Sur le Pembrokeshire Coast Path : Huitième étape, de Broad Haven à Solva
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Pour le troisième jour consécutif, j'ouvre mes rideaux sur du ciel bleu et du soleil. Toute trace de l'orage de la veille est partie, l'air est doux et limpide. La table où je prends mon petit déjeuner bénéficie d'une vue ininterrompue sur la mer à travers les grandes baies vitrées du bed & Breakfast… dommage que celles-ci soient si sales, attendant encore apparemment leur premier nettoyage de la saison. La mer, qui hier était bleu turquoise, a viré au bleu-gris avec de l'écume blanche ; il doit y avoir du vent.
Dehors, la côte s'étend vers le nord presque à l'infini. A l'horizon, j'aperçois des collines plus hautes qui dépassent. Je n'arrive pas à distinguer si elles appartient au continent ou s'il s'agit d'une île, je demande donc à la serveuse qui vient remplir ma tasse à café. Elle réfléchit longtemps à ma question impossible ("C'est quoi qu'on voit là-bas à l'horizon ?"), puis répond, toute désolée, "Je sais pas, m'y connais pas en bord de mer." Je me dis tout de même que, dans un hôtel de bord de mer qui accueille des touristes venus découvrir la côte et susceptibles d'avoir des questions la concernant, ce ne serait pas mal de former les employés, ne serait-ce qu'un tout petit peu, en "bord de mer". Elle se rachète un peu en me disant "Mais je pense que St. Davids et Solva se trouvent là-bas" et en indiquant la bonne direction du doigt. Ca tombe bien : aujourd'hui je vais à Solva, ça aurait été bête de partir dans la mauvaise direction !
Il y a une supérette juste à côté du B&B ; en partant, j'y passe pour acheter à manger pour ce midi et demain midi. A 9h15 je me mets en route pour ce qui sera l'étape la plus courte et la plus facile de toute ma randonnée côtière. J'ai rendez-vous aujourd'hui avec ma soeur Sarah : nous ne savons pas exactement où, car elle a prévu de partir depuis Solva et de me retrouver en route dans le courant de l'après-midi. Il y a du monde sur la grande plage plate de Broad Haven ; non seulement les promeneurs de retrievers habituels, mais aussi pas mal de gens qui font du footing sur le sable. Cette affluence me surprend… puis je me rends compte qu'on est samedi. Lorsqu'on marche plusieurs jours de suite, on finit par perdre le fil du calendrier ; mais en effet, ça fait maintenant une semaine que je suis en route et le week-end est de nouveau là. Lorsque viendra samedi prochain, je serai déjà dans un train sur le chemin du retour vers la Suisse.
A l'extrémité nord de la plage, le sentier s'élève doucement au-dessus du "rocher au cerf" qui ressemble à toutes sortes de choses félines mais absolument pas à un cerf. Les falaises ici sont relativement basses, le sentier plutôt horizontal et facile. A l'opposé des paysages sauvages d'hier, aujourd'hui la civilisation semble nettement plus proches avec, le long de mon parcours, plusieurs villages et petites routes donnant accès à la mer. Le premier de ces endroits est Druidston Haven, une plage magnifique parsemée de grosses pierres, son extrémité sud fermée par une haute falaise noire en surplomb. Je descends sur la plage, lance quelques cailloux à la mer, trempe ma main dans l'eau pour voir si elle est froide (pas trop) et me pose quelques minutes sur un rocher pour boire en admirant ce lieu superbe. Le couple de Hollandais que je vois régulièrement depuis deux jours me dépasse ; je les vois dans la prochaine montée, avançant lentement vers le haut de la falaise. Le sentier quitte la plage par un vallon derrière les falaises, puis remonte droit dans la pente par un escalier excessivement raide qui aurait mérité une rampe pour faciliter la progression.
