(Quasi) Tour du Manaslu, version hivernale : 3ème partie, retour de Shyala à Machhakhola


Publiziert von Bertrand , 30. Dezember 2021 um 18:41.

Region: Welt » Nepal
Tour Datum:10 Dezember 2021
Wandern Schwierigkeit: T3 - anspruchsvolles Bergwandern
Wegpunkte:
Geo-Tags: NEP 
Zeitbedarf: 5 Tage
Aufstieg: 1920 m
Abstieg: 4570 m
Strecke:Shyala - Namrung - Dyang - Philim - Dhoban - Machhakhola (78km)

Suite et fin du voyage, récit précédent ici.

Vendredi 10/12 : Shyala (3510m) - Namrung (2630m); 15k/+300m/5h

0° dans la chambre de Shyala ce matin, un net progrès par rapport aux -4° de Sumdo. Mais le somptueux lever de soleil sur le Manaslu depuis la porte de la chambre valait bien un peu d'inconfort ! Chapeau aux hivernalistes en Himalaya, rien qu'à s'imaginer 4000m plus haut on a l'impression de perdre quelques degrés...



Comme nous sommes désormais tout le temps les seuls clients, Nabin et Moritz prennent la maison en main et se permettent de lancer le poêle dès le petit-déjeuner à 7h...Bon la bouse de yak chauffe pas des masses, d'ailleurs on n'ôtera les doudounes qu'au bout d'1h de marche sur un sentier souvent couvert de verglas. Enfin moi en tous cas. J'ai même pas l'excuse d'être le doyen du groupe (Michel a 5 ans de plus) mais je revendique hélas haut la main le titre du plus frileux !

Les lodges ferment les uns après les autres, ceux qui ont les moyens partent se mettre au chaud en plaine (comme on les comprend...), on n'est donc pas fâchés d'en trouver un encore ouvert au joli village de Lhi pour casser une petite graine (enfin un Dal Bhaat quoi - faudra bien un mois sans riz au retour pour se désaccoutumer). Assez folklo d'ailleurs, entre les gamins morveux, le lama déjà éméché cherchant à soutenir quelques roupies "pour l'éducation de son fils", les vaches ayant enfoncé un portail pour bâfrer les pousses de luzerne en train de sécher...



A Namrung on reprend nos petites habitudes en réinvestissant le même guesthouse du "Windy Valley" (quel nom aguicheur !) qu'à l'aller, la village n'est qu'à 2620m (soit 900m plus bas que la veille) - mais manque de bol les températures descendent en même temps que nous ! La famille se taillera elle aussi dans 10 jours, pourtant les gamins disposent déjà d'une belle télé grand écran débitant des heures durant des dessins animés débiles en Hindi. Bah au moins ça leur fait une langue de plus (avec népali, anglais et tibétain obligataires dès la primaire, cf chapitre précédent).

Sur la photo du Chorten, bien regarder au milieu de l'image ..




Samedi 11/12 : Namrung (2630m) - Dyang (1880m); 20k/+600m/6h20

C'était l'étape la plus pénible à la montée, c'est pas mieux à la descente...donc copié-collé du commentaire de la fois passée : près de 7h de marche sur des sentiers souvent défoncés par les caravanes muletières ravitaillant la vallée (ici aussi le portage se perd...mais qui pourrait leur en vouloir ?), quasiment pas un mètre à plat, escaliers montants et descentes tord-pattes s'enchainent sans fin au fond d'une gorge austère...je tue le temps et l'ennui en me repassant en boucle mes MP3 "Teach yourself Nepali" jusqu'à l'overdose, Moritz (une des rares personnes que je connaisse encore plus bavarde que moi) entretient Timo et Agnès de l'évolution sociale du Népal depuis l'abolition de la monarchie et la prise de pouvoir démocratique par les maoistes, Michel photographie les rares indigènes croisés...



Bon au moins il fait beau…et il parait qu'on ne voit pas la même chose en sens inverse. En plus le genou d'Agnès a tenu le choc. Si le chirurgien la voyait...et le physio, donc ("beaucoup trop tôt pour un trek !")...Selon le programme de départ on serait en train de passer le col...est-ce qu'on n'a pas été un peu petit bras ? Et si nos pieds-nickelés népalais avaient réussi ? Bon on retrouvera peut-être aussi leurs corps au printemps, ce serait pas la 1ère fois...allez dans 3 jours on est à Bandipur au chaud et sous la douche. Lire la suite pour rigoler...


