Traversée des Drus


Publiziert von Bertrand , 19. Juli 2023 um 14:28.

Region: Welt » Frankreich » Haute-Savoie » Massif du Mont Blanc
Tour Datum:14 Juli 2023
Wandern Schwierigkeit: T4 - Alpinwandern
Hochtouren Schwierigkeit: S
Klettern Schwierigkeit: 5c (Französische Skala)
Wegpunkte:
Geo-Tags: F 
Zeitbedarf: 3 Tage
Aufstieg: 2300 m
Abstieg: 2300 m
Strecke:Jeudi 13/7 : montée à la Charpoua depuis le Montenvers. Vendredi 14/7 : traversée classique des Drus et retour Charpoua. Samedi 15/7 : retour au Montenvers

Bien visible de la vallée de Chamonix, l'Aiguille du Dru (3754m) est l'un des sommets les plus impressionnants et les plus emblématiques du Massif du Mont Blanc - c'est là qu'ont été écrites parmi les plus belles pages de l'alpinisme comme la mythique ascension du pilier SW en 6 jours par Walter Bonatti en 1955. Mais rien que la classique traversée Petit Dru - Grand Dru (pourtant ouverte en 1903...) est déjà une entreprise sérieuse ou un horaire de 14 heures refuge-refuge est considéré comme un bon temps...on y trouve tous les composants de l'alpinisme classique, une longue montée en refuge, un glacier petit mais déchiqueté pouvant offrir de sérieuses difficultés, un itinéraire complexe louvoyant dans une immense face, une escalade souvent teigneuse et athlétique qui pourtant ne dépasse pas le V+ sur le papier, très peu d'équipement en place en dehors des longueurs clé...

Les Drus — Wikipédia

Itinéraire détaillé et croquis sur camptocamp

C'était pour moi le tout dernier rêve de "grand" sommet alors qu'avec les années je suis devenu - avec bonheur - de plus en plus (cyclo)randonneur et de moins en moins alpiniste. Comme pour beaucoup avant et après moi, un curieux mélange d'envie et d'appréhension me faisait repousser le projet d'année en année - avec peut-être l'espoir inavoué de devenir à force suffisamment âgé pour avoir l'excuse honorable de ne plus pouvoir y aller...Mais cette année plus moyen de reculer : nos 5 jours annuels avec Mathias encadrent un bon créneau météo, les conditions semblent favorables, lui me pense encore capable d'aller au Dru (imaginant sans doute sans oser me le dire "après ce sera trop tard"...), Agnès accepte de ne grimper avec nous que les 2 derniers jours...En plus les soucis de santé de mes vieux parents me font pas mal broyer du noir ces temps-ci, ça me changera les idées.

Bref c'est parti pour le mythique refuge de Charpoua - sous une pluie battante sitôt quitté le bas du télécabine. Bah ça nettoiera la poussière et les graviers posés sur les vires. 4h plus tard le moral est revenu, plaisir de retrouver David Pujol croisé 2 ans plus tôt à la Cassin du Badile...ainsi que la célèbre journaliste de montagne Maya Chollet avec qui j'avais faire brièvement connaissance quelques mois plus tôt à la Brèche Puiseux avec Mathias et ma fille Cécile. Il suffit d'écouter son excellent podcast Faces Nord pour relativer la difficulté de se lancer dans les Drus derrière la corde d'un bon guide par rapport à l'audace des anciens...

L'ascension - qui se déroule d'abord de nuit puis à l'ombre - est un vrai livre ouvert d'alpinisme pionnier avec ses bouts de ficelous moisis indiquant au mieux des erreurs, ses terrasses de bivouac avec quelques restes de conserves rouillées, ses fissures courtes mais teigneuses en V ou pratiquer le 6b en couenne dalleuse ne sert pas à grand chose, ce glacier petit mais déchiqueté qui empêche souvent tout passage dès le milieu de l'été ou même avant, cette Madone criblée d'impacts de foudre la tête tournée vers Chamonix qui semble si loin (et il l'est !)...mais je crois que je plagie un peu les CR de sorties précédentes, on ressent visiblement tous un peu la même chose ici.

Passablement fracassé nerveusement et physiquement il me faudra 2 ou 3 jours pour me remettre. Je me rassurais en me disant que j'étais de loin le doyen des assaillants du Dru ce jour là...mais même pas, il y avait Fred le sympathique alsacien (comme moi) du même millésime, qui lui a fait toute la course en tête avec Maya ! Chapeau bas. Mathias a rajouté qu'il avait récemment emmené un client de 65 ans à la Verte. J'ai donc quelques années devant moi. Et pourtant pas bien sûr d'avoir envie de remettre ça. Il y a sans doute un temps pour tout qui est propre à chacun.

