Napf, traversée nord-sud de Luthern Bad à Fankhaus

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Accessible sans difficulté de tous les côtés, il y a un nombre impressionnant d’itinéraires possibles pour accéder au sommet du Napf. J’y suis déjà monté et descendu trois fois, jamais par le même chemins, mais je n'avais pas encore fait la traversée nord-sud de Luthern Bad à Fankhaus, qui est peut-être l’itinéraire le plus court. 

Je me rends à Luthern Bad tout d’abord dans un train bien rempli de scouts - tous masqués mais sans doute pas encore vaccinés – puis dans un minibus postal presque vide : nous ne sommes que trois passagers. Je suis toujours aussi émerveillé par l’existence de ces lignes de bus rurales qui auraient supprimées depuis des années dans beaucoup de pays.

À Luthern Bad (875 m), où il n’y a pas grand-chose à part un restaurant et une église, un orchestre champêtre (accordéon, clarinette, contrebasse et cor) joue de la musique alpestre un peu kitsch sous une tonnelle, pour une clientèle plutôt locale sortie pour le repas du dimanche midi. Dès le départ, je me trompe de chemin : je suis bêtement le panneau jaune "Napf" à l’arrêt de bus, sans tenir compte du fait que deux itinéraires mènent au Napf depuis ici, et que j'avais prévu de prendre l'autre (celui décrit dans le guide Rother Emmental). La montée commence aussitôt, par un chemin d’alpage caillouteux qui m'amène bientôt à Badegg, un nom qui ferait sans doute rire les anglophones (qui apprécieraient sans doute également le hameau de Friedegg dans le canton de Saint-Gall). Badegg se trouve d’ailleurs à quelques centaines de mètres de Vorder Ei et Hinter Ei :  il y a de quoi faire une bonne omelette dans cette vallée reculée du canton de Lucerne.

Je poursuis ma montée, le chemin d’alpage faisant place à un sentier plus étroit à mesure que je prends de l'altitude. Derrière moi, la vue s'étend au-delà des dernières bosses de la région du Napf jusqu'au Jura lointain. Ce n'est qu'au bout d'une heure et demie environ, lorsque j'arrive à un croisement de chemins et à un panneau de balisage de l’itinéraire national No. 3, que j'ai une impression de déjà-vu... alors que j’aurais dû arriver à l’alpage de Trachsuegg, je suis à Nideränzi (1235 m). Je suis déjà passé ici  en mai 2016 en descendant vers Neumühle, après avoir passé une nuit sur le Napf et m'être réveillé devant l'un des meilleurs panoramas de la Suisse centrale. La dernière demi-heure de ma montée au sommet se fait donc en terrain connu, plutôt que sur un itinéraire complètement nouveau. Qu'importe, l'étroit sentier qui contourne les flancs abrupts et boisés du Grüeblihängst avant de monter sur le plateau sommital du Napf (1407 m) est joli. La semaine a été pluvieuse, le sentier est boueux et il y a encore beaucoup de nuages résiduels sur les Alpes bernoises, si bien que la vue depuis le Napf est moins spectaculaire qu’en ce week-end de 2016. Pourtant, le soleil est chaud et l'herbe est sèche, ce qui me permet de profiter d'une sieste de 20 minutes après avoir mangé mes sandwichs et ma pomme.

Un panneau indique qu'il me faudra une heure et 40 minutes pour descendre jusqu'à Fankhaus, au sud du Napf. Alors que d’habitude je suis assez d’accord avec les temps de marche affichés, celui-ci s'avère être un peu optimiste : il me faut deux heures pour descendre, à quelques minutes près, sans traîner en chemin. Au début de la descente je reprends le sentier par lequel je suis monté, puis je bifurque à gauche et vers le sud, le long d’une large crête herbeuse qui remonte légèrement jusqu'au chalet du Grüebli (1296 m), où on peut acheter des produits de la ferme en libre-service. Au-delà, se succèdent des pistes d’alpage, des sentes à peine visible au milieu de prairies qui n'ont pas encore été fauchées ni broutées, et d'étroits sentiers forestiers qui traversent le flanc de montagne raide au-dessus du Fankhausgraben. À Unter Höchstalden (1162 m), un arbre majestueux se dresse seul à la jonction de quatre chemins : un banc en bois situé en dessous de ses branches imposantes offre de l'ombre pour boire un verre d'eau rafraîchissant.

Maintenant, la crête se rétrécit et le sentier se réduit à la largeur de mes deux chaussures de randonnée. Un bref passage exposé avec un à-pic sur la gauche est protégé par un câble métallique, bien que le sentier lui-même soit bon et ne présente aucune difficulté. Peu après, il fait un virage serré à droite et commence à descendre vers la vallée, encore 200 mètres plus bas. Bien qu’il ne soit pas exposé (le sentier s'est à nouveau élargi), ce passage est très raide, avec quelques rochers glissants et des racines d'arbres qui ne le sont pas moins. Ici aussi, un câble métallique facilite les choses, même si j'imagine qu’il sert surtout à aider ceux qui arrivent en sens inverse et doivent surmonter ce raidillon. L'ensemble du parcours est balisé en jaune - T1 donc - mais cette courte section mérite probablement un petit T2 : il ne faudrait certainement pas s’y aventurer avec les grands-parents et toute la petite famille en sandales !

Après avoir atteint le bas de cette descente raide, la fin de la randonnée n'est plus qu'à une dizaine de minutes. La crête devient une douce colline qui descend lentement la vallée, la forêt fait place à des fermes et des champs, et finalement j'arrive à l'arrêt de bus de Fankhaus avec seulement dix minutes d'avance sur l’horaire de bus.  Heureusement qu’il n’y a pas de bistrot, donc pas de regrets d’être arrivé un peu plus tard que prévu.

Je connais donc maintenant 8 itinéraires différents jusqu’au Napf. Ils sont tous jolis (sauf peut-être la descente directe sur Mettlenalp), mais lesquels sont les plus beaux ?  Je pense que pour une expérience Napf idéale, je monterais depuis Fankhaus, je passerais la nuit en haut puis, le lendemain, je descendrais par l’itinéraire très long mais absolument magnifique qui mène à Neumühle ou à Zollhaus dans l’Emmental en passant par la Lüderenalp.