La mule à 5 pattes...c'est beau l'amour !


Dimanche 12/12 : Dyang (1880m) - Philim (1570m); 15k/+400m/5h20

Plus qu'un jour et demi. +7° dans la chambre ce matin, à ce train-là on aura bientôt besoin de la clim ! Journée bien plus tranquille avec de bons chemins, des villages plus animés, une courte portion au soleil où je me suis même hasardé à marcher en T-shirt...Nos 2 porteurs sentent l'écurie et sont de plus en plus enjoués - sans rakshi d'ailleurs puisqu'ils appartiennent à une minorité chrétienne évangélique. Un genre de secte baptiste sentant un peu le soufre, mais le missionnaire a fait du bon boulot car l'alcoolisme est un terrible fléau au Népal.
Même avec 30 kg sur le dos (charge des plus modérées, en mode commercial ils sont souvent à 40 ou pire si affinités) ils restent toujours bien plus agiles que nous, en particulier dans les passages éboulés par la dernière mousson. Ou s'était bien sûr dit en montant "ben heureusement qu'on n'aura pas à repasser ici, dis-donc !" . Pas sûr que les séracs du Tacul ou du Corridor du Combin soient vraiment plus dangereux au final.



On se réjouissait d'une après-midi à lézarder enfin au chaud sur la terrasse mais le temps de dénicher la mamie du lodge dans le village, de la mettre aux fourneaux,  et d'avaler le Dal Bhat que le soleil s'était déjà caché derrière la montagne. Évidemment un petit vent aigre en a profité pour se lever et il a fallu ressortir les doudounes qu'on avait pourtant enterrées au fond des gros sacs. Et bien sûr plus de poêle à 1500m d'altitude ! J'ai l'impression qu'on ne se réchauffera complètement qu'à l'escale de Dubaï - et encore si la clim n'est pas réglée à fond.


"Teach yourself nepali"...tu parles !

Le Wifi est évidemment "बिग्रिएको/ bigreko" (= "cassé" - mot de base de la langue népalaise), mais ici tout est possible...On réussit finalement à négocier dans la succursale d'une "banque" locale d'utiliser leur Wifi pour une poignée de roupies. Assez folklo la banque en question : 3 mètres carrés, un ordi vintage 1980, 2 employés, 1 tonne de documents papier...et 1.5 jour de marche (aller simple) pour se rendre au bureau. Curieusement il a fallu rameuter une boutiquière du village pour qu'elle entre le code. Le tout a marché 6 minutes avant de tomber "bigreko", ensuite l'agence a fermé. Mais ça a suffi pour rassurer nos vieux parents désormais accros aux nouvelles régulières depuis l'arrivée de cette satanée invention.


Lundi 13/12 : Philim (1570m) - Dhoban (1050m); 17k/+400m/5h40



Enfin de retour sous les bananiers,  même si on n'a toujours pas atteint les 20° je peux enfin trainer le soir sans fuir sous la couette et me livrer à mon passe-temps favori : débattre sans fin des subtilités du vocabulaire népali avec Nabin et Moritz. Il faut savoir que 2 langues cohabitent, l'une savante utilisée par les médias, bourrée de mots sanscrits qui encombrent les dictionnaires mais que seuls les lettrés de Kathmandou comprendront...et l'autre effectivement utilisée par les innombrables ethnies parlant chez eux leurs dialectes et n'utilisant le népali appris à l'école que comme langue véhiculaire.

Le jeu consiste à filtrer la liste de vocabulaire de mon "Teach yourself Nepali" pour purger la 1ère et ne retenir que les mots que nos interlocuteurs Gurung, Tamang, Limbu, Rai, Kaling ou Bothe (tibétains) - selon la région - comprendront effectivement ! Moritz prend un plaisir érudit à m'expliquer en outre quels mots se retrouvent aussi en Farsi, en Hindi ou en Urdu...Je me réjouis déjà de réétudier tout ça avant de revoir l'Iran et de découvrir le Pakistan sitôt la retraite sonnée.

