Les trésors oubliés du Val Bavona: Bedú

Après une randonnée placée sous le signe du défrichage dans les Centovalli en compagnie de l'infatigable Manu, les prévisions météo plus rassurantes au Sud me persuadent de rester à Bignasco pour entreprendre le lendemain la découverte du méconnu Val Bavona, situé à deux pas.
Durant la soirée, Manu m'apprend que la neige devrait tomber jusqu'à 1400m durant la nuit. Du coup, l'itinéraire envisagé qui relie Mulini à Bedu pourrait être compromis. L'aventure, c'est l'aventure. Et puis, l'orientation Sud de la pente devrait permettre une fonte rapide de l'éventuel saupoudrage durant la matinée.
Au réveil, force est de constater que la limite de la neige se situe bel et bien à hauteur de la zone délicate, et la couverture nuageuse est encore fort dense. Le bus postal me dépose à Mondada, hameau typique de la région, avec ces rustico qui font furieusement voyager dans un temps où les sentiers étaient une clé de voûte dans la vie pastorale. D'ailleurs, celui qui démarre à Mulini, à quelques encablures de Mondada, se remarque assez bien grâce à des marques rouges assez présentes. Ensuite, le sentier se faufile littéralement à travers la paroi pour nous conduire à Cogliata. Marches, escaliers taillés dans la roche, mains courantes, les aménagements pour sécuriser le passage de l'homme sont aussi abondantes que fascinantes (T4).
La clairière de Cogliata se profile à l'horizon tandis que les nuages s'effilochent. En s'élevant relativement à gauche, on retrouve des marques bleues indiquant la traversée vers le Monte di Dentro. Pour rejoindre Bedu, on quitte bientôt la sente dans le lit d'une rivière(T5). On serpente alors entre les bancs de rocher et les gazons raides pour se frayer un chemin à tâtons(T5+). On aperçoit de façon irrégulière des marques rouges pas évidentes à repérer. L'usage du GPS s'avère assez utile. Une succession d'alpages en ruine (Corte di Fonda, di Mezzo) marque la fin des difficultés, le haut de la montée n'étant qu'une simple formalité. Pour gagner la Corte di Cima, il me faudra encore brasser une vingtaine de cm de poudreuse dans un faux-plat montant. La météo reprend des allures de printemps tandis que je pénètre le chalet de Bedu où je dois hélas constater - malgré mes recherches de longue haleine - la disparition du livre d'or déposé par un alpiniste jeune et modeste, dont j'ignore l'identité. Qu'à cela ne tienne, j'avais un peu de Rivela Rouge dans ma besace.
Et hop, me voilà reparti, plus fringant que jamais pour la descente. Après avoir retrouvé tant bien que mal mes traces de montée, je décide de redescendre par le couloir encaissé qui plonge sur Fontana.
Ce dernier dégage une impression de solitude assez prégnante. L'austérité des lieux ne sera pas au goût de la majorité, mais force est d'admettre, que l'impression d'arpenter une nature délaissée et mystérieuse, est assez grisante à mes yeux. Laissons aux autres le soin de s'attrouper sur les autoroutes de la randonnée pour préserver de la sorte ces terres aux charmes ancestraux.