Picos de Europa : Naranjo de Bulnes, le Cervin des Asturies : face Est par la voie Cepeda


Publiziert von Bertrand , 5. Oktober 2011 um 15:03.

Region: Welt » Spanien » Asturias
Tour Datum:26 September 2011
Hochtouren Schwierigkeit: S+
Klettern Schwierigkeit: 6a (Französische Skala)
Wegpunkte:
Geo-Tags: E 
Aufstieg: 1900 m
Abstieg: 1900 m

Le Naranjo de Bulnes, extraordinaire monolithe calcaire de 500m de haut au coeur des Dolomites asturiennes de Picos de Europa, est indéniablement l'emblème de l'alpinisme espagnol. La voie originale en face N (Pidal / Cainejo) ouverte par un marquis et un chasseur de chamois en 1904 (!) est encore cotée D-/V aujourd'hui...Le rocher est d'une qualité exceptionnelle comme presque partout dans les Picos de Europa (et y compris dans le terrain facile ce qui est rare), compact, très sculpté et d'une adhérence phénoménale.

Ce fut donc un départ en fanfare de notre semaine dans les Picos de Europa. Enorme coup de coeur d'entrée pour cette région, ses cathédrales de rocher gris clair, son caillou exceptionnel, ses rencontres, sa gastronomie, ses sentiers aventureux, la mer au loin. Inquiets de la réputation - à juste titre - pluvieuse du massif (dont les abords rappellent bien plus l'Irlande ou la Bretagne que l'Espagne !), nous nous sommes précipités d'emblée sur le joyau de la couronne de peur que la chance ne tourne par la suite. D'autant que j'attire en général le mauvais temps comme le miel les mouches - ce ne sera pour une fois pas le cas, la météo merveilleuse de cette fin septembre ayant même gentiment englobé la verte Cantabrie.

La journée avait démarré en fait au milieu de la nuit, départ à 3h30 de Perpignan (où nous avions posé les enfants chez leurs papi-mamie) pour l'aéroport de Barcelone, vol pour Oviedo (prétendument low-cost mais où on nous a fait repayer plus cher que le billet lui-même pour enregistrer nos vélos pliants...), encore un coup de voiture dans l'environnement parfois défiguré de la cote (les Asturies sont aussi la capitale minière et sidérurgique de l'Espagne...), les TP ne sont pas encore arrivés dans le coin malheureusement.

Puis, enfin, nouveau et "véritable" départ sur les coups de midi, "by fair means" donc du point le plus bas possible, comme à notre habitude. Le mythique Naranjo de Bulnes méritait bien d'être gravi de bas en haut. Poncebos, 274m, fin de la route et départ du sentier, on se croirait dans les Alpes tessinoises ! Le sentier menant à Bulnes est d'ailleurs étonnamment escarpé et aérien quand on sait que c'était le seul accès possible (à dos de mule !) à ce hameau jusqu'à la construction du funiculaire il y a seulement 10 ans...malgré son altitude modeste de 650m, c'est semble-t-il l'un des derniers villages d'Espagne habité à l'année et non accessible par la route. C'est dimanche, la foule montée en funiculaire a colonisé les terrasses des 3 gargotes du village, mais il suffit de marcher 5 minutes pour se retrouver seuls devant une pancarte des plus inquiétantes : le "Refugio Uriellu" serait à 4h de marche par un "itinerario de alta montaña de extrema dureza" (!), muy exigente (!!), solo para montañeros expertos (!!!). La - grossière, il est vrai - carte locale au 40.000ème nous aurait donc menti ? On n'y aperçoit pourtant de beaux pointillés rouges figurant une randonnée sans souci particulier...

D'ailleurs au final il n'y a en effet pas vraiment de souci : le sentier par le Couloir del Balcosin est certes bien moins large et balisé que ses petits cousins helvétiques, bien plus solitaire aussi, il faut certes mettre les mains une paire de fois et ouvrir l'oeil, mais à part ça nous passons sans encombre notre 1er examen de "montañeros expertos" pour débarquer tranquillement au refuge vers 18h. Pour être honnêtes reconnaissons quand même que bon nombre de pointillés rouges sur la carte nous donneront bien plus de fil à retordre même par grand beau temps...