Pour le reste il a fallu franchir a l'envers le gigantesque éboulement de Jagat, où on s'était pourtant tous dit à l'aller "never again !"...heureusement qu'on n'y a pas croisé l'une des innombrables caravanes muletières ravitaillant la vallée, car il y a par endroits à peine de quoi poser le pied !



Anecdote rigolote : alors qu'on finissait notre x-ième Dal Bhat du séjour dans un hameau cradingue, l'armée a débarqué pour évacuer les lieux : ils allaient faire sauter un pan de montagne sur la rive opposée pour recreuser un bout de piste emportée par la mousson. Effectivement ils ont mis la dose, des cailloux ont plu sur les toits de tôle du bouiboui qu'on venait de quitter ! Vu la raideur insensée de la vallée sur des dizaines de kms, la violence de la mousson et les moyens dérisoires mis en œuvre, on aura sûrement le temps d'être tous réincarnés avant que la piste n'atteigne le Tibet comme c'est prévu. D'autant qu'au fur et à mesure de l'avancement de la piste vers l'amont, des tronçons entiers s'éboulent régulièrement en aval, privant les bulldozers de ravitaillement ! Un avatar de Sisyphe a du un jour ou l'autre vivre par ici.





Mardi 14/12 : Dhoban (1050m) - Machhakhola; 11k/+220m/2h45

Les dernières heures de marche du matin ont été l'occasion de côtoyer de près les travaux sur la piste. Entre compresseurs à moitié défoncés par les chutes de caillasses et ouvriers maniant des marteaux piqueurs aussi gros qu'eux en toncs, c'était assez folklo (ou tragique, c'est comme on veut...). Pour finir les chantier du Qatar c'est peut-être pas si mal...



Les 6h de piste / route (pour 110km...) en jeep jusqu'à Bandipur, en dehors de nous remettre les vertèbres en place à la façon d'un ostéopathe vindicatif, ont été aussi l'occasion d'une petite panne amusante : la fumée sortant du capot a d'abord fait craindre le pire, au final en mendiant aux rares bus de passage un peu d'eau et en pissant collectivement dans le radiateur on a pu redémarrer et arriver à Bandipur avant la nuit -  accueillis par un extraordinaire crépuscule sur le Manaslu et les Annapurnas.



Perché en haut d'une colline, ce gros village est étonnamment resté à l'écart du bruit et de la pollution, avec tout un centre historique interdit à la circulation - chose rare au Népal. Les visiteurs de la capitale y débarquent certes chaque WE en quête de tranquillité, mais pour le reste c'est une véritable oasis de calme, ressemblant un peu à ce qu'était Pokhara il y a 20 ans avant son développement anarchique. Et la douche me direz-vous ? Ben c'était tout simple, une bassine d'eau bouillante sortant d'un chauffe-eau déréglé, une bassine d'eau froide, une casserole pour faire le mélange et s'asperger. Bref barbe et cheveux attendront Katmandou.




Mercredi 15/12 : Bandipur (1000m), randonnée vers la Grotte de Siddha

Nous assistons d'abord, impressionnés, à la rentrée des classes dans les nombreuses écoles de la ville. Ben oui Bandipur n'est pas bien grand mais il faut compter avec tous les villages alentours...et surtout une moyenne d'âge de la population de 23 ans (à titre de comparaison l'Allemagne est à 49 ans) ! Autant de filles que de garçons, tous en uniforme tirés aux 4 épingles, tous masqués (!), tous ou presque massés devant les échoppes de confiserie pour faire quelques stocks avant les cours...Bon pas d'illusion, ici c'est le Népal aisé, la vraie misère est dans les régions déshéritées de l'ouest, loin des belles montagnes blanches et à l'écart des circuits de trek.



Ensuite visite folklo de la grotte avec une centaine (!) d'écoliers de la banlieue de Katmandou. Le malheureux guide ne savait plus où donner de la voie ...Tous enchantés de pratiquer leur anglais sur nous - le hic c'est que Bertrand est aussi imprononçable pour les Népalais que pour les Anglais ou les Italiens ! Avouons sinon que l'antre de Siddha vaut plus pour la rando d'accès en forêt que pour sa visite proprement dite. Retour par l'ancien chemin pédestre (la route n'existe que depuis 2006) avec un nouveau coucher de soleil somptueux sur les Annapurnas, le Manaslu et les Ganesh.



