Tour du lac des Quatre Cantons : septième étape, de Lucerne à Hergiswil

English version here

De la ville vers la montagne

Cette septième étape est un peu le contraire de la précédente, qui a commencé à la campagne pour se terminer en pleine ville. La randonnée du jour me conduira du centre de Lucerne à travers sa banlieue sud puis vers les alpages sous le Pilatus, avant de redescendre au bord du lac à Hergiswil.

Après deux étapes en solitaire, aujourd'hui je suis de nouveau accompagné, cette fois-ci par une amie venue de Berne pour la journée. Nous nous retrouvons à la gare de Lucerne à dix heures, sous un ciel gris et un petit crachin qui, selon les prévisions, devrait disparaître rapidement. Nous partons le long des quais, passant devant les jolis vieux bâtiments des embarcadères et le moins joli mais très imposant KKL. Au chantier naval, plusieurs beaux bateaux à vapeur sont alignés, attendant leur prochaine mise en service ; au premier plan, le Schiller, qui nous a emmenés au Rütli au début de la première étape du tour.

Nous partageons le sentier du bord du lac avec touristes, joggeurs et promeneurs du samedi matin. Au club d'aviron, un moniteur est en train de montrer à un débutant comment monter sur son bateau frêle et effilé, un vrai jeu d'équilibre qui a l'air tout sauf évident. A Tribsche, le sentier prend un peu de hauteur au-dessus du lac, passant devant la jolie maison du musée Richard Wagner, où le "Café Sommer" est fermé en attendant que le "Sommer" décide d'arriver… 

A Matthof, nous quittons le bord du lac ; ici, il faut traverser une zone résidentielle. Une première rangée de maisons visiblement très "design" et haut de gamme a terriblement souffert – visuellement au moins -  du fait que le béton vieillit très mal. Un peu plus loin, nous nous trouvons par accident dans la cour d'un immeuble ; une dame ouvre sa fenêtre et nous indique le bon chemin, en nous disant que ça arrive tout le temps. Nous montons entre des immeubles dont les environs sont joliment gazonnés et bien équipés de tables de jardin, de bancs et d'aires de jeux pour les enfants. Puis, au-delà des dernières constructions, un sentier raide nous fait grimper à la lisière de la Bireggwald jusqu'à Seeblick, premier "point culminant de la randonnée à 600 mètres. L'endroit porte bien son nom : la vue sur le lac est superbe. Le Bürgenstock domine le premier plan alors que, plus loin, le Stanserhorn essaie de sortir sa tête des nuages.

Une descente courte et raide nous mène à Fälmis, où il faut traverser une autre zone résidentielle. Dans une région où les panneaux "Privat" sont légion, ici on a cru utile d'ajouter un panneau "Oeffentlicher Fussweg" pour indiquer le chemin à suivre. L'itinéraire décrit maintenant une grande boucle autour de la colline du Dickiwald, sur un joli sentier entre cours de ferme et prairies. Des panneaux interdisent aux cavaliers d'aller plus vite qu'au pas ; quant aux randonneurs, ils ont le droit de courir s'ils veulent. Puis nous descendons par une petite route jusqu'au village de Winkel, où nous retrouvons les rives du lac juste à côté d'une vieille maison qui a été dévastée par un incendie.

La prochaine section est sans doute la plus laide et la moins intéressante de tout le tour jusqu'à présent. Il faut une demi-heure pour traverser Horw, cité de banlieue sans charme. Nous visitons successivement un quartier résidentiel, un camping, des terrains de sport, une usine à ciment et une zone industrielle avant d'atteindre enfin l'autre côté de la ville. Un panneau indique Hergiswil à 35 minutes par le bord du lac, mais cela nous ferait marcher le long de l'autoroute ; j'ai donc opté pour un itinéraire plus long qui monte vers Brunni, juste sous le Renggpass, avant de redescendre.

C'est ici que commence la principale montée de la journée. Les 200 premiers mètres sont particulièrement raides, sur un sentier à la lisière de la forêt qui a été aménagé avec des marches faites de rondins de bois. Comme souvent avec ce type de chemin, l'écartement des rondins est trop grand pour les petites jambes et trop petit pour les grandes jambes.  Bientôt la pente devient moins raide et nous poursuivons notre montée à travers une suite de bosquets et de clairières. Nous nous arrêtons à une place de pique-nique aménagée en bordure de forêt pour casser la croûte : salade de coquillettes, courgettes et herbes, fromage du Toggenburg au chutney d'oranges et salade de fruits sont au menu du jour. Cela intéresse visiblement un chat qui arrive en miaulant, monte sur le banc puis sur la table, puis ignore royalement le petit morceau de fromage qu'on lui lance par terre.

La montée continue, toujours par la même alternance de forêts et de clairières. Nous traversons une zone qui semble avoir subi plusieurs glissements de terrain. Des passerelles en rondins de bois ont été aménagées à deux endroits ; la première d'entre elles fournit un bel effet de trampoline quand nous passons dessus. Un peu plus loin, c'est tout un pan de la colline qui s'est écroulé ; ici, on a aménagé un long escalier en bois pour remplacer le sentier disparu. Mais il a dû y avoir un autre glissement de terrain depuis l'installation de l'escalier, car sa première marche est maintenant bien au-dessus du niveau du sol.

Nous atteignons un deuxième "point culminant" à 808 mètres, où nous passons du canton de Lucerne à celui de Nidwald, puis il faut redescendre de cinquante mètres jusqu'à Teufimoos, où un club de tir est en pleine activité. Au-dessus, le Pilatus reste invisible, son sommet caché sous une chape menaçante de nuages noirs. Un peu plus loin, quelques vaches plutôt baraquées et aux grandes cornes se ruent vers nous en meuglant : nous sommes bien contents de voir qu'elles sont de l'autre côté d'une clôture électrique par rapport au sentier.

Une dernière grimpette et nous voilà à Brunni, troisième et dernier point culminant de la journée à 825 mètres. Le petit hôtel qui se trouve ici est fermé et a l'air plus ou moins abandonné. Nous franchissons un torrent, puis commençons la descente sur Hergiswil, d'abord sur un sentier étroit et glissant en forêt, puis par de verts alpages peuplés de moutons et de vaches. Depuis ces pentes ensoleillées, la vue sur le lac est superbe : je peux voir la quasi totalité des quatre dernières étapes parcourues, et bien au-delà encore, jusqu'au Zugerberg juste derrière chez moi. A Loo, deux petits chatons jouent dans la cour d'une maison ; on nous demande si nous voulons les emmener avec nous…   Peu après, nous arrivons aux premières maisons de Hergiswil et descendons à travers le village jusqu'au lac. Il est trop tard pour visiter le Glasi, mais il n'est jamais trop tard pour boire une bière en terrasse au bord du lac. Le vapeur Unterwalden arrive et repart, des hydravions amerrissent et décollent, le soleil nous chauffe et la bière nous rafraîchit, tout est exactement comme il faut.
 

Etape suivante
Etape précédente