Pour les non-habitués des massifs ibériques, l'arrivée au refuge fait un petit choc la 1ère fois. D'abord les horaires : la "cena" est à 20 heures, le "silencio" à 23h30, le petit-déjeuner à 7h...et la 1/2 pension pour les membres d'un Club Alpin à 22,5 Euros ! Malgré tout la moitié des gens préfèrent cuisiner eux-même (ce qui est tout à fait accepté) voire même camper à coté (idem)...notre jeune guide Martin (nous n'avons évidemment ni le niveau ni le moral pour envisager la voie en tête) débarque à Mach 2 sur les coups de 19h45, le courant passe aussitôt avec lui, il est aussi bavard que moi (rare !), rêve déjà de venir nous voir à Berne pour faire la Face N de l'Eiger, et - vu qu'il ne parle pas un mot de français - permet à Agnès de rafraichir rapidement son espagnol, en commençant pas l'essentiel : "Reunion" (relais), "afloja" (du mou) et surtout "recoge !" (ravale !)...

Ah oui, la voie elle-même : pour gravir le légendaire Naranjo de Bulnes (Picu en langage local), sommet emblématique de l'alpinisme espagnol, la Cepeda est un excellent moyen terme entre la VN en face S (courte et surfréquentée) et les gros bastons ED de la Face W (dont la mythique Rabada-Navarro..."proxima vez" nous a dit Martin..."sans moi" a répondu Agnès...). Difficultés accessibles (enfin en second...ça reste quand même assez engagé en tête), soleil dès le matin, ampleur respectable (9 longueurs) et surtout un rocher absolument exceptionnel, compact, sculpté et d'une adhérence phénoménale que je pensais réservé au grès de l'Elbsandstein ou du Wadi Rum. C'est d'ailleurs l'une des caractéristiques des Picos, y compris dans le terrain facile ou très facile, ce qui est rare. En résumé c'est un peu comme si on avait planté les Dolomites sur les cotes bretonnes en remplaçant la Dolomie par le merveilleux calcaire croate de Paklenica. Le passage du trou à la sortie de la voie est assez rigolo.

Pour la petite histoire, la 1ère du Picu a été réalisée en 1904 (!) par un marquis et un chasseur de chamois encore fêtés en héros dans toute la région. Pidal, marquis de Villaviciosa (ville cotière voisine), amoureux de la nature et confident du Roi Alphonse XIII, a d'ailleurs ensuite été à l'origine des 1ers PN espagnols (Picos et Monte Perdido).

Nous avons poursuivi le séjour en gravissant le lendemain le Torrecerredo (point culminant du PN) en traversée avant de revenir dormir à Bulnes via le magnifique Refuge de Jou de los Cabrones, le plus difficile d'accès de toute l'Espagne selon les topos. Cap ensuite sur la Peña Santa de Castilla, 2ème sommet mythique des Picos au dessus des Lacs de Covadonga, "montaña mas bella de España" selon les locaux avant de boucler le séjour versant sud du massif en vélo-rando autour du village perdu de Cain et de sa mythique "Garganta Divina" de Cares.

Météo : grand beau doux

Participants : Agnès et moi, Martin (guide de Gijon)

Itinéraire détaillé : les topos espagnols cotent TD-, D+ me parait plus juste, mais attention à l'engagement, la voie n'est que partiellement équipée et présente des passages en dalle en IV/V pas toujours protégeables. Pour ceux qui auraient trop randonné, l'itinéraire de suivant à G de l'"Amistad con el Diablo" est encore plus beau, un peu plus dur (5c / 6a) et surtout bien plus engagé avec d'immenses murs sculptés où on n'aperçoit pas le point suivant...

Attention à la météo, les Picos de Europa sont un peu les Dolomites espagnoles qu'on aurait placé au bord des cotes bretonnes...

J1 : Monter au Refugio Uriellu (1960m, gardé de mars à novembre) )de préférence depuis le hameau de Bulnes (650m) qu'on atteint depuis Poncebos (270m) soit en funiculaire soit en 1h15 de marche par un magnifique sentier. Restent alors 1400m de montée soit par le Col de Pandebano soit (bien plus beau) par l'itinéraire escarpé du couloir de Balcosin et le replat de Camburero (4h).

