Eiger : Arête de Mittellegi - Héli
|
||||||||||||||||||
![]() |
![]() |
Voilà un bien vieux rêve pour Agnès et moi, repoussé d'année en année pour causes de conditions défavorables, d'obligations familiales ou de guides non disponibles. Autant dire que cela restera un très grand souvenir, tant pour l'ascension de l'arête elle-même, dans un cadre parmi les plus grandioses qu'il nous ait été donné de connaitre en 30 ans de montagne, que pour la mésaventure ayant suivi dans la descente. Nous avons heureusement pu nous faire tirer d'affaire avant que cela ne tourne mal. Pas très fiers évidemment, mais je ne vois vraiment pas ce qu'on aurait pu faire d'autre.
Montée au refuge : la rimaye sous le tunnel de sortie de l'Eismeer est un peu trouée mais passe encore bien. Glacier sans souci avec trace profonde dans la neige molle. On peut éviter les 2 longueurs de 4 en remontant la langue de neige le plus haut possible pour prendre pied sur le rocher en (rimaye passe encore). La suite est sèche mais quand même bien scabreuse (cf images...), aucun balisage, on louvoie en traversée ascendante sur des vires déversées couvertes de gravier avec un assurage précaire...le franchissement d'un grand couloir est équipé pour le rappel (20m). Une plaque de neige/glace sous la cabane oblige à contourner par la haut (très délité, limite dangereux) ou par le bas (sans doute mieux).
Samedi était le jour d'ouverture de la cabane de Mittellegi, accueil adorable de la jeune gardienne Corinna dont c'était le baptême du feu ici après avoir gardienné Hollandia. Il faut avoir la foi pour se faire poser sur ce nid d'aigle début juillet en sachant qu'on ne redescendra que fin août...impossible de marcher plus de 5mètres quelque soit le coté sans arriver au bord du vide ! Pas d'eau courante. Le tonneau-bivouac juste en dessous est également ouvert. Nous étions juste 10 ce soir là, bien agréable de ne pas se marcher sur les pieds en refuge durant un beau WE. Un petit coucou aux 2 Zurichois, aux 2 Allemands et aux 2 Espagnols s'ils lisent ces lignes...le guide espagnol était d'ailleurs un grand pote de Martin Moriyon qui nous avait emmené grimper sur le Naranjo de Bulnes il y a quelques années - el mundo es chiquito !
Arête de Mittellegi : petite corniche neigeuse dans la partie horizontale de départ obligeant à mettre les crampons, la suite est en super conditions jusqu'à 50m sous le sommet, quasiment tout sec, sans crampons, avec cordes fixes en bon état et quelques spits de temps à autre. Dès que l'arête se couche (3920m) les choses changent brutalement : beaucoup de neige, de grandes corniches et une arête très effilée obligent à rester sur le versant sud pour traverser sur le flanc de l'arête, expo +++ avec une assurance très précaire. Neige molle/pourrie dès 9h du matin. Bref on a bien serré les fesses (cf images).
Descente en face W : l'arête sud - projet initial- nous a paru trop enneigée (il y avait quand même une vieille trace) qui plus est avec la neige ramollie, on a donc préféré tenter la descente en face W, encore très enneigée > 3400-3500m mais avec une trace et une neige encore dure. TRÈS mauvaise pioche...les conditions n'ont cessé de se dégrader, sous les 3700m on trouve une alternance de dalles rocheuses délitées et de plaques de glace couvertes de neige ramollie, qui plus est détachées du rocher avec un inquiétant son creux en tapant les pointes avant...Tant qu'on a trouvé les pieux métalliques pour assurer et rappeler cela allait encore, laborieux mais protégeable, jusqu'à tomber sur une impasse vers 3560m : plus moyen de trouver un quelconque ancrage plus bas malgré 1/2h de recherches en tous sens. Vachés à 8 sur la dernière broche métallique, il a fallu appeler les secours qui nous ont sorti de là rapidement et avec un professionalisme et une gentillesse absolues.