Epilogue : on avait dans l'idée de finir le séjour avec Agnès et Matthias au Peigne (Minettes & co). Donc résa le samedi soir au Plan de l'Aiguille...sauf que la benne ne tourne pas à cause du vent. J'appelle le refuge pour prévenir qu'on ne pourra pas monter (OK, à pied avec 1200m de montée et des jambes encore bien cassées, mais non) - ils m'envoient gentiment paitre en m'expliquant que le téléphérique n'est pas leur problème et qu'ils garderont la totalité des arrhes sur les 2 jours pour nous 3. Bien sûr impossible de se loger à des lieux à la ronde en ce samedi soir veille de l'arrivée du Tour à St Gervais...miracle une dispo apparait sur booking.com au Fayet - je bloque immédiatement la réservation pour Agnès et moi. On arrive à la réception 30mn plus tard en se réjouissant enfin de poser le gros sac, de se débarbouiller alors qu'il fait 35° et qu'on est tous deux gluants de sueur, et de se vautrer enfin dans un bon lit sous la clim. Sauf que booking s'est planté et que c'est plein...


Au bord des larmes je laisse Agnès reprendre la main pour dénicher une chambre dans une jolie résidence venant d'ouvrir le jour même aux Contamines et donc encore absente des réseaux. A recommander +++ : le Nant Rouge, Carole et son mari sont adorables, ça faisait vraiment chaud au coeur de retrouver des gens comme eux après s'être fait rembarrer par les gros [censuré] du Plan de l'Aiguille. On est du coup restés dans le coin pour grimper autour de la Cicle, du beau rocher au soleil entouré d'alpages bucoliques sans l'once d'une appréhension. Je crois qu'on va en rester là pour la suite.

Conditions du jour et commentaire techniques :
 

  • Jeudi (montée Charpoua) : la Mer de Glace était tellement lustrée par les pluies de la veille et du jour que tout le monde a mis les crampons...

 

  • Vendredi : le glacier se traverse pour l'instant par le bas, c'est en neige avec des ponts encore solides, moins d'1h jusqu'à l'attaque qui se faisait par la vire inférieure (évite un rappel). Le hic c'est qu'on passe juste sous de petits mais vilains séracs, on n'a vu ça qu'au retour - curieux comme on a instantanément retrouvé de l'énergie pour passer presque en courant alors qu'on était tous deux bien fracassés ! On traverse ensuite sans trop de mal en évitant les névés résiduels, après c'est quand même pas simple de zigzaguer de nuit dans le large couloir inférieur, Mathias s'en est bien tiré - c'est facile de dire d'aller au plus facile, moins évident sur place...On a un peu hésité pour trouver le bon passage vers la brèche carrée, ensuite quelques cordes fixes plus ou moins moisies (on a pris le jour là) aident à se diriger vers le petit bout d'arête effilée menant au névé triangulaire, bien présent. Bien aller chercher la fissure cheminée la plus à droite, les 2 cordées qui nous suivaient ont pris celle de gauche...on ne les a plus jamais revus, ils ont du faire 1/2 tour ou bivouaquer...
  •  
  • On a eu bien plus de mal à trouver le bon système de dièdres menant aux terrasses supérieures : les cordées devant nous ont emprunté un vague éperon tout à droite mais ça parpinait pas mal, à gauche ça semblait compliqué, on est passés tant bien que mal au milieu. Mathias s'est demandé si le passage ne s'est pas un peu éboulé, avec pas mal de roches blanches de fracturation récente...Le cheminement pour sortir en haut du Petit Dru est ensuite un peu plus simple, on trouve enfin quelques pitons dans les passages de V/V+ (chamoniard...rien à voir avec du 5c falaise...) - jusque là il n'y a quasiment rien en dehors de cordelettes de retraites éparpillées de ci de là. Vraiment étonnant pour une classique comme ça. La neige est encore présente à quelques endroits (par exemple au sommet) mais avec une bonne trace ça passe facilement sans crampons (et même en chaussons qu'on a tous les deux mis au pied des longueurs dures du haut du Petit Dru).
  •  
  • Sitôt embrassée la Madone, descente facile dans la brèche, 20mn d'attente au pied du Z qui est en très bonnes conditions, tout sec - heureusement car même comme ça on a trouvé la cheminée de sortie bien teigneuse, j'avoue honteusement m'être tracté sans vergogne sur la corde à noeuds - l'entrainement sur poutre sert parfois à quelque chose...Bon à ma décharge je m'étais bien froissé/déchiré un abdo un peu plus bas dans l'un des innombrables passages bourrinants dont le Dru regorge et dont mes genoux couverts d'ecchymoses se souviennent encore !
  •  
  • Restait la descente, que j'imaginais bien plus simple avec les nouvelles lignes de rappel...comme tout le monde ce jour là, on a opté pour la descente de droite (en regardant le Dru de la Charpoua), 12 rappels au lieu de 17, au vu des bonnes conditions sur le glacier. Qui est quand même pas mal raide, on n'était pas fâchés d'avoir pris les gros crampons plutôt que les Irvis Hybrid ! Mais entre-temps on avait réussi à coincer successivement (!) le 2ème et le 3ème rappel en rappelant la corde. Le 2ème aurait été impossible à remonter...heureusement que la cordée du guide hispano-chamoniard David Pujol nous suivait sinon ça sentait l'hélico. Au bout de 7 rappels, là ou les 2 lignes sont supposées diverger, impossible de trouver le suivant qui était sans doute sous la neige...il y a par chance un relais improvisé sur cordelettes. De façon générale, les rappels 8-9-10 sont assez merdiques, le terrain chaotique et couché ne permet guère de faire mieux, pas mal de diagonales et de pierres posées sur les vires, pas facile de trouver les ancrages. L'avant dernier fait ensuite 50m en fil d'araignée, grosse ambiance...le dernier dépose plus bas sur le glacier.
  •  
  • On croyait que c'était terminé mais non, 2 grosses canonades de pierres (une à droite venue du coté du Col des Drus, l'autre à gauche des rappels supérieurs) sont venues nous rappeler qu'il était 15h, qu'il faisait chaud, et que le Dru continuait à se décomposer à petit feu année après année. J'ai vu un petit frigo (bon, allez disons un freezer) voler par dessus le surplomb de l'avant-dernier rappel et atterrir pas bien loin...Mathias a du coup préféré ne pas suivre la bonne trace de nos prédécesseurs dans une sorte de rigole de neige, facile mais canalisant les cailloux, pour tailler plus à gauche vers l'attaque - peut-être plus safe mais aussi plus raide et sans trace, je n'en menais pas très large dans cette neige pourrie à 40° juste au dessus du Z de la rimaye. Enfin bref sitôt rejointe la trace de montée il ne restait plus qu'à trottiner sous les séracs pour sortir enfin en haut du rognon, passablement atomisé physiquement et nerveusement en ce qui me concerne.