Une nouvelle section facile et horizontale passe dans des pâturages où des poneys me regardent passer tranquillement, puis le sentier plonge vers le prochain vallon et devient un peu moins commode : raviné, érodé par les chaussures et la pluie, je marche dans une tranchée profonde de 40 centimètres et juste assez large pour poser un pied à la fois. Cette descente me mène à Nolton Haven, village minuscule où il n'y a qu'une église, un pub et deux ou trois maisons. La plage de Nolton est plus encaissée que celle de Druidston, une baie étroite coincée entre de hautes falaises des deux côtés, presque recouverte par la mer. Pour la première fois, sur cette plage, je vois quelques familles en vacances de bord de mer traditionnelles, assises sur la plage avec pelles et seaux, jeux de balle et enfants qui pataugent dans les vaguelettes. Un groupe de randonneurs attend le bus pour Solva : je les croiserai plus tard dans la journée, revenant à pied vers leur point de départ. Pour une région aussi rurale, la côte du Pembrokeshire est bien desservie par les bus, on peut facilement les utiliser pour faire des randonnées en étoile à la journée. Je redépasse les Hollandais qui font une pause sur la plage ; je ne les reverrai plus de la journée.
Après un nouveau petit bout de haut de falaise, maintenant c'est la longue plage de Newgale qui apparaît devant, balayée par le vent et bordée d'un haut banc de galets. La mer est haute, il n'y a que très peu de sable visible. Le sentier reste au-dessus de la plage pendant un kilomètre, ne me permettant d'accéder au bord de mer qu'à la moitié de sa longueur. Une fois sur la plage, je la suis vers le nord, en essayant de rester sur le mince ruban de sable entre les vagues à gauche et les galets à droite. Mais la mer finit par prendre le dessus, les derniers centimètres de sable disparaissent sous l'eau et je suis obligé de remonter sur les galets pour continuer.
Peu avant midi et demi, j'arrive à l'autre bout de la plage, vers le village de Newgale. Il y a du vent, il fait trop froid pour une vraie pause avec sieste, mais en me blottissant contre les galets j'arrive à trouver un endroit plus ou moins abrité pour manger tranquillement. Les nombreux surfeurs et véliplanchistes qui fréquentent cette plage font eux aussi leur pause midi, il y en a davantage sur la plage que dans l'eau.
Après une demi-heure de pause, je repars pour la suite de l'étape. Cela commence par une montée rude et raide, suivie immédiatement par une descente du même style vers une plage caillouteuse au bout d'une petite vallée. Sur la carte, cet endroit s'appelle Cwm-bach, ce qui veut dire "petite vallée" en gallois… ils ont le sens de la logique dans le coin ! Une nouvelle montée raide permet de quitter la vallée, mais elle est suivie aussitôt d'une nouvelle descente, puis d'une autre montée. Après trois ou quatre de ces montées-descentes, le sentier décide enfin de rester "en haut" et je traverse une section plus plate, où un grand troupeau de vaches noires et blanches a décidé que l'herbe poussant sur le sentier doit être meilleure que celle poussant ailleurs… elles ont dû demander conseil à leurs cousines suisses, elles aussi squatteurs assidues de sentiers de randonnée. Le bruit régulier de ces dizaines de vaches arrachant l'herbe donne un accompagnement rythmique au fond sonore constant du vent et de la mer. Le sentier descend à nouveau dans une vallée de taille plus importante, qui part de la plage de Porthmynawyd pour remonter assez loin vers l'intérieur des terres. Devant, la cap rocheux de Dinas Fach étend ses doigts pointus vers le large.
En haut de la montée juste après la vallée de Porthmynawyd je retrouve Sarah, partie deux heures plus tôt de Solva. Elle est assise sur un rocher depuis lequel elle me regardait venir de loin, se demandant avec beaucoup d'intérêt ce que les vaches allaient me faire… les petites soeurs sont adorables. Il nous reste une heure et demie de marche facile jusqu'à Solva, pendant laquelle nous bavardons plus que nous regardons le paysage. Un panneau nous informe que nous traversons les terres de la ferme St. Elvis, mais ne dit pas ce qu'Elvis a fait pour mériter ce statut. Nous croisons un jeune couple qui marche pieds nus, réponse radicale à l'éternel débat "chaussures de montagne ou de trail". Le terrain que nous traversons est plus facile qu'auparavant, il n'y a qu'une seule montée raide pour franchir une dernière crête avant de descendre tranquillement vers le petit port de Solva, blotti au fond d'une longue crique bordée de coteaux boisés.
