Ladu - Imine: sentier historique par le Bächigrabe

L'implémentation de la fonction "Voyage dans le temps", sur le portail des cartes de la Confédération (map.geo.admin.ch), est le plus beau cadeau qui puisse avoir été fait à un amateur "d'archéologie pédestre" comme moi. On peut passer des heures, des jours, des semaines à comparer les différentes évolutions des cheminements sur la carte, à détecter et répertorier les sentiers qui ont apparu puis disparu au fil du temps...

Au nombre d'entre eux: le sentier qui relie Ladu, au-dessus de Hohtenn, sur la rampe sud de l'ancien Lötschberg, à Imine, un groupe de deux chalets perdus dans la forêt sur la droite de la vallée encaissée qui monte vers le Lötschental. Apparu sur la carte au 1:25'000 en 1892 déjà, il disparait en 2005 seulement.

Disparu, vraiment? Allons voir ce qu'il en est! Au départ de la gare de Hohtenn, il faut redescendre un peu pour rejoindre l'itinéraire balisé Hohtenn - Ladu (ou alors faire un détour par la route, vers l'est), un large sentier aux zig-zags prononcés, qui passe rapidement sous la voie de chemin de fer puis conduit à un promontoire duquel, depuis la croix, la vue sur la vallée du Rhône est belle (pt 1148m). Le sentier croise ensuite une première fois, puis une deuxième fois la route qui monte à Ladu. Le sentier vers Imine commence à ce deuxième croisement (alt. 1315m environ) et part vers le nord-ouest; son amorce est encore relativement bien visible. Il s'agit, en fait, de la continuation du sentier précédent. Il est encore très bien marqué par endroit, assez large même, et présente en certains endroits des murs de soutènement qui attestent de son âge avancé. En revanche, il n'est pratiquement pas balisé (quelques traces ici et là) et peu cairné (j'en ai ajouté deux).

Conformément au tracé dessiné sur la carte jusqu'en 2004, il se perd brièvement aux environs de l'altitude 1470m, avant de rejoindre, à 1500m, une autre branche du même sentier qui vient directement du hameau de Ladu. Cette branche est très bien marquée, à tel point qu'en sens inverse, en venant d'Imine, on risque d'être naturellement conduit sur celle-ci (son tracé complet est visible sur la carte de 1981 à 1992, alors que la branche inférieure, durant cet intervalle, n'est plus indiquée). Un câble gaîné de plastique noir, qui parait relativement récent, assure les passages légèrement exposés.

Jusqu'au Bächigrabe, la trace est excellente et continue, à tel point qu'elle laisse penser que le sentier est régulièrement fréquenté. De part et d'autre du sentier, la pente se fait plus raide puis vertigineuse, et quelques trouées dans la forêt laissent de belles échappées sur le fond de la vallée de la Lonza. Au Bächigrabe, en apparence, tout se gâte: une succession de petits glissements de terrain semblent avoir emporté le sentier. De la rive gauche du Bächigrabe, le cheminement côté rive droite semble pratiquement impossible. Fausse impression! Une fois le torrent franchi, on retrouve plusieurs sections de câble cachées sous la végétation, ainsi que quelques arceaux pour les pieds. Contre toute attente, le passage en rive droite n'est pas si compliqué. J'en profite même pour faire un peu le ménage, dégager le câble et les arceaux pris sous la terre. Quelques ancrages sont arrachés, mais les plus utiles tiennent bon.

La sente est désormais nettement moins marquée. Elle descend un peu, puis regagne l'altitude perdue en montant le long d'une petite cheminée. On se repère avec les sections câblées et les quelques arceaux rencontrés ça et là. On aborde peu après le Marchgrabe, qui pose un peu plus de problèmes que la ravine précédente, en rive gauche surtout: cette fois, certains ancrages utiles de la main courante n'ont pas tenu. Il faut donc progresser vers le fond de la ravine sur un terrain un peu exposé et sans sente (j'ai coté ce court passage T5). Rive droite, c'est plus facile. Un éboulement traverse une grande partie de la face, mais l'itinéraire passe en fait sur la droite puis sur le dessus de l'éboulement, que l'on franchit sans difficulté.

Le sentier, toujours peu marqué mais peu paumatoire, monte ensuite en pente douce dans la forêt jusqu'à Imine, où il se connecte au sentier principal (mais non balisé) Mittal - Ladu via Spilbielalpji.
La descente vers le fond de la vallée est bien marquée et le sentier est même assez large, du moins dans un premier temps. Attention: entre 1300 et 1500m, des coupes de bois ont éclairci la forêt et permis à d'immenses orties de coloniser les bords du sentier. Pantalons obligatoires! A 1340m d'altitude environ, le sentier devient subitement étroit et plonge dans une pente extrêmement raide, en forêt, qu'il affronte en une multitude de lacets impressionnants. On se croirait un peu dans la descente de la Grande Gorge du Salève!

Pressé par le temps, j'ai dû rater le virage à gauche du sentier peu avant l'arrivée à Mittal - à moins que cette section ait disparu dans la forêt? - et me suis retrouvé dans un sous-bois juste assez peu danse pour progresser sans trop de problème. On débouche sur la route à la hauteur de l'arrêt de Car Postal dans le sens de la montée. Attention: l'arrêt pour la descente, que l'on ne voit pas, est situé 500m plus bas!

Jadis très bien aménagé (murs de soutènement, nombreuses mains courantes, arceaux pour les pieds), ce sentier est encore bien marqué et facile à suivre, exception faite du franchissement des deux ravines, réservé aux randonneurs avertis. Il est dommage d'avoir renoncé à l'entretien de ce sentier, par endroit très joliment perché, le seul en balcon sur la rive gauche de la partie inférieure de la Lonza. Je recommande la ballade, avec les précautions d'usage.