7 cordées ce jour là dans la traversée, et 2 dans la Contamine. Garder aussi en tête qu'on grimpe quasiment tout le temps à l'ombre (on a pris le soleil au sommet du Petit Dru pour le reperdre aussitôt dans le Z...)

Météo : jeudi averses jusque vers midi (bien mouillés) puis se dégageant. Vendredi grand beau, 0° à 4200m, bon regel, vent d'W faible sauf au sommet (30 kmh). Samedi idem mais avec grand vent en altitude.

Accès : pas de TC pour une fois vu le doute sur les horaires et la suite du programme. Le parking des Planards à coté de la gare de départ du Montenvers est désormais payant (18 € par jour)...

Hébergement : formidable accueil de Sarah et Noé dans ce micro refuge récemment refait mais ayant gardé toute sa patine (14 places, un dortoir + une salle commune avec cuisine, toilette en plein air accessible par une mini via-ferrata...). Ils y élevent leurs 2 enfants de 4 ans et 20 mois, adorables, qui se chargent de mettre de l'ambiance par leurs vocalises et leurs jeux auquels les visiteurs sont invités à participer. De quoi oublier un temps l'austérité du lieu et les appréhensions du lendemain...On n'avait en principe pas de place pour vendredi soir - mais devant mon état de fatigue rendant hasardeuse une descente en vallée le même jour Sarah nous a gentiment permis de dormir sous tente. Merci !

Horaire : jeudi montée à la Charpoua en 4h + pauses (10h30-15h). Vendredi départ 2h40, Petit Dru 9h40, Grand Dru 11h40 (20mn d'attente), début des rappels 12h, retour Charpoua 16h10. Samedi retour au bas du télécabine en 3h10 (8h - 11h10).

J'avais l'impression que c'était pas bien rapide à cause de tout le temps perdu au pied du Z puis dans les rappels coincés, mais les statistiques de Sarah la gardienne sont venues me consoler : selon elle 25% des cordées tiennent l'horaire du topo (13-14h), 30% arrivent à 19h pour le diner, 30% à la tombée de la nuit...et les 15% restant bivouaquent ou font 1/2 tour (ou pire si affinités).

Participants : Mathias Dunand (guide) et moi


Tourengänger: Bertrand


Minimap
0Km
Klicke um zu zeichnen. Klicke auf den letzten Punkt um das Zeichnen zu beenden

Galerie


In einem neuen Fenster öffnen · Im gleichen Fenster öffnen


Kommentare (6)


Kommentar hinzufügen

Nyn hat gesagt:
Gesendet am 19. Juli 2023 um 16:18
Chapeau!

ChristianR hat gesagt:
Gesendet am 19. Juli 2023 um 19:01
Hé ben...

Bertrand hat gesagt: RE:
Gesendet am 20. Juli 2023 um 09:17
>Hé ben...

C'est un bon résumé de ce que je pensais avant d'y aller...Au vu de mon état de fatigue durable les jours suivants, ce sera clairement mon chant du cygne dans ce domaine - merci à tous pour la gentillesse de vos commentaires !

Baldy und Conny hat gesagt:
Gesendet am 19. Juli 2023 um 21:57
Impressionant....Felicitation!

amphibol hat gesagt:
Gesendet am 20. Juli 2023 um 11:19
Felicitation! :-)

Tony. hat gesagt:
Gesendet am 22. Juli 2023 um 15:46
Grandiose ! Belle réalisation, bravo !!!


Kommentar hinzufügen»