De la Maurienne à la Méditerranée, sur l'itinéraire de la Grande Traversée des Alpes : 4ème partie


Publiziert von stephen , 1. September 2019 um 16:06.

Region: Welt » Frankreich » Alpes-Maritimes
Tour Datum:11 August 2019
Wandern Schwierigkeit: T2 - Bergwandern
Wegpunkte:
Geo-Tags: F 

J11, du Boréon à la Madone de Fenestre : 1013 m de montée, 608 m de descente, 5 heures 45 de marche

Je dois l'avouer : nous avons triché un peu. Pour caser notre randonnée de Modane à Menton dans le temps disponible, nous nous faisons conduire en taxi de Saint-Etienne de Tinée jusqu'au Boréon, au-dessus de la vallée de la Vésubie. Ce sont deux, peut-être même trois étapes que nous avons sautées, ce qui laisse quand même un petit sentiment d'inachevé. Cela dit, parmi les autres randonneurs que nous avons rencontrés en chemin et qui faisaient de très longs parcours, presque tous ont eu recours aux bus ou aux taxis à un moment à un autre, soit de manière planifié à l'avance comme nous, soit pour faire face à des imprévus.

Nous disons au revoir au "Luxembourgeois", que nous ne verrons plus, et à la Valaisanne que nous retrouverons dans quelques jours au gîte du Camp d'Argent. Au Boréon (1476 m), où nous arrivons vers 9 heures après 75 minutes de taxi qui ont laissé nos estomacs un peu à l'envers, de nombreux pêcheurs sont déjà installés au bord du lac et nous assistons en direct à la prise d'une belle truite. 

On est dimanche, il fait beau et la région est prisée par les randonneurs à la journée. Nous en sommes conscients presque tout de suite : par rapport aux jours précédents, il y a énormément de monde sur les sentiers. Au niveau d'un pont, un groupe est en train de scruter le lit du torrent, loin dessous : une gourde y est tombée et ils essaient de la retrouver, apparemment sans succès. Quelqu'un va avoir soif…

Nous montons doucement le long d'un joli torrent, jusqu'à une bifurcation où nous faisons une petite pause pour boire et regarder la carte. Un groupe nous rejoint, accompagné d'un guide local qui nous suggère la variante passant par le refuge de Cougourde : c'est un peu plus long, nous dit-il, mais il y aura moins de monde et le sentier balcon entre le refuge et le lac de Trécolpas est très beau. Nous suivons son conseil et, effectivement, ce sentier est nettement plus tranquille que celui qui monte directement au lac. Nous buvons un sirop de menthe avec de l'eau gazeuse à la terrasse du refuge (2100 m) pendant qu'une famille de bouquetins se promène juste à côté, puis faisons tout de suite une autre pause pour manger notre pique-nique et faire une bonne sieste allongés dans l'herbe. 

Un joli sentier balcon nous amène au lac de Trécolpas (2187 m), que nous atteignons sous un ciel devenu chargé de nuages. On annonce une dégradation météorologique pour demain, ces nuages en sont le signe précurseur. Le lac doit être le but de promenade de tous ceux qui sont montés depuis les parkings du Boréon, car nous nous trouvons seuls dès que nous le quittons. Le Pas des Ladres, notre col du jour, se trouve encore 300 mètres au-dessus, mais la montée est facile, ne devenant raide que tout à la fin. Au col (2432 m), c'est un paysage de pics et d'aiguilles sombres qui s'ouvre devant nous vers l'est : derrière cette chaîne qui culmine à plus de 3000 mètres se trouvent la Vallée des Merveilles et, plus au nord, l'Italie. Nous aurions aimé poursuivre jusqu'au col de Fenestre, à la frontière même, mais le temps semble se dégrader et nous préférons descendre directement au refuge de la Madone de Fenestre, longeant un vallon dont le fond est entièrement recouvert de rochers et qui porte le nom totalement inapproprié de Prairie de Fenestre. L'orage qui menaçait ne se concrétise pas, et c'est à nouveau sous un soleil chaud que nous arrivons au refuge (1903 m), curieusement flanqué d'une chapelle, d'un vieil hôtel de pèlerinage et d'un grand parking.

Ma première impression en arrivant n'est pas bonne : alors que le refuge est accessible par la route et que partout ailleurs, nous avons pu boire d'excellentes bières artisanales, ici il n'y a que des canettes 25 cl de Kronenbourg insipide. Isabelle se laisse persuader d'acheter un sirop "goût tarte aux pommes" qui, selon le gardien, a un gros succès. Mais la boisson en question est infâme, n'a aucun goût si ce n'est celui de produits synthétiques, et finira dans les géraniums ! Ce refuge est le moins bon de tous les hébergements où nous avons dormi : le dortoir est assez confortable, mais l'état de délabrement des couloirs, des escaliers et surtout des sanitaires est quand même surprenant, avec une mention particulière pour le tableau électrique qui se trouve par terre immédiatement à côté de la douche, juste à l'endroit le plus humide de la pièce. 

