Le Râteau : qu'il est beau le Pilier Candau !

Le Rateau (3800m) est le voisin immédiat de la Meije à laquelle il rend 200m d'altitude et un peu d'élégance...sa face sud offre néanmoins de grandes voies rocheuses sur un magnifique gneiss orange n'ayant (presque !) rien à envier à celui du Grand Capucin...avec 3 gros avantages : des cotations accessibles, une solitude presque garantie, et une descente facile et rapide sur la Gare des Ruillans à 3200m, d'ou le fameux téléphérique des Vallons de la Meije redescend à la Grave, épargnant ainsi 1800m de dénivelé (et autant de cartilage rotulien !).

Itinéraire détaillé ici

Après avoir trouvé la Voie des lézards (sur la Pointe Thorant voisine) plutôt accueillante la veille, on se voyait déjà galoper sur cet éperon à la cotation similaire, puis buller longuement sur la terrasse du restaurant du télécabine des Ruillans...au final on a quand même passé près de 6h30 sur cet itinéraire qu'on imaginait plus facile. A titre de comparaison cela nous a semblé bien plus sérieux que la Pointe d'Amont...mais c'est peut-être simplement qu'on a 4 ans de plus ...Bon à titre de comparaison bis, Narcisse Candau avait mis 5h45 lors de l'ouverture. Mais il est vrai qu'il était en solo, ça va plus vite !

Le soir nous sommes allés assister à la conférence du fameux grimpeur-glaciologue Bernard Francou à La Grave. Au milieu d'un océan de mauvaises nouvelles quant à la fonte accélérée des glaciers, nous avons quand même appris que ceux du Karakoram refusaient de reculer comme les autres. Bref on pourra toujours cramer du CO2 pour grimper au Pakistan quand les Alpes seront à 100% en cailloux [mode humour noir off]. La conférence était organisée par le Collectif La Grave autrement qui lutte - entre autres, leur projet est bien plus riche que ça - contre la construction d'un 3ème tronçon de téléphérique jusqu'au sommet du Dome de la Lauze (3580m).

Un peu KO quand même le lendemain, on finira le séjour en mode relax par une voie plus facile sur le magnifique calcaire méridional des Cerces.

Conditions du jour : nous avons utilisé l'attaque de gauche, la seule apparemment encore parcourue aujourd'hui. Le névé d'attaque monte assez haut mais il était en béton armé, un peu limite avec nos Irvis hybrid 10 pointes semi-alu...La traversée oblique du socle jusqu'au fil du pilier est tout sauf évidente à trouver sur un rocher noir inégal et pas toujours facile à protéger - bravo Matthias ! Le pilier lui-même est en beau rocher orange rappelant parfois la Dibona...par contre l'équipement à demeure est plus que chiche, on n'a pas vu plus de la moitié des 15 pitons (en 500m de développé) annoncés par le topo !

L'ensemble est assez roulant jusqu'au surplomb qu'on a trouvé bien indigeste (passage sur la droite). C'est la 1ère fois que je vois Matthias tirer sur un friend ! Bon a sa décharge il était lesté du gros appareil photo oublié au refuge par Paulo Grobel, le fameux guide-himalayiste de La Grave, avec lequel nous avions passé une inoubliable soirée la veille à papoter du Népal...La longueur qui suit le surplomb est également malcommode avec une traversée gazeuse sur la gauche que les seconds de cordée émotifs que nous sommes devenus n'ont guère apprécié. La fin est à nouveau plus accueillante avec 2 gendarmes effilés plus impressionnants que difficiles juste avant de retrouver la VN du rateau W, très fréquentée ce jour-là. Le haut de la VN du Rateau (facultatif) est également très ludique sur du super rocher bien raide sans dépasser pour autant le II+.

La descente sur les Ruillans est en top conditions, toute en neige avec une bonne trace et une rimaye bien bouchée.

Météo : comme en Valais, il fait toujours beau dans les Ecrins, c'est bien connu...donc grand beau stable, vent nul, iso 0° à 4000m.

Accès : nous avions laissé la voiture à Bourg d'Oisans l'avant-veille pour monter en taxi à St Christophe (50 €), sachant qu'on enchainait le surlendemain (après la Pte Thorant) sur la traversée du Rateau par le pilier Candau - donc avec descente via le télécabine des Ruillans sur la Grave. Impossible de faire ça en bus avec 2 liaisons par jour. A quand des TC dignes de ce nom dans les Alpes françaises ? Je suis retourné chercher la voiture en stop depuis La Grave pendant qu'Agnès et Matthias se prélassaient au soleil sur la terrasse du Castillan...La dernière descente des Ruillans est à 16h45h, elle prend pas loin de 45mn.

Hébergement : super accueil au Refuge de la Selle comme il y a 4 ans pour faire la Pointe d'Amont. Les gardiens changent mais l'ambiance reste, la bibliothèque de livres rouges Guérin s'est juste étoffée...et il y a aussi une guitare folk toute neuve dont les cordes d'acier achèveront de vous user la peau des doigts ! On mange toujours excellement avec du pain bio cuit sur place. Par contre, Covid oblige, il faut monter son sac de couchage...c'est éventuellement négociable pour ceux qui partent sur une voie technique au Rateau sans repasser au refuge à la descente (chuuuut...). On était 13 jeudi soir, 20 vendredi soir mais c'était complet le samedi car - pour la même raison - le refuge doit opérer en sous-capacité. Noémie a même pris le temps de me raconter ses années héroiques à Adèle Planchard où on l'avait croisé lors d'une mémorable tour à skis autour de la Grande Ruine.

Horaire : départ 4h, attaque 6h30/45, jonction VN Rateau 13h10, sommet 13h30, arrivée Ruillans 15h15.

Participants : Agnès & moi, Mathias D (guide)