Par champs et bosquets fribourgeois pour finir l'année

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C'est devenu une tradition depuis quelques années : nous terminons l'année avec une randonnée qui ne correspond pas vraiment à l'idée que l'on pourrait se faire de la Suisse en décembre. Chaque année nous revenons des vacances de Noël en pensant faire de la raquette dans une poudreuse parfaite… mais chaque année, la réalité du climat du 21^èmesiècle condamne les raquettes à rester à la cave. 

La fin de l'année 2018 est tout de même un peu moins printanière que celles de 2015, 2016 et 2017. Il n'y a pas de neige, mais Météosuisse annonce de la pluie sur la Suisse centrale et un temps plutôt nuageux ailleurs. L'idée d'aller marcher ne m'enthousiasme pas vraiment, mais je me laisse convaincre et nous prenons le train pour Fribourg à dix heures : plus nous allons vers l'ouest, plus nous aurons de chance de voir un peu de soleil. 
Depuis Fribourg, quelques minutes en bus suffisent pour arriver au gros village de Tafers. A l'arrêt de bus, un grand groupe d'adolescents vient d'arriver d'un camp de vacances, encombrés de skis et de valises qu'ils transmettent aussitôt aux parents venus les accueillir à la descente du car.  Nous quittons le village le long d'une rue résidentielle qui remonte vers le sud. Un facteur nous suit, distribuant le dernier courrier de l'année sur une mobylette électrique parfaitement silencieuse. Nous l'avions presque oublié : aujourd'hui est un rare jour ouvrable, pris en sandwich entre une interminable série de dimanches et de jours fériés. 

Au-delà des dernières maisons, un sentier part sur la gauche, remontant vers une crête herbeuse surmontée d'une forêt, dont il suit la lisière vers l'est. Une belle vue s'ouvre en direction du sud, vers les  Préalpes fribourgeoises à moitié perdues dans la brume, au-delà d'un premier plan fait de champs et d'arbres isolés dénudés de leurs feuilles. Le soleil est bien présent, il fait agréablement doux et des bancs incitent à faire une pause face au panorama… mais même s'il est midi, nous marchons depuis à peine une demi-heure, il est encore trop tôt pour s'arrêter. Le sentier remonte tout en douceur vers l'altitude de 782 mètres, puis continue plus ou moins à plat parfois à la lisière de la forêt, parfois juste à son intérieur.

Au bout d'un kilomètre, le sentier raide et recouvert de feuilles mortes plonge subitement vers le fond d'une petite vallée (647 m). Sur le versant opposé, l'église et le village de St. Antoni nous narguent : tout ce qu'on vient des descendre, il faudra maintenant remonter. Nous suivons une route étroite, croisant deux femmes avec des chiens : ce sont les seules autres personnes que nous voyons sur les sentiers aujourd'hui. 

Nous traversons St. Antoni (725 m) et poursuivons vers l'est, sous un ciel qui est devenu gris : apparemment la meilleure partie de la journée est déjà finie. Un petit vent d'est frisquet se lève, histoire de nous rappeler que nous sommes quand même en décembre. Heureusement, nous trouvons un banc à la lisière d'un bois, complètement à l'abri du vent, ce qui nous permet de ne pas avoir froid en mangeant nos sandwiches (achetés vite fait à la Migros de la gare de Lucerne) et notre soupe aux haricots verts et pommes de terre (celle-ci faite maison, quand même). Après une pause d'une petite demi-heure, un sentier caillouteux nous fait passer le long de champs et de bosquets jusqu'au village de Heitenried (762 m).  La vue vers le sud a disparu depuis un moment mais juste avant Heitenried, il y a une jolie vue vers le nord, à travers un petit vallon vers le Jura lointain, ses crêtes les plus élevées tout juste saupoudrées de neige.

Des rues résidentielles nous font traverser Heitenried, puis un sentier herbeux part vers le sud et amorce la deuxième descente raide de la journée, vers la vallée de la Singine. Dans sa partie la plus raide, le sentier est pavé et, à cette saison, les pavés sont humides et très glissants. Nous franchissons la Singine sur un pont couvert (Sodbachbrugg, 660 m) et, en ce faisant, quittons le canton de Fribourg pour celui de Berne. Côté bernois, nous suivons la rivière en aval sur quelques centaines de mètres, avant d'entamer la dernière montée de la journée (qui est également la plus longue et raide). Un sentier pavé remonte un ravin latéral, sous de hautes parois rocheuses parfois en surplomb. A la sortie du ravin, une petite route de campagne continue à remonter vers le plateau, bordée de belles maisons anciennes. Le temps s'est amélioré à nouveau et, alors que le soleil descend vers l'horizon, une belle vue apparaît devant nous : au-delà d'un champ très vert, une petite église trône sur une butte, sous un ciel tout en tons de bleu, de mauve et de gris. 

Nous avons 20 minutes d'attente à Schwarzenburg (792 m) avant le départ du prochain train, temps que nous mettons à profit pour flâner dans les rues de la petite ville jusqu'à son château. Les rues sont bordées de nombreuses belles maisons en bois et la ville paraît plutôt dynamique avec restaurants, magasins et deux trains par heure jusqu'à la capitale. Perdus dans l'admiration de cette solide architecture de campagne, nous oublions l'heure et devons presque courir pour ne pas louper le train de to 16:18. A six heures nous sommes de retour à Lucerne, prêts à terminer l'année avec champagne et pizza faite maison… encore une petite tradition qui s'est installée depuis quelques années, juste comme notre randonnée "printanière" de la St-Sylvestre !