Certains guides touristiques prétendent que Solva est le plus bel endroit du sentier du littoral ; d'autres disent que la crique ressemble à un fjord norvégien. Les deux affirmations sont fausses ; reste que Solva est un joli petit village dans un beau cadre naturel. Seul le grand parking qui bloque la vue sur le village depuis le port gâche un peu l'ensemble, le village est victime de sa popularité à la haute saison.
Le B&B où je dors est une maison peinte en jaune située en front de mer et, comble du bonheur, immédiatement à côté d'un pub, le Harbour Inn. Il fait bon, il n'est pas encore très tard, alors nous nous trouvons une table en terrasse où je bois une pinte de Double Dragon avant d'aller m'installer dans ma chambre. En entrant dans le pub pour commander les bières, la télévision au-dessus du comptoir me rappelle subitement que la vie quotidienne continue dans un univers parallèle à ma randonnée : la télé diffuse du foot en direct, finale des barrages pour la promotion de quatrième division en troisième. J'avais complètement oublié que la saison de foot n'était pas encore terminée. Sarah part en voiture chercher son ami qui a passé la journée à suivre un stage de gallois non loin d'ici ; ils me retrouveront plus tard pour souper.
Comme celui de Broad Haven, ce B&B fait aussi office de "bistro" mais, contrairement à Broad Haven, ici l'accueil est sympa et professionnel et il y a du monde. Ma chambre est claire et spacieuse, j'ai une salle de bains privée alors que je pensais devoir partager les sanitaires ce soir, il y a même un salon équipé d'un frigo et d'un four à micro-ondes… voici un hébergement où ils ont compris les besoins des randonneurs. Je suis ma routine douche-lessive habituelle, puis ressors faire le tour du village avant d'aller retrouver Sarah et son ami. Il n'y a à vrai dire qu'une rue, mais elle est sympa, bordée de vieilles maisons en pierre, dont la plupart accueille désormais des restaurants, des pubs ou des galeries d'art. Derrière cette rue, une ou deux ruelles donnent sur des petits ponts qui enjambent le ruisseau qui coule tranquillement vers la mer.
Nous nous retrouvons à six heures au Harbour Inn, cette fois-ci à l'intérieur, car le soleil est parti derrière la colline et il fait tout de suite plus frais. A la télé, le foot a fait place au rugby ; dans mon verre, le Double Dragon a fait place au Reverend James. Nous remontons la rue principale jusqu'au Cambrian Inn, quelque part entre pub et restaurant, où nous mangeons un excellent souper. Mon plat est l'interprétation du chef du cawl, plat gallois classique qui, dans sa version d'origine, est une soupe au mouton et aux légumes qui fait office de plat principal. Le chef du Cambrian Inn a transformé ce plat rustique en une délicieuse tourte, en gardant tous les ingrédients de la recette traditionnelle mais en la transformant totalement. Je me sens bien, désormais je suis vraiment dans le rythme de la randonnée… tant mieux car, après cette petite journée tranquille, les étapes restantes vont être plus longues et, pour la plupart, plus dures.
Etape suivante
Etape précédente
Pour le troisième jour consécutif, j'ouvre mes rideaux sur du ciel bleu et du soleil. Toute trace de l'orage de la veille est partie, l'air est doux et limpide. La table où je prends mon petit déjeuner bénéficie d'une vue ininterrompue sur la mer à travers les grandes baies vitrées du bed & Breakfast… dommage que celles-ci soient si sales, attendant encore apparemment leur premier nettoyage de la saison. La mer, qui hier était bleu turquoise, a viré au bleu-gris avec de l'écume blanche ; il doit y avoir du vent.
Dehors, la côte s'étend vers le nord presque à l'infini. A l'horizon, j'aperçois des collines plus hautes qui dépassent. Je n'arrive pas à distinguer si elles appartient au continent ou s'il s'agit d'une île, je demande donc à la serveuse qui vient remplir ma tasse à café. Elle réfléchit longtemps à ma question impossible ("C'est quoi qu'on voit là-bas à l'horizon ?"), puis répond, toute désolée, "Je sais pas, m'y connais pas en bord de mer." Je me dis tout de même que, dans un hôtel de bord de mer qui accueille des touristes venus découvrir la côte et susceptibles d'avoir des questions la concernant, ce ne serait pas mal de former les employés, ne serait-ce qu'un tout petit peu, en "bord de mer". Elle se rachète un peu en me disant "Mais je pense que St. Davids et Solva se trouvent là-bas" et en indiquant la bonne direction du doigt. Ca tombe bien : aujourd'hui je vais à Solva, ça aurait été bête de partir dans la mauvaise direction !