Ce soir, pour la première fois, nous tombons sur quelqu'un qui fait la Via Alpina dans son intégralité. C'est un Allemand de Cologne, informaticien qui a pris six mois de congé entre deux gros projets et qui est parti de Slovénie au printemps, sans expérience préalable de ce type de grande randonnée. Pendant que nous discutons, on nous sert une excellente soupe aux légumes avec de vrais gros morceaux dedans, suivie d'une blanquette de veau. Nous allons d'ailleurs manger de la blanquette trois soirs de suite, ce qui nous permettra d'établir un petit classement du meilleur exemplaire de ce plat dans les Alpes-Maritimes. Le gardien du refuge prend des nouvelles de la météo : l'arrivée du mauvais temps se confirme pour demain, avec des orages dès midi. Nous avons une petite étape mais décidons néanmoins de partir très tôt.

 
J12, de la Madone de Fenestre à Saint-Grat : 668 m de montée, 988 m de descente, 4 heures 30 de marche

Nous nous levons à six heures, il fait encore nuit. Paradoxalement, l'étape du jour est la plus courte de toutes, mais il y a deux cols à passer et nous voulons absolument les avoir derrière nous avant l'arrivée des orages. Quelques gouttes tombent pendant que je fais mon sac dehors. 

Nous partons sous un ciel de plomb, passons au-dessus de la Vésubie sous le refuge, puis commençons la montée vers la Baisse des Cinq Lacs. Un troupeau de vaches broute l'herbe autour du sentier : ce sont presque les seules vaches que nous avons vues en dix jours de marche, ce qui est étonnant quand on a l'habitude de randonner en Suisse !  Il se met à pleuvoir : l'averse dure un quart d'heure, puis s'arrête. C'est la seule pluie de nos 15 jours de marche : mise à part ce petit quart d'heure humide, nos couvre-sacs et vestes imperméables ont passé l'intégralité de la randonnée dans le fond du sac. 

La montée est facile et nous arrivons vite au premier des deux cols de l'étape, la Baisse des Cinq Lacs (2350 m). Sous le col sur son versant sud se trouvent effectivement cinq lacs, de forme et de taille différentes. Nous croisons un couple venant en sens inverse qui a campé au bord de l'un des lacs ; ce sont les seuls autres randonneurs que nous voyons aujourd'hui. Au-delà des lacs, en bas d'un raidillon, un chamois traverse le sentier devant nous… et soudain il y a des chamois partout, en contrebas du chemin, venus de nulle part. Impossible de les compter, mais il doit y en avoir une trentaine. Ils n'ont pas l'air perturbés par notre présence et se laissent observer tranquillement pendant de longues minutes, avant de repartir plus haut. 

Nous descendons jusqu'au Plan de Prals (2111 m), puis remontons à la Baisse de Prals (2345 m), le deuxième col de la journée. Il est dix heures du matin et nous sommes presque arrivés à notre destination. Le risque d'orage semble être écarté pour le moment, le bleu a repris le dessus sur le gris au-dessus de nos têtes. Nous descendons, d'abord par des pentes herbeuses raides, puis en forêt, jusqu'au hameau de Saint-Grat et à notre hébergement au Relais des Merveilles (1576 m). Il est midi et nous n'aurons accès au dortoir qu'à 15 heures 30 : en attendant, nous mangeons à la terrasse du restaurant, puis passons deux heures à lire.  Le gîte est spacieux : en plus de notre dortoir à six lits, il y a une grande salle commune, un balcon et même un coin cuisine. En faisant ma lessive, je me rends compte que c'est la dernière fois que je devrai m'adonner à cette corvée : il ne nous reste que quatre jours de marche, que le temps passe vite !

Vers quatre heures, pendant que nous jouons au Scrabble dans la salle commune, l'orage prévu arrive enfin. Le ciel s'assombrit, de gros nuages arrivent de toutes les directions en même temps, le vent se lève, les portes et fenêtres claquent… et puis c'est le déluge pendant une bonne heure et demie. Au plus fort de l'orage, un groupe de 9 randonneurs à cheval arrive. Ils font un tour d'une semaine et c'est leur premier jour, ça commence mal ! L'étape a été plus longue que prévu et ils ont été pris dans l'orage à une demi-heure de l'arrivée. Leurs affaires sont trempées, tout sent le cuir mouillé et le cheval, heureusement qu'ils ne partagent pas notre dortoir, d'autant plus que certains du groupe se disent trop fatigués pour prendre une douche ! La blanquette de veau du jour est nettement plus raffinée que celle de la veille, mais l'ambiance dans la salle à manger est davantage celle d'un hôtel que d'un gîte d'étape. Les couples et les personnes seules sont installés à des tables individuelles, il manque la convivialité des grandes tablées que nous avons connues ailleurs. 

