arrivée du soleil pour manger notre pique-nique, assis sur une petite butte herbeuse au-dessus d’un chalet. Pendant que nous mangeons, les vaches descendent le sentier que nous venons de prendre, une par une en file indienne, puis tournent à gauche vers le pâturage d’en dessous… sauf une qui manifestement veut venir sur notre butte. Elle finit par comprendre que l’herbe est plus verte ailleurs et suit le reste du troupeau.

Vient ensuite un long tronçon sur une piste d’alpage en fond de vallée, puis un très beau sentier balcon qui traverse des pentes parfois raides, avec de belles vues sur les hameaux dans la vallée en dessous. Devant nous le ciel reste bouché : difficile de croire, au milieu de ce paysage alpestre, que des sommets de près de 3,000 mètres s’y cachent. Au hameau de Bartg (1825 m), où nous ne voyons pas tout de suite le balisage, un homme sort de son chalet de vacances et nous indique la route, nous disant qu’il y a plus de monde sur le sentier depuis qu’il a été intégré au chemin national No. 6 et qu’il nous faudra encore deux heures jusqu’à Savognin, ce qui s’avère juste. Pendant toute cette traversée des Grisons, nous ne verrons pratiquement aucun chalet délabré ou en ruines : tous sont bien entretenus et servent soit encore au travail de l’alpage, soit comme résidences secondaires.

De nouveau sur une piste, nous passons au joli hameau de Castelas (1810 m), puis commençons ce que nous pensons être la descente jusqu’à Savognin. C’est raté : après être descendus jusqu’à 1599 mètres, on doit encore remonter deux fois avant d’entamer la dernière descente de la journée. Il fait à nouveau très chaud, nous avons mal aux pieds, et nous ne sommes pas mécontents d’arriver enfin à Savognin, dominé par son église Son Martegn de taille disproportionnée, perchée de l’autre côté de la vallée.
Nous nous installons à notre B & B puis, comme il n’a pas de restaurant, allons souper dans une pizzeria sombre et presque vide. Nous n’avons à peine entamé les salades commandées en entrée que les pizzas arrivent. Comme seule explication, la serveuse nous dit qu’elle n’a aucune idée de ce qui se passe en cuisine…
 

J4, de Savognin à Ausserferrera
8 heures, +1410 m, -1310 m, T2

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Avec près de 23 kilomètres, cette étape est l’une des plus longues de notre randonnée. Le petit déjeuner (qui est particulièrement bon) n’est servi qu’à partir de 8 heures, mais le petit Volg qui se trouve juste à côté du B & B ouvre à 7 heures 30. Nous profitons de cette demi-heure pour faire les courses pour les deux prochains midis. 

Nous descendons dans le fond de la vallée pour passer le pont sur la Geglia, où l’un des couples rencontrés à la Chamanna Jenatsch nous fait signe depuis la fenêtre d’un autre hôtel. La longue montée jusqu’au Pass de Schmorras commence toute de suite après, très raide surtout dans sa partie inférieure. Nous passons devant l’église Son Martegn, puis continuons la montée par pâturages et bosquets, sous un soleil qui est apparu plus vite que la veille et qui chauffe déjà. A la bifurcation au point 1504 m il faut faire attention : le chemin No. 6 n’est indiqué dans aucune direction et l’instinct serait de suivre le sentier montant en face, alors que c’est la piste qui descend vers la droite qu’il faut prendre. Le lendemain soir, nous parlerons avec plusieurs personnes qui se sont trompées ici et qui ont perdu 45 minutes par conséquent.

Nous continuons, souvent en forêt, par une suite de pistes et de sentiers, jusqu’au hameau de Radons (1886 m), où il y a un restaurant et un départ de téléski et où le paysage devient beaucoup plus ouvert. Devant nous, le Val Schmorras monte doucement vers une longue ligne de crête coiffée de quelques petits cumulus, alors que de beaux chalets d’alpage se blottissent dans les creux, à côté des torrents. Par une piste en lacets nous montons jusqu’à l’Alp Schmorras (2277 m), où des poules viennent nous souhaiter la bienvenue. Le Pass da Schmorras est indiqué à 55 minutes d’ici et Ausserferrera à 3 heures 30. 55 minutes plus tard, au col, Ausserferrera est toujours indiqué à 3 heures 30… ce n’est qu’un exemple des indications de temps parfois incohérentes ou carrément fantaisistes que nous verrons dans la partie grisonne de la randonnée. La dernière montée est raide mais facile dans des pentes herbeuses : peu avant le col, les nuages se déchirent pour laisser apparaître des parois d’une verticalité impressionnante, juste devant nous.

Un petit vent froid souffle au Pass da Schmorras (2561 m), alors nous descendons un peu du côté ouest avant de pique-niquer sur une petite crête herbeuse, suivie par une jeune vache qui s’est trouvée séparée de son troupeau et qui émet des meuglements tristes. Dans la suite de la descente, en particulier jusqu’à l’Alp Mos, il faut faire très attention au balisage. Le sentier, très indistinct, se faufile dans un vallon marécageux, passant et repassant un petit torrent sans aucune raison apparente, puis se perd dans des touffes d’herbe et de mousse où des trous guettent à chaque pas.

Après l’Alp Mos (2243 m) et son enclos bordé d’un mur de pierres sèches, le terrain redevient plus facile. A 2086 mètres on franchit un torrent juste au-dessus d’une belle cascade puis, désormais en pente beaucoup plus douce, on continue jusqu’au hameau de Cresta (1651 m), dominé par le gros clocher en pierre de son église. Ici, nous devons faire un choix. N’ayant pas trouvé d’hébergement à Ausserferrera (c’est le jour de fermeture hebdomadaire de l’hôtel du village), nous avons réservé au Gasthaus Alpenrose à Innerferrera, un peu plus haut dans la vallée. Un panneau indique une heure pour Ausserferrera ou 2 heures jusqu’à Innerferrera : nos pieds fatigués optent pour la version la plus courte, nous terminerons l’étape avec 5 minutes en car postal. C’est un bon choix : pendant que nous attendons le bus il se met à pleuvoir, nous nous serions faits bien mouiller en finissant l’étape à pied.

Innerferrera est un joli petit village, très calme si on fait exception de l’église qui sonne les heures et les demi-heures toute la nuit ! La terrasse du Gasthaus est abritée de la pluie et conviviale, avec un mélange de randonneurs et de locaux, dont la factrice qui boit une bière après le dur labeur de la journée… un peu comme nous en fin de compte. L’hôtel a été entièrement rénové en 2019 et le souper est excellent, avec mention spéciale à une soupe de tomates et basilic, toute simple mais pleine de goût. Au bout des quatre premières étapes, nous nous sentons bien en forme.

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