Piz Palü : Jacuzzi et bain de foule

Petit crochet en Engadine sur le retour de 5 jours dans les Dolomites (relativement ensoleillées, incroyablement enneigées, et surtout toujours aussi impressionnantes...) où la météo nous avait poussé à émigrer pour nos vacances. Le réchauffement subit du WE incitait à monter le plus haut possible, évidemment on n'était pas les seuls à avoir cette idée lumineuse et le refuge (enfin façon de parler...) de Diavolezza était aux 3/4 plein en ce samedi soir. Mais enfin après avoir déminé en solitaire et au GPS la région de Zapport une semaine plus tôt avant d'enchainer les classiques sud-tyroliennes dans une remarquable tranquillité, cela ne nous génait pas trop de débrancher le cerveau pour suivre une trace bien marquée !

98% des visiteurs ambitionnaient bien sûr de monter au Palü le lendemain, mais il en restait quand même 2% montés juste pour l'une des attractions-phare de la Diavolezza, le jacuzzi extérieur à 3000m d'altitude face au groupe Palü-Bernina (cf image). En guest-stars ce soir là, un couple de jeune mariés chinois, marchant sur la neige en pantoufles et vétus d'un simple peignoir (il y a quand même une dizaine de mètres à parcourir entre la terrasse et le chaudron bouillonnant). Ils n'ont pas eu l'air de trop souffrir des crépitements de flash en provenance de tous ces montagnards en doudoune les observant d'un oeil étonné avant de rebraquer leur regard d'airin vers l'objectif du lendemain...

Nous avions renoncé, la veille du sommet, à remonter les pistes à podfok du parking jusqu'à l'arrivée du téléphérique pour cocher une ascension "by fair means", mais avec des circonstances atténuantes : 1300m le samedi matin pour gravir la (somptueuse) Forcella di Mezzodi dans les Dolomites des Odle (la patrie de Messner, pour les incultes, reportage à venir), puis 3h30 de route via Bolzano et l'Ofenpass pour rejoindre la Bernina juste avant la dernière montée de 17h00. Montée qui ne nous a d'ailleurs pas coûté bien cher puisqu'une skieuse de piste qui rentrait chez elle nous a proposé de racheter son forfait du jour...au seul prix des 10 CHF de dépôt de la carte magnétique (remboursables). Le hic c'est qu'on a fait cette manip (hautement illégale, évidemment, les forfaits ne sont pas transmissibles) devant le guichet. S'en en suivi une réprimande sévère du personnel de service où il était quasiment question d'infraction grave passible de poursuites (et pire si affinités). Bref la Police Cantonale Grisonne a été à 2 doigts de venir nous coffrer. On a joué les benêts désolés et ils ont fini par nous laisser monter...on n'a quand même pas eu le culot de demander le remboursement des 10 CHF de dépôt le lendemain de retour du sommet. On fera ça discrêtement l'an prochain...

Pas grand chose à rajouter sur l'ascension, 4h du refuge au sommet principal auquel on a failli renoncer vu le vent et les nuages qui coiffaient le revêche Palü jusqu'à 10h du matin. Descente facile en neige agréable sur 2000m de dénivelé, poudreux puis damé sur la piste balisée du bas. Qu'on supporte ou pas la foule, il faut quand même reconnaitre que le cadre Palü - Bernina fait partie des plus beaux cirques glaciaires de l'arc alpin tout entier...qui revêt pour moi une signification toute particulière puisque ce fut mon 1er raide de ski-alpinisme en 1989 (sigh), nous avions traversé le Palü depuis le refuge Boval en montant par l'arête de la Fortezza pour rentrer à Boval par le glacier de Morteratsch dans une solitude absolue...inconscient des risques et de la difficulté, ignorant ce qu'était une corniche, une crevasse ou une plaque à vent, je suivais aveuglément le guide sans me poser la moindre question..le jour suivant nous gravissions encore le Piz Bernina depuis Boval par le sinistre passage du Buuch en plein brouillard. Those were happy times, l'insouciance des jeunes années...j'ai bien changé aujourd'hui !

Retour au bercail le soir même avec un petit crochet à l'aéroport de Zürich pour récupérer nos 2 moustiques de retour de 10 jours en pension chez leurs grand-parents parisiens. Et un moral un peu en Berne de voir le printemps s'installer juste au moment ou il faut retourner au bureau...

Conditions : neige vitrée le matin sur les 240m de descente entre Diavolezza et le plat du glacier, assez désagréable dans la pénombre car c'est raide et parsemé de petits rochers (alternative : rester sur la piste à D, on aboutit sur le glacier 10 minutes plus bas). Ensuite neige encore quasiment hivernale tout du long, tb trace jusqu'au dépôt des skis à 3730m, même pas eu besoin de couteaux. On s'est encordés pour faire comme tout le monde à la montée, mais rétrospectivement ce n'était pas vraiment nécessaire, le glacier est bien bouché. A signaler quand même qu'une belle chute de sérac (cf image) à balayé toute la pente du parcours la veille à 11h, miraculeusement sans dégâts alors que c'était l'heure de pointe.

La balafre est visible de la vallée et refroidit un peu les ardeurs, mais n'a pas empêché au moins 100 personnes de gravir le sommet le dimanche (ceux du refuge + une autre caravane montée avec la benne de 8h du matin). L'arête à pied est bien tracée, raide mais sans souci jusqu'au sommet Est, plus effilée ensuite (cf image), faux-pas proscrit (les marches sont bonnes, cela dit). Nivo : risque 2 annoncé, pas de signe suspect.. On descend encore aisément sur la piste (ouverte) jusqu'à la gare de Morteratsch (1893m, bistrôt et train horaire pour revenir au parking de Bernina Diavolezza). Tout est évidemment trafolé à mort mais la descente est en excellente poudreuse tout du long, restée étonnamment légère (pentes N > 3000m).

Météo : couvert le matin avec sommet accrochés > 3700m, se dégageant petit à petit, beau dès 10h. Vent froid en rafales du SW en haut, chaud en bas mais pas encore la canicule annoncée.

Participants : Agnès et moi, et les 120 (150 ?) autres...

Itinéraire détaillé : bien visible du refuge, suivre les traces...pas besoin de carte par beau temps !