Sur le Chemin panorama alpin : Douzième étape, d'Oberägeri à Cham
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Ceux qui ont suivi ma lente progression le long de l'itinéraire national No. 3 se rappelleront peut-être qu'à la fin des vacances de Noël, j'étais arrivé dans l'Ägerital, après avoir marché depuis Einsiedeln sous un soleil printanier. Le jour de l'An, accompagné de l'amie qui passait les vacances avec moi, j'avais l'intention de faire l'étape suivante, mais un brouillard épais et froid nous est tombé dessus au bout d'une heure, nous poussant à abandonner notre randonnée en faveur de la chaleur du bus.
Un bon mois est passé depuis ; janvier est passé et février est arrivé. Une semaine de soleil et de douceur a été interrompue par un front froid et deux jours où il a neigé assez bas, mais les prévisions pour ce samedi sont plutôt bonnes, avant l'arrivée de nouvelles perturbations dimanche. La question est : à quelle altitude retrouverai-je la neige, et aurai-je besoin de raquettes ? Je décide de ne pas les prendre ; c'est une bonne décision.
Je pars de Lucerne en milieu de matinée sous un soleil et un ciel bleu qui n'est dérangé que par quelques voiles de nuages d'altitude. Mais à Zug, où je dois prendre le bus, le brouillard est encore présent et je me demande si ma randonnée ne subira pas le même sort qu'au 1er janvier. A mi-chemin vers Oberägeri le bus sort de la chape grise, mais le soleil ne me semble pas suffisamment fort pour la dissiper entièrement aujourd'hui.
L'étape du jour est une histoire de lacs : elle débute au bord de l'Ägerisee et se termine par une balade le long des rives du Zugersee. Entre deux, il y a deux montées relativement modestes qui me feront franchir les crêtes qui entourent la vallée de l'Ägerital et la maintiennent un peu à l'écart du reste du canton de Zug. A Oberägeri, à une altitude de 735 mètres, des familles donnent à manger aux canards au bord du lac dont les eaux, calmes et sombres, s'en vont vers le sud, entourées de collines légèrement saupoudrées de neige.
La randonnée commence par une montée raide (la seule vraie montée de la journée d'ailleurs) à travers puis au-dessus du village. Trois chats m'observent du rebord d'une fenêtre : deux sont d'un noir parfait, le troisième d'un blanc tout aussi parfait. Je verrai beaucoup de chats aujourd'hui ; tous noirs à l'exception de cet individu non-conformiste. Il y a des grues et des chantiers un peu partout sur le flanc de colline orienté sud au-dessus du centre du village ; beaucoup de chambres avec vue sont en cours de réalisation. Malgré son isolement relatif du reste du canton, Oberägeri est un lieu de résidence prisé, et pas des moins chers. Vues depuis la route, les constructions modernes paraissent tout petites… mais souvent on ne voit que la porte d'entrée, le reste de l'appartement – sans doute vaste et lumineux – se trouve en dessous, cachée par la pente.
Cette montée initiale assez rude prend fin au restaurant Kistenpass (ouvert le samedi et le dimanche dès 9h 30, un écriteau m'informe). Il y a un fort parfum de campagne ici… ou, pour parler plus prosaïquement, ça sent la bouse de vache. Une mince couche de neige recouvre les pâturages de part et d'autre de la route d'alpage que je suis, mais cette dernière est dégagée. Cette étape, comme certaines déjà parcourues, souffre d'un excès de goudron. Ce n'est pas vraiment une surprise : je suis à basse altitude et la région est assez densément peuplée, Zürich n'est qu'à une trentaine de kilomètres.
A la ferme de Hinterwiden, où des chiens me gueulent dessus tout en restant bien chez eux, l'itinéraire quitte provisoirement le goudron pour monter à travers champs, en pente douce, vers une crête qui, selon un panneau indicateur, jouit d'une vue panoramique. Je remonte la pente enneigée (mais pas assez pour que ce soit gênant) pour atteindre la crête et le point culminant de la randonnée, à une altitude de 984 mètres. Je ne marche que depuis une heure, mais je décide quand même de casser la croûte ici : la vue est belle, il y a des bancs et je ne suis pas sûr de retrouver un endroit aussi propice. C'est le seul endroit de cette étape où on bénéficie vraiment d'un panorama alpin. Je mange rapidement mes sandwiches (pas de soupe aujourd'hui, j'ai fait dans le minimalisme) avant de me remettre en route.