A notre décharge l'arête avait été juste gravie pour la 1ère fois la veille, en conditions annoncées comme convenables, mais nous n'avions aucune info sur la descente de l'arête sud - j'imaginais naivement que si le rocher en face N avait été nettoyé par la canicule (la face N de l'Eiger est déjà bien sèche !) l'arête sud ne pouvait être qu'en bonnes conditions. En fait elle n'est pas très raide et garde du coup la neige plus longtemps...Avec le recul cela aurait quand même été - peut-être ? - un moins mauvais choix que la face W qui n'est en principe pas très compliquée une fois sèche (ou alors très enneigée comme en fin d'hiver) mais s'est vraiment transformée en coupe-gorge ce jour là. La décision d'appeler les secours a donc été unanime pour les 10 personnes (toutes expérimentées, dont 4 guides), la mauvaise conscience passe vite au placard dans ces cas là.
Le vol restera un grand souvenir, enlacé avec ma douce moitié (ils treuillent 2 par 2) à un filin de diamètre ridicule 10 mètres sous l'hélico (technique long line) avec les maisons de poupée de Grindelwald 2000m plus bas et la face nord de l'Eiger juste devant nous. Enfin j'avoue que je n'ai que furtivement osé ouvrir les yeux. Sentiment étonnant de se retrouver assis dans l'herbe moelleuse et les fleurs de la Kleine Scheidegg, juste au dessus de la gare, de ses cafés, ses boutiques et ses touristes chinois - à peine 10mn après avoir décroché sa longe d'une broche métallique plantée entre glace et rocher délité...
La retour précoce nous a permis de fêter d'abord l'ascension (et l'intégrité physique des troupes !) sur le plancher des vaches au bistrôt de la Kleine Scheidegg puis d'aller piquer une tête dans le Lac de Thun, juste à coté d'Interlaken (eau à 23°). On devait être les seuls a avoir emmené un sac à dos et un piolet à la place de la serviette de bain et de la glacière portable !
Conclusion ces temps-ci, en attendant que la canicule achève de sécher la descente : Faites l'Amour pas l'Eiger !
Météo : Grand beau camiculaire les 2 jours (35° en plaine, iso 0° à 4600m), cumulus inoffensifs samedi soir mais tournant à l'orage dimanche vers 17h.
Horaire : Samedi Eismeer 13h - Cabane de Mittellegi 14h50. Dimanche départ 4h50 - sommet 9h40 / 10h - sortie en hélico 13h
Participants : Agnès & moi, Daniel M (guide), Michaël W (aspi). 3 autres cordées sur la course ce jour là
Montée au refuge : la rimaye sous le tunnel de sortie de l'Eismeer est un peu trouée mais passe encore bien. Glacier sans souci avec trace profonde dans la neige molle. On peut éviter les 2 longueurs de 4 en remontant la langue de neige le plus haut possible pour prendre pied sur le rocher en (rimaye passe encore). La suite est sèche mais quand même bien scabreuse (cf images...), aucun balisage, on louvoie en traversée ascendante sur des vires déversées couvertes de gravier avec un assurage précaire...le franchissement d'un grand couloir est équipé pour le rappel (20m). Une plaque de neige/glace sous la cabane oblige à contourner par la haut (très délité, limite dangereux) ou par le bas (sans doute mieux).
Samedi était le jour d'ouverture de la cabane de Mittellegi, accueil adorable de la jeune gardienne Corinna dont c'était le baptême du feu ici après avoir gardienné Hollandia. Il faut avoir la foi pour se faire poser sur ce nid d'aigle début juillet en sachant qu'on ne redescendra que fin août...impossible de marcher plus de 5mètres quelque soit le coté sans arriver au bord du vide ! Pas d'eau courante. Le tonneau-bivouac juste en dessous est également ouvert. Nous étions juste 10 ce soir là, bien agréable de ne pas se marcher sur les pieds en refuge durant un beau WE. Un petit coucou aux 2 Zurichois, aux 2 Allemands et aux 2 Espagnols s'ils lisent ces lignes...le guide espagnol était d'ailleurs un grand pote de Martin Moriyon qui nous avait emmené grimper sur le Naranjo de Bulnes il y a quelques années - el mundo es chiquito !