Il y a une supérette juste à côté du B&B ; en partant, j'y passe pour acheter à manger pour ce midi et demain midi. A 9h15 je me mets en route pour ce qui sera l'étape la plus courte et la plus facile de toute ma randonnée côtière. J'ai rendez-vous aujourd'hui avec ma soeur Sarah : nous ne savons pas exactement où, car elle a prévu de partir depuis Solva et de me retrouver en route dans le courant de l'après-midi. Il y a du monde sur la grande plage plate de Broad Haven ; non seulement les promeneurs de retrievers habituels, mais aussi pas mal de gens qui font du footing sur le sable. Cette affluence me surprend… puis je me rends compte qu'on est samedi. Lorsqu'on marche plusieurs jours de suite, on finit par perdre le fil du calendrier ; mais en effet, ça fait maintenant une semaine que je suis en route et le week-end est de nouveau là. Lorsque viendra samedi prochain, je serai déjà dans un train sur le chemin du retour vers la Suisse.
A l'extrémité nord de la plage, le sentier s'élève doucement au-dessus du "rocher au cerf" qui ressemble à toutes sortes de choses félines mais absolument pas à un cerf. Les falaises ici sont relativement basses, le sentier plutôt horizontal et facile. A l'opposé des paysages sauvages d'hier, aujourd'hui la civilisation semble nettement plus proches avec, le long de mon parcours, plusieurs villages et petites routes donnant accès à la mer. Le premier de ces endroits est Druidston Haven, une plage magnifique parsemée de grosses pierres, son extrémité sud fermée par une haute falaise noire en surplomb. Je descends sur la plage, lance quelques cailloux à la mer, trempe ma main dans l'eau pour voir si elle est froide (pas trop) et me pose quelques minutes sur un rocher pour boire en admirant ce lieu superbe. Le couple de Hollandais que je vois régulièrement depuis deux jours me dépasse ; je les vois dans la prochaine montée, avançant lentement vers le haut de la falaise. Le sentier quitte la plage par un vallon derrière les falaises, puis remonte droit dans la pente par un escalier excessivement raide qui aurait mérité une rampe pour faciliter la progression.
Une nouvelle section facile et horizontale passe dans des pâturages où des poneys me regardent passer tranquillement, puis le sentier plonge vers le prochain vallon et devient un peu moins commode : raviné, érodé par les chaussures et la pluie, je marche dans une tranchée profonde de 40 centimètres et juste assez large pour poser un pied à la fois. Cette descente me mène à Nolton Haven, village minuscule où il n'y a qu'une église, un pub et deux ou trois maisons. La plage de Nolton est plus encaissée que celle de Druidston, une baie étroite coincée entre de hautes falaises des deux côtés, presque recouverte par la mer. Pour la première fois, sur cette plage, je vois quelques familles en vacances de bord de mer traditionnelles, assises sur la plage avec pelles et seaux, jeux de balle et enfants qui pataugent dans les vaguelettes. Un groupe de randonneurs attend le bus pour Solva : je les croiserai plus tard dans la journée, revenant à pied vers leur point de départ. Pour une région aussi rurale, la côte du Pembrokeshire est bien desservie par les bus, on peut facilement les utiliser pour faire des randonnées en étoile à la journée. Je redépasse les Hollandais qui font une pause sur la plage ; je ne les reverrai plus de la journée.
Après un nouveau petit bout de haut de falaise, maintenant c'est la longue plage de Newgale qui apparaît devant, balayée par le vent et bordée d'un haut banc de galets. La mer est haute, il n'y a que très peu de sable visible. Le sentier reste au-dessus de la plage pendant un kilomètre, ne me permettant d'accéder au bord de mer qu'à la moitié de sa longueur. Une fois sur la plage, je la suis vers le nord, en essayant de rester sur le mince ruban de sable entre les vagues à gauche et les galets à droite. Mais la mer finit par prendre le dessus, les derniers centimètres de sable disparaissent sous l'eau et je suis obligé de remonter sur les galets pour continuer.