Je descends à présent vers Unterägeri, en pente raide, face au Rigi et au Pilatus lointains. La descente est très glissante : la neige a fondu mais le sous-sol est encore gelé. Le résultat est une mince couche d'herbe et de terre posée sur un fond qui n'offre aucune prise pour mes chaussures déjà lourdes de boue. Je ne sais pas trop comment, mais j'arrive à ne pas m'étaler, malgré une ou deux glissades d'anthologie. Juste avant d'arriver à Unterägeri, je passe devant une grande villa surmontée de tourelles qui, dans un passé pas trop lointain, a dû être splendide. Les beaux jours sont malheureusement révolus et la villa présente un aspect de maison hantée sinistre avec des fenêtres soit cassées, soit barricadées et des murs couverts de graffitis.
Unterägeri est plus grand que sa petite sueur Ober du même nom, et il me faut une bonne demi-heure pour traverser le village de part en part. Le carnaval vient manifestement de se terminer : les trottoirs sont recouverts de confettis et des drapeaux colorés flottent au-dessus des rues. A la sortie sud du village, un panneau m'explique que l'enclos voisin contient plusieurs espèces de moutons rares… tellement rares qu'ils sont complètement invisibles. Ca sent pourtant le mouton et j'entends des clochettes quelque part à l'intérieur, ils y sont donc peut-être.
Je suis une petite route, tout d'abord vers le sud-ouest, puis vers le nord-ouest, entre fermes et collines basses. Il y a pas mal de promeneurs sur cette partie de l'itinéraire : une petite fille sur un poney Shetland accompagnée de sa mère qui court à côté ; un couple qui promène deux gros bergers allemands qui n'en finissent pas de se sauter dessus en aboyant et en remuant la queue. Un panneau m'informe que je suis sur le parcours "Nordic Walking Ägerital", mais je ne vois personne qui pratique cette activité à la mode. Quoique… une dame blonde qui promène son chien pourrait bien être suédoise… et donc marcheuse nordique. Un petit téléski attend tristement qu'un peu de neige vienne sauver sa saison. La buvette à côté de son départ est restée ouverte, optimiste, en espérant que quelques-uns des promeneurs du samedi après-midi remplaceront les skieurs manquants et renfloueront un peu la caisse.
Je contourne un joli vallon marécageux (Zigermoos, 777 m) par un enchaînement de petites routes, de pistes caillouteuses et de sentiers boueux. Une passerelle en bois permet de franchir un endroit particulièrement humide, mais elle est recouverte d'une mince couche de glace et exige un peu de précaution pour éviter un bain de boue. Je traverse une zone boisée, entrecoupée de clairières encore tout enneigées : le soleil n'a pas encore fait fondre toute la neige ici. Je sors de la forêt à Unter Brunegg, 770 m, où une maison toute neuve a été construite tout en respectant le style des fermes zougoises, avec boiseries et fenêtres en pignon. J'entends le bruit d'un moteur électrique derrière moi et suis surpris de me faire doubler par une jeune femme debout sur un engin bizarre, avec deux grosses roues côte à côte, entre trottinette et tondeuse (on m'a appris par la suite que cela s'appelle un gyropode en bon français). A un endroit où un panneau indique que la route est privée et interdite à tout véhicule à moteur, une grosse Range Rover noire me dépasse. Le conducteur s'arrête, regarde longuement le panneau… puis continue, l'air de dire "Moi j'ai une grosse Range noire, je fais ce que je veux."
Une montée courte mais assez raide sur une piste boueuse m'amène au deuxième "point culminant" de la randonnée, vers 850 mètres. La vue s'ouvre à présent vers le nord, avec la chaîne de l'Albis qui s'étend vers l'Uetliberg distant et vers la métropole zurichoise. Plus près, le bruit de tambours remonte depuis le village d'Allenwinden, où le carnaval bat son plein. Je continue vers les hameaux de Bilgerighof et de Muserhof, en descente régulière maintenant. Et voilà, au détour du chemin, le Zugersee bleu qui apparaît loin en dessous, avec l'agglomération de Zug et de Baar au premier plan. Je suis content de voir que le brouillard s'est presque entièrement dissipé et envoie une photo à mon amie, pour lui prouver que Zug sort occasionnellement de sa grisaille. Mais le plus surprenant est le bruit de la ville. Il y a trente secondes, je marchais dans une nature silencieuse ; maintenant, tout d'un coup, l'air se remplit d'un fond sonore urbain. La ville est pourtant encore assez loin ; sans vraiment en être conscients, nous générons quand même un sacré paquet de bruit dans notre vie quotidienne urbaine !