Jeudi 16/12 - vendredi 17/12 : Katmandou - Bhaktapur

Retour le matin à Katmandou un peu moins pire que prévu, à peine plus de 5h pour 140 km (qui plus est 100% goudronnés !). Avec quand même un remorquage de camion défoncé pour mettre un peu d'ambiance. On a ensuite raccompagné notre guide local Nabin chez lui dans une lointaine banlieue. Cécile et Arnaud se souviennent bien de lui, il était d'ailleurs tout navré qu'ils n'aient pas pu faire partie du voyage. Il vit avec sa femme et sa fille dans une petite maisonnette de tôle, on voit bien pire ici, mais ça nous a quand même un peu serré le cœur.

Coté test PCR, c'était un peu la confusion, chaque compagnie aérienne a ses laboratoires agréés dans Katmandou - et bien sûr difficile de savoir lesquels étaient validés par FlyDubaï...après quelques heures passées en vain sur le website de la compagnie on a fini par convoquer un laboratoire qui a envoyé quelqu'un faire les prélèvements à l'hôtel. Avec la promesse de renvoyer un coursier amener le certificat (attention, copie papier obligatoire !) le lendemain soir, la veille du départ. J'avoue qu'on était un peu nerveux. Bon pour finir tout a fonctionné comme prévu - le tout pour 1500 Roupies (12 €), le 10ème du prix suisse...



Entre-temps visite de l'ancienne capitale royale de Bhaktapur, une des merveilles architecturales du pays, avec l'incontournable crochet au Stuppa de Bodnath. Les dégâts du tremblement de terre ont - enfin ! - été largement réparés, et on a profité égoïstement de l'absence complète d'autres touristes : on a dû en croiser moins de 10 à Katmandou sur un total de 4 jours - au grand dam des locaux qui tentaient désespérément de nous harponner devant chaque échoppe. Pour le clin d'œil grivois, il est à chercher sur les petites sculptures en bois (cf photo !) que notre guide culturel local, l'œil brillant, n'a pas manqué de nous faire remarquer. "You surely know Kamasutra, don't you, héhéhé !"







A noter que nous étions quasiment les seuls blancs à embarquer (et Agnès la seule femme...) pour Dubai, les nombreux vols entre KTM et les pays du Golfe ne servent aujourd'hui plus qu'à acheminer les travailleurs immigrés...dont les virements représentent actuellement le 1er poste du PIB népalais, bien devant les recettes touristiques ! Même ici les temps changent.


Manaslu, I'got the Blue.


Tourengänger: Bertrand


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Kommentare (5)


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gurgeh hat gesagt:
Gesendet am 30. Dezember 2021 um 19:08
chouette récit et super aventure

Bertrand hat gesagt: RE:
Gesendet am 30. Dezember 2021 um 19:12
Merci ! Je déduis de ton avatar que cette région te tient aussi bien à coeur...

gurgeh hat gesagt: RE:
Gesendet am 31. Dezember 2021 um 11:15
Ahah la photo a été prise au Tessin en fait :) Mais ça rappelle bien la montagne, et si je ne suis pas encore allé au Népal, j'ai fait le Bhoutan et c'était effectivement formidable.
En fait, c'est surtout que je me suis remis à penser à ces voyages d'aventure / treks lointains que j'avais mis en pause depuis quelque temps, pour les raisons que l'on sait. Et ton récit a continué à me donner envie à planifier quelque chose !

ChristianR hat gesagt:
Gesendet am 30. Dezember 2021 um 21:07
En fait, cela ressemble 'achement au Valais d'il y a 50 ans, les grivoiseries kamasutiennes en moins.

Beau récit !

Bertrand hat gesagt: RE:
Gesendet am 31. Dezember 2021 um 08:07
Il y a un peu de ça...ou disons il y a 100 ans...faudrait juste trouver l'équivalent local du Dal Bhat !


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