Aiguille des Chamois : Arête S moderne

Face au panorama grandiose sur la chaine du Mont Blanc, le  massif des Aiguilles Rouges (qui frise les 3000m) offre une vaste palette de grandes voies d'escalade sur un gneiss rouge magnifique n'ayant souvent rien à envier au granit d'en face. Ouverte par le légendaire Michel Piola, l'arête sud "moderne" (la classique contourne les difficultés) de l'Aiguille des Chamois offre 15 belles longueurs débouchant sur le 2ème plus haut sommet du massif. Les conditions sinistrées en altitude de cet été 2022 constituaient le moment idéal pour aller la découvrir sous la corde bien tendue de Matthias.

Topo détaillé ici

Dernière sortie du séjour 2022 avec notre formidable guide des Contamines. Après 2 petites journées en raison de la météo instable, on est motivés à bloc pour finir en beauté sur un truc nourrissant. A défaut des Drus (plus en condition) et de la Noire de Peuterey ou Matthias s'est mis en tête de me trainer, cette longue voie de 15 longueurs dans le cadre exceptionnel du Lac Blanc semble une bonne pioche. Je suis juste un peu impressionné sur le papier par la quantité de longueurs entre 6a et 6b, presque la moitié...mais au final c'est bien la 1ère fois depuis longtemps que je trouverai les cotations aussi flatteuses (habituellement plus les années passent et plus je trouve tout sous-coté, sous-équipé, trop raide, etc...). J'ai pas triché une seule fois, c'est tout dire ! Merci aux esprits chagrins de ne pas toucher au topo (NB : les cotations camptocamp sont celles du topo officiel des Aiguilles Rouges).

Pour le reste nous avons adoré cette voie que nous avons suivie fidèlement jusqu'en haut, sans trouver d'ailleurs les longueurs finales en 5 si délitées que ça (en tout cas bien moins que le Bec d'Etache 3 jours plus tôt !). Le rocher est souvent magnifiquement sculpté, la grimpe est presque toujours très belle, une nouvelle fois chapeau Mr Piola ! On reviendra du coup faire les 7 lacs...Le seul (mini) reproche qu'on pourrait faire est le manque d'allure de l'ensemble : point de grand pilier élancé vers le ciel mais plutôt une suite de ressauts recousus ensemble par des transitions parfois herbeuses ou des bouts d'arête horizontale. Mais c'est vraiment d'ordre deux.

Après 4 jours et au lendemain de la face E des crochues, Agnès avait obtenu un jour de repos histoire de ménager son genou - qui a finalement tenu le coup au delà des espérances cet été. Reste plus qu'à muscler encore un peu tout ça pour reprendre le ski l'hiver prochain ! D'ailleurs 3 jours après c'était à mon tour d'être sur le carreau, douleur soudaine et infernale en pleine nuit et appendicite aigue opérée de toute urgence. Quelques semaines à me tenir tranquille en broyant du noir.

Itinéraire et conditions : tout est bien sûr sec mais un tout petit névé (qu'on n'emprunte pas) survit encore miraculeusement rive D de la combe de Beugeant...l'attaque et le cheminement se trouvent assez bien avec le topo c2c. Le soleil arrive au pied de la voie dès 7h30, et on ne le quitte plus. L'équipement est bon là ou c'est dur et ou on ne peut pas compléter, mais clean dans les fissures plus faciles - et quand même aéré dans les dalles ! Pas mal de longueurs ne font que 30m et sont peu soutenues dans la cotation (qui est d'autre part très gentille...), du coup l'ensemble reste quand même assez roulant excepté le grand mur impressionnant et gazeux de la 5ème tour. Bref j'ai vu des TD bien plus rugueuses que celle là !

Du sommet nous avons suivi l'arête W avec un ou 2 courts contournements vers le N, on n'a jamais trouvé le rappel mais ça passe bien sans (bon vu du second hein, Matthias m'a quand même mouliné 2 ou 3 fois). La brèche pour quitter l'arête vers le S est assez caractéristique, traces de sente dans la terre. La suite c'est un peu la purge, éboulis raide et instable, gravillons roulant sous les pieds, mieux vaut rester autant que possible rive D en désescaladant de petits bancs rocheux...avec mes genoux grinçants j'ai trouvé ça franchement pénible mais ce n'est pas très long et on retrouve vite des traces de sente au voisinage du lac de Beugeant. Pas regretté d'avoir trimballé mes batons dans la voie du coup ! Du Lac Blanc on a opté pour retraverser sur l'Index afin d'éviter les bouchons de promeneurs redescendant à la Flégère.

Météo : grand beau limpide et très doux (0° à 4400m), pas de vent.

Accès : possible à pied depuis le col des Montets mais il faut être rapide...sinon comme tout le monde depuis l'arrivée du TS de l'Index (au retour, dernière descente à 17h45) avec étape recommandée au refuge du Lac Blanc si on souhaite attaquer tôt le lendemain.

Hébergement : dormi la veille au refuge du Lac Blanc (plein comme un oeuf) ou Matthias avait miraculeusement arraché les 3 dernières places en ce WE du 15/08. Evidemment ne pas y chercher la solitude...même si le soir est bien plus tranquille après le retour des centaines de promeneurs. On était les seuls grimpeurs mais pas fâchés d'y dormir pour raccourcir l'approche vers l'Aiguille des Chamois. Ils ont accepté de nous laisser un petit-déjeuner préparé dès 6h (sinon c'est 7h).

Pas moins de 5 (!) Népalais aident à faire tourner cette grosse boutique, l'occasion rêvée pour moi de repratiquer mon népali qui avait déjà recommencé à rouiller depuis le retour du Manaslu en décembre dernier. Un vrai plaisir de voir leur sourire jusqu'au oreilles en entendant la langue de leur pays. Un vrai plaisir de voir leur sourire jusqu'au oreilles en entendant la langue de leur pays - खाना धेरै मीठो छ !

Horaire : départ du refuge 6h30 - attaque 7h30 - sommet 11h30/12h, Lac Blanc 13h45/14h15 - TS de l'Index 15h15.

Participants : Matthias D (guide) & moi