Une dernière descente glissante et boueuse fait place à un sentier gravillonné qui descend en lacets jusqu'à la chapelle Ste. Verena, à la limite supérieure de la zone construite. D'ici, il me suffit d'une demi-heure pour attendre le bord du lac, en passant par un cimetière très bien rangé et la vieille ville de Zug.
Je ne suis pas un fan de Zug, je dois l'avouer, même si j'y ai habité. L'ambiance du lieu est trop riche pour moi ; la vieille ville est jolie mais toujours déserte et manque d'animation ; et certaines des constructions modernes semblent avoir été érigées dans le seul but de faire plus haut et plus laid que le voisin. L'agglomération Zug-Baar est un bel exemple de ce qu'il ne faudrait pas faire en matière d'urbanisme. Heureusement, Zug a un gros atout : son bord du lac est magnifique. Je descends jusqu'à la rive et regarde vers l'ouest, où la flèche effilée de l'église de Cham se reflète dans l'eau calme. Il me faudra encore une heure de marche facile sur le sentier du rivage pour y arriver.
Il y a beaucoup de monde au bord du lac et on y entend toutes les langues du monde (ou de l'Europe en tout cas). Curieusement, ce qu'on entend peut-être le moins est le suisse-allemand : Zug a une réputation de petit paradis pour expatriés fortunés et, à entendre les promeneurs du bord du lac, on comprend pourquoi. Mes grosses chaussures et mon pantalon boueux attirent quelques regards désapprobateurs ; alors je me concentre sur la vue vers le sud, où le Rigi et le Pilatus se dressent devant un ciel dont les tons sont d'un bleu-gris très doux.
J'atteins Cham à cinq heures et quart et, une demi-heure plus tard, suis de retour à Lucerne. A la gare, la foule de Fasnächtler un peu éméchés en déguisement de carnaval se mélange aux hordes de skieurs et de snowboarders, de retour d'une journée en montagne. C'est chaotique et joyeux, tout ce que Zug n'est pas : c'est peut-être pour cela que j'ai déménagé. La prochaine étape du Chemin panorama alpin m'amènera jusqu'à chez moi, avant de repartir vers l'ouest du pays.
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Ceux qui ont suivi ma lente progression le long de l'itinéraire national No. 3 se rappelleront peut-être qu'à la fin des vacances de Noël, j'étais arrivé dans l'Ägerital, après avoir marché depuis Einsiedeln sous un soleil printanier. Le jour de l'An, accompagné de l'amie qui passait les vacances avec moi, j'avais l'intention de faire l'étape suivante, mais un brouillard épais et froid nous est tombé dessus au bout d'une heure, nous poussant à abandonner notre randonnée en faveur de la chaleur du bus.
Un bon mois est passé depuis ; janvier est passé et février est arrivé. Une semaine de soleil et de douceur a été interrompue par un front froid et deux jours où il a neigé assez bas, mais les prévisions pour ce samedi sont plutôt bonnes, avant l'arrivée de nouvelles perturbations dimanche. La question est : à quelle altitude retrouverai-je la neige, et aurai-je besoin de raquettes ? Je décide de ne pas les prendre ; c'est une bonne décision.
Je pars de Lucerne en milieu de matinée sous un soleil et un ciel bleu qui n'est dérangé que par quelques voiles de nuages d'altitude. Mais à Zug, où je dois prendre le bus, le brouillard est encore présent et je me demande si ma randonnée ne subira pas le même sort qu'au 1er janvier. A mi-chemin vers Oberägeri le bus sort de la chape grise, mais le soleil ne me semble pas suffisamment fort pour la dissiper entièrement aujourd'hui.
L'étape du jour est une histoire de lacs : elle débute au bord de l'Ägerisee et se termine par une balade le long des rives du Zugersee. Entre deux, il y a deux montées relativement modestes qui me feront franchir les crêtes qui entourent la vallée de l'Ägerital et la maintiennent un peu à l'écart du reste du canton de Zug. A Oberägeri, à une altitude de 735 mètres, des familles donnent à manger aux canards au bord du lac dont les eaux, calmes et sombres, s'en vont vers le sud, entourées de collines légèrement saupoudrées de neige.