 
J13, de Saint-Grat au Refuge des Merveilles : 939 m de montée, 424 m de descente, 5 heures 30 de marche

Cette petite étape est peut-être la moins intéressante de la quinzaine : elle n'est pas désagréable, loin de là, juste peut-être un peu plus terne que d'autres au niveau des paysages et des faits marquants. Le mauvais temps s'est évacué pendant la nuit et le soleil est de retour. Nous partons peu après les cavaliers, dont le matériel n'a pas du tout séché pendant la nuit et qui vont donc passer la journée dans des vêtements et des bottes trempées. Comme nous, ils vont au Refuge des Merveilles, mais par un itinéraire plus long et plus bas.

Après la Tinée et la Vésubie, aujourd'hui c'est la Gordolasque que nous franchissons sur un pont juste en amont du gîte. La montée au Pas de l'Arpette commence tout de suite, sur un chemin non balisé et apparemment peu utilisé qui nous évitera trois kilomètres de marche sur la route goudronnée. Raide dans sa première partie, le sentier fait des lacets serrés, puis part en balcon vers le nord-est, au-dessus de la vallée. Assez indistinct, ce sentier n'est pas toujours facile à suivre. A deux reprises, nous manquons de nous tromper à des bifurcations où des sentiers nettement plus marqués partent dans de fausses directions. Juste avant de rejoindre l'itinéraire principal au niveau d'une conduite forcée, le sentier se perd complètement, nous obligeant à faire de la brasse dans un océan d'orties et d'herbes longues qui montent au-dessus de ma taille. Peu de temps après, nous rejoignons le sentier venant du Pont du Countet pour terminer la montée au Pas de l'Arpette (2508 m).

Devant nous s'étale la partie inférieure de la Vallée des Merveilles. J'avoue être déçu : je m'attendais à une vallée encaissée, grandiose, entourée de pics, mais ce que nous voyons est plutôt moins impressionnante que d'autres paysages que nous avons traversés ces derniers jours. Evidemment, en arrivant par ce col, nous avons loupé le cœur de la vallée aves ses gravures rupestres. Nous aurions peut-être dû faire comme les autres randonneurs rencontrés à la Madone de Fenestre et qui sont tous passés ensuite par le Pas du Mont Colomb et le refuge de Nice pour arriver au refuge des Merveilles.

Il y a un panneau au col, que nous ne lisons pas, pensant que ce sont juste des informations touristiques. C'est une erreur car, en ne lisant pas ce panneau, nous manquons l'information importante que les bâtons de marche sont interdits dans cette vallée. C'est seulement plus bas, en nous faisant enguirlander par un berger, que nous nous rendons compte que tous les autres randonneurs ont attaché leurs bâtons sur leur sac. Nous arrivons au refuge des Merveilles (2135 m) vers 15 heures. L'accès au dortoir n'ouvre que dans une heure, que nous passons agréablement devant le refuge à déguster une nouvelle bière, celle du Comté, et à discuter avec d'autres randonneurs. 

J'ai lu pas mal de commentaires négatifs sur ce refuge et m'attends donc au pire, mais nous sommes tous les deux très agréablement surpris. Certes, le dortoir est énorme - une soixantaine de lits dans une seule pièce - et on est très serrés à table (ils ont servi 110 repas le soir où nous y étions), mais l'équipe de jeunes qui dirige le refuge est sympa, dynamique et compétente. Il n'y a pas de file pour les douches, l'eau est chaude et c'est beaucoup plus propre que la Madone de Fenestre. La blanquette de veau, servie avec des pâtes plutôt que le riz plus habituel, est la meilleure de celles que nous avons mangées depuis trois jours. Ce refuge des Merveilles n'est peut-être pas une merveille en soi, mais il est plein de bonnes surprises.  Les cavaliers, après une nouvelle étape qui a duré plus longtemps que prévu, arrivent au milieu du repas, mécontents car ils ont dû marcher à pied une bonne partie de la journée, le terrain étant trop accidenté pour pouvoir rester à cheval. 
Demain nous quitterons l'ambiance "haute montagne" et commencerons la longue descente vers la mer…

Dernière partie
Troisième partie

Tourengänger: stephen


Minimap
0Km
Klicke um zu zeichnen. Klicke auf den letzten Punkt um das Zeichnen zu beenden

Galerie


In einem neuen Fenster öffnen · Im gleichen Fenster öffnen


Kommentar hinzufügen»