J2 : redescendre par le sentier du col de Pandebano sur 60m et emprunter à D une sente remontant une grande gorge au pied de la face N du Picu. La sente contourne alors l'éperon NE, la quitter peu après pour viser la partie la plus à D de la face E (vires et gradins). L'attaque - commune jusqu'à L3 avec la Voie Schulze - se fait dans une grande fissure large et peu raide (plaque commérorative).

L1 : gravir la fissure (4b)
L2 : au mieux dans une belle dalle sculptée, facile mais non protégeable, en visant le haut d'un dièdre oblique (4c). A la jonction avec celui-ci, se rétablir à l'extérieur par des prises rondes et fuyantes (5a)
L3 : poursuivre par une cheminée assez raide (5a) et continuer dans un dièdre jusqu'au sommet (4c), relai sur une bonne vire
L4 : viser tout droit un gros trou et basculer un peu à G pour rejoindre un dièdre vertical bien prisu, que l'on quitte à D par une dalle fine lorsqu'il commence à déverser (5b)
L5 : traverser à D en direction d'une vire (3c) et basculer encore à D puis à G pour contourner un ressaut surplombant (4a)
L6 : traverser toujours à G pour rejoindre un bon relais spitté peu avant l'entrée d'une énorme niche (3b)
L7 : gravir le bord G de la niche (1 ficelou) et revenir à d le long d'une fissure, se rétablir ensuite tout droit dans des cannelures verticales  jusqu'à une petite vire (4c)
L8 : traverser à G pour rejoindre une courte cheminée évodente, la suivre puis la quitter par la dalle de D (5b/5c très engagé sans protection possible) jusqu'à une nouvelle vire (relai malcommode)
L9 : surmonter un court dièdre arrondi, déversant et patiné (6a ou 5c/A0) jusqu'au trou caractéristique dans lequel on se faufile sans sac, on bascule alors dans le haut de l’amphithéâtre de la face S à 80m du sommet, non loin des rappels de descente. Rejoindre alors l'arête sommitale par gradins et petits couloirs en tirant un peu à G (cairns, II/III) puis le sommet facilement les anneaux à la main. On peut aussi poursuivre l'arête au dessus du trou (2 lg en 3c, délité).

Descente : revenir sur ses pas en désescaladant les gradins jusqu'aux 1ers anneaux de rappels, on atteint alors le bas de la face S en 3 grands rappels de 50m (donc 100m de corde). Celui du haut, assez couché, peut aussi se désescalader (3a). Du bas de la face S, tirer à G (sens descendant) par des gradins pour retrouver la sente du matin ramenant sous la face N (petit crochet évtl pour reprendre les affaires laissées au pied de la voie)

Tourengänger: Bertrand


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Kommentare (4)


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radivi hat gesagt: Excellent
Gesendet am 5. Oktober 2011 um 15:47
ravi de voir une repetition (par voie plus difficile, bien entendu) aussi tot apres ma visite. C'est vraiment un sommet exceptionnel.

Bertrand hat gesagt: RE:Excellent
Gesendet am 5. Oktober 2011 um 17:09
Je n'avais pas vu que tu avais aussi entré une sortie...incroyable coincidence...le Picu mérite vraiment un peu plus de notoriété sur hikr et en Suisse !

Alpin_Rise hat gesagt: Lechz, hechel...!
Gesendet am 6. Oktober 2011 um 12:07
Boah, quel rocher! Je crois que je dois quitter la Suisse l'un ou autre fois ;-)
G, Rise

Bertrand hat gesagt: RE:Lechz, hechel...!
Gesendet am 6. Oktober 2011 um 13:53
Pour un grimpeur comme toi c'est l'Eldorado : un des plus beaux rochers du monde (et même avec mon tout petit niveau j'ai beaucoup voyagé...), des montagnes aussi sauvages que le Tessin, des faces rocheuses de 600m avec des itinéraires en V sur coinceurs...seul bémol : c'est souvent un peu le même climat que l'Alpstein (bon en moins froid quand même...).


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