Capanna Sasc Füra - sentiero storico

L'accès officiel à cette belle cabane est devenu bien plus long et bien plus pénible depuis le gigantesque éboulement ayant dévasté le Val Bondasca et le village de Bondo en 2017 : il faut désormais partir de Bondo à pied et emprunter un sentier alpin malcommode et exposé sous le Pizzo Trubinasca avant de redescendre de près de 300m sur le refuge (5h30 de marche, 1h30 de moins en se faisant déposer en taxi à Cugian, 1370m, par une piste interdite à la circulation).

Mon guide Matthias et moi souhaitions préserver nos forces avant d'attaquer la face NE du Badile par la voie Cassin le lendemain, nous avons donc préféré prendre le risque d'emprunter le sentier historique par le Val Bondasca. Inutile de dire donc que tout ce que je raconte ici n'engage que moi et que je n'encourage personne à en faire de même - à chacun de prendre ses responsabilités, le Cengalo doit encore vomir 4 mio de mètres cubes un jour ou l'autre selon les experts. Il est évident que la probabilité de se faire prendre est infime, il est tout aussi évident que si cela arrive il ne faudra pas compter sur votre assurance vie pour verser un centime à la veuve (/ au voeuf) et aux orphelins !

Départ donc de Bondo (parking en haut du village), on traverse le torrent par une nouvelle passerelle au Pt 822m avant de remonter le sentier balisé rive D puis la route entretenue jusqu'au hameau de Prä (1102m, accessible par une piste carrossable réservée aux résidents - que même les taxis n'ont pas le droit de prendre). On entre alors dans la clandestinité en suivant l'ancienne piste menant au parking de Laret : elle est à 80% encore intacte, même si la végétation s'y réinstalle rapidement. Une portion de 500m a toutefois été totalement emportée vers 1200m d'altitude, il faut descendre au bord du torrent puis remonter et brasser quelques arbustes, rien de tragique : on retrouve la piste que l'on suit jusqu'au parking désaffecté. Avant de traverser sans trop de mal le torrent juste en dessous (passage pieds nus ou saut un peu audacieux). On suit la rive G dans l'herbe haute avant de retrouver l'ancien sentier du refuge, plus entretenu depuis 4 ans mais encore assez bien marqué.

Sentiment partagé entre la mauvaise conscience des tricheurs et la fascination de voir les forces cyclopéennes de la nature à l'oeuvre. On s'attendait du coup à être totalement seuls en pique-niquant près des chalets de Lombardui, miraculeusement épargnés...avant de voir arriver 2 Italiens montant au refuge comme nous...puis un randonneur bolivien (!) descendant du refuge...qui a dû d'ailleurs halluciner autant que moi quand j'ai attaqué en espagnol pour lui vanter les beautés de son pays - ou j'étais allé faire de la montagne plusieurs fois dans les années 1990 !

Et c'était pas fini : une cordée de Catalans montait juste derrière. Et 2 Autrichiens descendaient. Bref le bouche à oreille a fait son effet  et le sentier historique est en train de devenir un secret de polichinelle, comme le reconnait la gardienne d'un air pensif. Conclusion : c'est interdit et pas sans risque, mais nous n'étions pas les seuls dans l'illégalité.