La randonnée commence par une montée raide (la seule vraie montée de la journée d'ailleurs) à travers puis au-dessus du village. Trois chats m'observent du rebord d'une fenêtre : deux sont d'un noir parfait, le troisième d'un blanc tout aussi parfait. Je verrai beaucoup de chats aujourd'hui ; tous noirs à l'exception de cet individu non-conformiste. Il y a des grues et des chantiers un peu partout sur le flanc de colline orienté sud au-dessus du centre du village ; beaucoup de chambres avec vue sont en cours de réalisation. Malgré son isolement relatif du reste du canton, Oberägeri est un lieu de résidence prisé, et pas des moins chers. Vues depuis la route, les constructions modernes paraissent tout petites… mais souvent on ne voit que la porte d'entrée, le reste de l'appartement – sans doute vaste et lumineux – se trouve en dessous, cachée par la pente.
Cette montée initiale assez rude prend fin au restaurant Kistenpass (ouvert le samedi et le dimanche dès 9h 30, un écriteau m'informe). Il y a un fort parfum de campagne ici… ou, pour parler plus prosaïquement, ça sent la bouse de vache. Une mince couche de neige recouvre les pâturages de part et d'autre de la route d'alpage que je suis, mais cette dernière est dégagée. Cette étape, comme certaines déjà parcourues, souffre d'un excès de goudron. Ce n'est pas vraiment une surprise : je suis à basse altitude et la région est assez densément peuplée, Zürich n'est qu'à une trentaine de kilomètres.
A la ferme de Hinterwiden, où des chiens me gueulent dessus tout en restant bien chez eux, l'itinéraire quitte provisoirement le goudron pour monter à travers champs, en pente douce, vers une crête qui, selon un panneau indicateur, jouit d'une vue panoramique. Je remonte la pente enneigée (mais pas assez pour que ce soit gênant) pour atteindre la crête et le point culminant de la randonnée, à une altitude de 984 mètres. Je ne marche que depuis une heure, mais je décide quand même de casser la croûte ici : la vue est belle, il y a des bancs et je ne suis pas sûr de retrouver un endroit aussi propice. C'est le seul endroit de cette étape où on bénéficie vraiment d'un panorama alpin. Je mange rapidement mes sandwiches (pas de soupe aujourd'hui, j'ai fait dans le minimalisme) avant de me remettre en route.
Je descends à présent vers Unterägeri, en pente raide, face au Rigi et au Pilatus lointains. La descente est très glissante : la neige a fondu mais le sous-sol est encore gelé. Le résultat est une mince couche d'herbe et de terre posée sur un fond qui n'offre aucune prise pour mes chaussures déjà lourdes de boue. Je ne sais pas trop comment, mais j'arrive à ne pas m'étaler, malgré une ou deux glissades d'anthologie. Juste avant d'arriver à Unterägeri, je passe devant une grande villa surmontée de tourelles qui, dans un passé pas trop lointain, a dû être splendide. Les beaux jours sont malheureusement révolus et la villa présente un aspect de maison hantée sinistre avec des fenêtres soit cassées, soit barricadées et des murs couverts de graffitis.
Unterägeri est plus grand que sa petite sueur Ober du même nom, et il me faut une bonne demi-heure pour traverser le village de part en part. Le carnaval vient manifestement de se terminer : les trottoirs sont recouverts de confettis et des drapeaux colorés flottent au-dessus des rues. A la sortie sud du village, un panneau m'explique que l'enclos voisin contient plusieurs espèces de moutons rares… tellement rares qu'ils sont complètement invisibles. Ca sent pourtant le mouton et j'entends des clochettes quelque part à l'intérieur, ils y sont donc peut-être.
Je suis une petite route, tout d'abord vers le sud-ouest, puis vers le nord-ouest, entre fermes et collines basses. Il y a pas mal de promeneurs sur cette partie de l'itinéraire : une petite fille sur un poney Shetland accompagnée de sa mère qui court à côté ; un couple qui promène deux gros bergers allemands qui n'en finissent pas de se sauter dessus en aboyant et en remuant la queue. Un panneau m'informe que je suis sur le parcours "Nordic Walking Ägerital", mais je ne vois personne qui pratique cette activité à la mode. Quoique… une dame blonde qui promène son chien pourrait bien être suédoise… et donc marcheuse nordique. Un petit téléski attend tristement qu'un peu de neige vienne sauver sa saison. La buvette à côté de son départ est restée ouverte, optimiste, en espérant que quelques-uns des promeneurs du samedi après-midi remplaceront les skieurs manquants et renfloueront un peu la caisse.