Arête de Mittellegi : petite corniche neigeuse dans la partie horizontale de départ obligeant à mettre les crampons, la suite est en super conditions jusqu'à 50m sous le sommet, quasiment tout sec, sans crampons, avec cordes fixes en bon état et quelques spits de temps à autre. Dès que l'arête se couche (3920m) les choses changent brutalement : beaucoup de neige, de grandes corniches et une arête très effilée obligent à rester sur le versant sud pour traverser sur le flanc de l'arête, expo +++ avec une assurance très précaire. Neige molle/pourrie dès 9h du matin. Bref on a bien serré les fesses (cf images).
Descente en face W : l'arête sud - projet initial- nous a paru trop enneigée (il y avait quand même une vieille trace) qui plus est avec la neige ramollie, on a donc préféré tenter la descente en face W, encore très enneigée > 3400-3500m mais avec une trace et une neige encore dure. TRÈS mauvaise pioche...les conditions n'ont cessé de se dégrader, sous les 3700m on trouve une alternance de dalles rocheuses délitées et de plaques de glace couvertes de neige ramollie, qui plus est détachées du rocher avec un inquiétant son creux en tapant les pointes avant...Tant qu'on a trouvé les pieux métalliques pour assurer et rappeler cela allait encore, laborieux mais protégeable, jusqu'à tomber sur une impasse vers 3560m : plus moyen de trouver un quelconque ancrage plus bas malgré 1/2h de recherches en tous sens. Vachés à 8 sur la dernière broche métallique, il a fallu appeler les secours qui nous ont sorti de là rapidement et avec un professionalisme et une gentillesse absolues.
A notre décharge l'arête avait été juste gravie pour la 1ère fois la veille, en conditions annoncées comme convenables, mais nous n'avions aucune info sur la descente de l'arête sud - j'imaginais naivement que si le rocher en face N avait été nettoyé par la canicule (la face N de l'Eiger est déjà bien sèche !) l'arête sud ne pouvait être qu'en bonnes conditions. En fait elle n'est pas très raide et garde du coup la neige plus longtemps...Avec le recul cela aurait quand même été - peut-être ? - un moins mauvais choix que la face W qui n'est en principe pas très compliquée une fois sèche (ou alors très enneigée comme en fin d'hiver) mais s'est vraiment transformée en coupe-gorge ce jour là. La décision d'appeler les secours a donc été unanime pour les 10 personnes (toutes expérimentées, dont 4 guides), la mauvaise conscience passe vite au placard dans ces cas là.
Le vol restera un grand souvenir, enlacé avec ma douce moitié (ils treuillent 2 par 2) à un filin de diamètre ridicule 10 mètres sous l'hélico (technique long line) avec les maisons de poupée de Grindelwald 2000m plus bas et la face nord de l'Eiger juste devant nous. Enfin j'avoue que je n'ai que furtivement osé ouvrir les yeux. Sentiment étonnant de se retrouver assis dans l'herbe moelleuse et les fleurs de la Kleine Scheidegg, juste au dessus de la gare, de ses cafés, ses boutiques et ses touristes chinois - à peine 10mn après avoir décroché sa longe d'une broche métallique plantée entre glace et rocher délité...
La retour précoce nous a permis de fêter d'abord l'ascension (et l'intégrité physique des troupes !) sur le plancher des vaches au bistrôt de la Kleine Scheidegg puis d'aller piquer une tête dans le Lac de Thun, juste à coté d'Interlaken (eau à 23°). On devait être les seuls a avoir emmené un sac à dos et un piolet à la place de la serviette de bain et de la glacière portable !
Conclusion ces temps-ci, en attendant que la canicule achève de sécher la descente : Faites l'Amour pas l'Eiger !
Météo : Grand beau camiculaire les 2 jours (35° en plaine, iso 0° à 4600m), cumulus inoffensifs samedi soir mais tournant à l'orage dimanche vers 17h.
Horaire : Samedi Eismeer 13h - Cabane de Mittellegi 14h50. Dimanche départ 4h50 - sommet 9h40 / 10h - sortie en hélico 13h
Participants : Agnès & moi, Daniel M (guide), Michaël W (aspi). 3 autres cordées sur la course ce jour là
Tourengänger:
Bertrand

Minimap
0Km
Klicke um zu zeichnen. Klicke auf den letzten Punkt um das Zeichnen zu beenden
Kommentare (6)