Escalade au dessus du glacier de Leschaux : voie Comte-Engelmann

Découverte pour nous des grandes voies d'escalade au dessus du Refuge de Leschaux, juste en face de la fameuse paroi nord des Grandes Jorasses...pour les amateurs exigeants de granit chamoniard rétifs à s'encombrer de crampons/piolets pour à affronter des glaciers en décomposition...Nous sommes montées vendredi au (nouveau) Refuge du Couvercle avant de gravir le lendemain la voie "Nigger Attitude" puis de descendre au refuge de Leschaux pour y passer la nuit. Nous avons achevé ce petit séjour le dimanche par la voie Comte à l'Aiguille Pierre-Joseph avant de regagner la gare du Montenvers.

Topo détaillé de cette voie Comte ici

Dernière journée de notre mini-séjour découverte de la grimpe à Leschaux au lendemain de la voie Nigger attitude. Agnès a droit à une grasse matinée avant de s'offrir une longue séance de yoga face à la Walker, pour Matthias et moi c'est un petit-déjeuner en terrasse et à la frontale (heureusement que c'était la canicule !)...on ne verra le soleil qu'au sommet sur ce versant W, donc pas de photo digne de ce nom. Moi qui ai les mains gelées 9 mois sur 12, je n'en revenais pas de pouvoir grimper sans souffrir à 2600m d'altitude, à 7h du matin et à l'ombre...mais je ne crois pas qu'il faille s'en réjouir.

Pour le reste j'ose redire ce que j'écrivais la veille : certes le cadre est comme toujours grandiose malgré une montagne en décomposition de tous les cotés, le rocher franc et solide, les lignes de fissures très pures...mais (au risque de me faire lapider - ce sera facile, y'a des cailloux partout) je ne suis toujours pas plus fan que ça de ce style de granit chamoniard lisse et fuyant. OK on dira que cela impose une exigence gestuelle accrue, moi je vois surtout que le granit du Badile, de Suisse Centrale ou même du versant suisse du massif du MB est tellement plus sculpté, tellement plus riche en prises, tellement plus accueillant pour des éternels débutants comme nous. Et je ne parle même pas de la fabuleuse quartzite d'Ubaye ou des murs dolomitiques criblés de poignées de valises...Pardon de ce point de vue iconoclaste, et pas la tête s'il vous plait !

Conditions du moment : tout est évidemment sec de chez sec. L'attaque se rejoint assez aisément en une grosse heure depuis Leschaux. La voie zigzague pas mal sans pour autant imposer de traversées anxiogènes, on y trouve régulièrement quelques pitons dans les passages difficiles, qui permettent au moins de s'orienter. J'ai pas été enthousiasmé par la 1ère partie, que du rocher fuyant à la mode de Cham, la section du haut est plus sympa, plus raide mais avec du rocher plus sculpté. Le passage clé en V+ est court mais bien teigneux, je me suis laissé allé à tirer la dégaine histoire d'en finir avec cette voie sympa mais quand même pas mémorable.

L'arête se couche au bout de 7-8 lg et la fin se parcourt aisément à corde tendue. Le rappel de 25m dépose sur une grande dalle ou il faut encore assurer (en diagonale à droite) jusqu'à une vire d'ou la descente est plus facile : avec 50m, on peut atteindre directement la vire et gagner du temps. On traverse ensuite un pierrier chiant mais court pour rejoindre une crête morainique de parcours aisé qui ramène sur l'ancien sentier balcon (le suivre à gauche, inutile de descendre un étage plus bas retrouver le nouveau sentier). Comme la veille dans Nigger nous étions évidemment seuls dans la voie.

Pour ce qui est de la montagne autour c'est sinistré +++, Droites et Verte sont quasiment sans neige jusqu'en haut, l'Aiguille du Tacul ne cesse de se désintégrer jouer et nuit ou presque, la Mer de glace est en voie de liquéfaction, couverte de bédières et de moraines croulantes, la Vallée Blanche est déchiquetée, etc...Si on arrive du Couvercle, la traversée du glacier de Leschaux oblige à contourner un lac par du terrain décomposé et de nouvelles cordes fixes...la plupart des gens sur la traversée Couvercle-Leschaux se font désormais accompagner par des guides, bref ça n'a plus rien d'une rando familiale à mon sens. Y'a que les cristalliers qui se réjouissent, d'ailleurs on en a recontré deux super sympa (JP et Patrick) de Grenoble qui nous racontaient toutes leurs trouvailles récentes les yeux brillants...

Météo : grand beau caniculaire, 35° en plaine, iso 0° à 4600m

Accès : le retour au Montenvers depuis Leschaux se mérite, on a mis 3h30 (bon OK on traine de plus en plus mais quand même...) en traversant sans doute la grande bédière centrale un peu trop haut ce qui inflige pas mal de pierrier supplémentaire. Les échelles sous Leschaux sont prolongées chaque année, quant aux échelles usuelles pour remonter au Montenvers elles sont condamnées par les travaux du futur télécabine : il faut désormais descendre la Mer de Glace jusqu'au pied du télécabine actuel, donc bien plus loin vers l'aval...on touche d'ailleurs le socle rocheux, le glacier n'ira pas plus bas ! Il faut ensuite remonter 120m de D+ pour reprendre le télécabine...qui ferme à 17h...

Hébergement : Agnès et moi découvrions le refuge de Leschaux, petit et rustique à souhait avec son repas obligatoire en terrasse (faute de place dedans !), ses toilettes à 50m...enfin un vrai refuge ou on est pas près de voir des douches ! Le gardien Hugo, un vrai baba chamoniard, est une perle, marrant et sympa, et en plus il cuisine parfaitement...on y était 15 sur les 20 places ce samedi soir, dont la moitié d'aspirants à la Walker.

Horaire : départ Leschaux 5h30, attaque 6h45, sommet 9h35, retour Leschaux 11h20/12h30, Montenvers 16:00

Participants : Matthias D (guide) et moi