Je contourne un joli vallon marécageux (Zigermoos, 777 m) par un enchaînement de petites routes, de pistes caillouteuses et de sentiers boueux. Une passerelle en bois permet de franchir un endroit particulièrement humide, mais elle est recouverte d'une mince couche de glace et exige un peu de précaution pour éviter un bain de boue. Je traverse une zone boisée, entrecoupée de clairières encore tout enneigées : le soleil n'a pas encore fait fondre toute la neige ici. Je sors de la forêt à Unter Brunegg, 770 m, où une maison toute neuve a été construite tout en respectant le style des fermes zougoises, avec boiseries et fenêtres en pignon. J'entends le bruit d'un moteur électrique derrière moi et suis surpris de me faire doubler par une jeune femme debout sur un engin bizarre, avec deux grosses roues côte à côte, entre trottinette et tondeuse (on m'a appris par la suite que cela s'appelle un gyropode en bon français). A un endroit où un panneau indique que la route est privée et interdite à tout véhicule à moteur, une grosse Range Rover noire me dépasse. Le conducteur s'arrête, regarde longuement le panneau… puis continue, l'air de dire "Moi j'ai une grosse Range noire, je fais ce que je veux."
Une montée courte mais assez raide sur une piste boueuse m'amène au deuxième "point culminant" de la randonnée, vers 850 mètres. La vue s'ouvre à présent vers le nord, avec la chaîne de l'Albis qui s'étend vers l'Uetliberg distant et vers la métropole zurichoise. Plus près, le bruit de tambours remonte depuis le village d'Allenwinden, où le carnaval bat son plein. Je continue vers les hameaux de Bilgerighof et de Muserhof, en descente régulière maintenant. Et voilà, au détour du chemin, le Zugersee bleu qui apparaît loin en dessous, avec l'agglomération de Zug et de Baar au premier plan. Je suis content de voir que le brouillard s'est presque entièrement dissipé et envoie une photo à mon amie, pour lui prouver que Zug sort occasionnellement de sa grisaille. Mais le plus surprenant est le bruit de la ville. Il y a trente secondes, je marchais dans une nature silencieuse ; maintenant, tout d'un coup, l'air se remplit d'un fond sonore urbain. La ville est pourtant encore assez loin ; sans vraiment en être conscients, nous générons quand même un sacré paquet de bruit dans notre vie quotidienne urbaine !
Une dernière descente glissante et boueuse fait place à un sentier gravillonné qui descend en lacets jusqu'à la chapelle Ste. Verena, à la limite supérieure de la zone construite. D'ici, il me suffit d'une demi-heure pour attendre le bord du lac, en passant par un cimetière très bien rangé et la vieille ville de Zug.
Je ne suis pas un fan de Zug, je dois l'avouer, même si j'y ai habité. L'ambiance du lieu est trop riche pour moi ; la vieille ville est jolie mais toujours déserte et manque d'animation ; et certaines des constructions modernes semblent avoir été érigées dans le seul but de faire plus haut et plus laid que le voisin. L'agglomération Zug-Baar est un bel exemple de ce qu'il ne faudrait pas faire en matière d'urbanisme. Heureusement, Zug a un gros atout : son bord du lac est magnifique. Je descends jusqu'à la rive et regarde vers l'ouest, où la flèche effilée de l'église de Cham se reflète dans l'eau calme. Il me faudra encore une heure de marche facile sur le sentier du rivage pour y arriver.
Il y a beaucoup de monde au bord du lac et on y entend toutes les langues du monde (ou de l'Europe en tout cas). Curieusement, ce qu'on entend peut-être le moins est le suisse-allemand : Zug a une réputation de petit paradis pour expatriés fortunés et, à entendre les promeneurs du bord du lac, on comprend pourquoi. Mes grosses chaussures et mon pantalon boueux attirent quelques regards désapprobateurs ; alors je me concentre sur la vue vers le sud, où le Rigi et le Pilatus se dressent devant un ciel dont les tons sont d'un bleu-gris très doux.
J'atteins Cham à cinq heures et quart et, une demi-heure plus tard, suis de retour à Lucerne. A la gare, la foule de Fasnächtler un peu éméchés en déguisement de carnaval se mélange aux hordes de skieurs et de snowboarders, de retour d'une journée en montagne. C'est chaotique et joyeux, tout ce que Zug n'est pas : c'est peut-être pour cela que j'ai déménagé. La prochaine étape du Chemin panorama alpin m'amènera jusqu'à chez moi, avant de repartir vers l'ouest du pays.
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stephen

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