Peu avant midi et demi, j'arrive à l'autre bout de la plage, vers le village de Newgale. Il y a du vent, il fait trop froid pour une vraie pause avec sieste, mais en me blottissant contre les galets j'arrive à trouver un endroit plus ou moins abrité pour manger tranquillement. Les nombreux surfeurs et véliplanchistes qui fréquentent cette plage font eux aussi leur pause midi, il y en a davantage sur la plage que dans l'eau.
Après une demi-heure de pause, je repars pour la suite de l'étape. Cela commence par une montée rude et raide, suivie immédiatement par une descente du même style vers une plage caillouteuse au bout d'une petite vallée. Sur la carte, cet endroit s'appelle Cwm-bach, ce qui veut dire "petite vallée" en gallois… ils ont le sens de la logique dans le coin ! Une nouvelle montée raide permet de quitter la vallée, mais elle est suivie aussitôt d'une nouvelle descente, puis d'une autre montée. Après trois ou quatre de ces montées-descentes, le sentier décide enfin de rester "en haut" et je traverse une section plus plate, où un grand troupeau de vaches noires et blanches a décidé que l'herbe poussant sur le sentier doit être meilleure que celle poussant ailleurs… elles ont dû demander conseil à leurs cousines suisses, elles aussi squatteurs assidues de sentiers de randonnée. Le bruit régulier de ces dizaines de vaches arrachant l'herbe donne un accompagnement rythmique au fond sonore constant du vent et de la mer. Le sentier descend à nouveau dans une vallée de taille plus importante, qui part de la plage de Porthmynawyd pour remonter assez loin vers l'intérieur des terres. Devant, la cap rocheux de Dinas Fach étend ses doigts pointus vers le large.
En haut de la montée juste après la vallée de Porthmynawyd je retrouve Sarah, partie deux heures plus tôt de Solva. Elle est assise sur un rocher depuis lequel elle me regardait venir de loin, se demandant avec beaucoup d'intérêt ce que les vaches allaient me faire… les petites soeurs sont adorables. Il nous reste une heure et demie de marche facile jusqu'à Solva, pendant laquelle nous bavardons plus que nous regardons le paysage. Un panneau nous informe que nous traversons les terres de la ferme St. Elvis, mais ne dit pas ce qu'Elvis a fait pour mériter ce statut. Nous croisons un jeune couple qui marche pieds nus, réponse radicale à l'éternel débat "chaussures de montagne ou de trail". Le terrain que nous traversons est plus facile qu'auparavant, il n'y a qu'une seule montée raide pour franchir une dernière crête avant de descendre tranquillement vers le petit port de Solva, blotti au fond d'une longue crique bordée de coteaux boisés.
Certains guides touristiques prétendent que Solva est le plus bel endroit du sentier du littoral ; d'autres disent que la crique ressemble à un fjord norvégien. Les deux affirmations sont fausses ; reste que Solva est un joli petit village dans un beau cadre naturel. Seul le grand parking qui bloque la vue sur le village depuis le port gâche un peu l'ensemble, le village est victime de sa popularité à la haute saison.
Le B&B où je dors est une maison peinte en jaune située en front de mer et, comble du bonheur, immédiatement à côté d'un pub, le Harbour Inn. Il fait bon, il n'est pas encore très tard, alors nous nous trouvons une table en terrasse où je bois une pinte de Double Dragon avant d'aller m'installer dans ma chambre. En entrant dans le pub pour commander les bières, la télévision au-dessus du comptoir me rappelle subitement que la vie quotidienne continue dans un univers parallèle à ma randonnée : la télé diffuse du foot en direct, finale des barrages pour la promotion de quatrième division en troisième. J'avais complètement oublié que la saison de foot n'était pas encore terminée. Sarah part en voiture chercher son ami qui a passé la journée à suivre un stage de gallois non loin d'ici ; ils me retrouveront plus tard pour souper.
Comme celui de Broad Haven, ce B&B fait aussi office de "bistro" mais, contrairement à Broad Haven, ici l'accueil est sympa et professionnel et il y a du monde. Ma chambre est claire et spacieuse, j'ai une salle de bains privée alors que je pensais devoir partager les sanitaires ce soir, il y a même un salon équipé d'un frigo et d'un four à micro-ondes… voici un hébergement où ils ont compris les besoins des randonneurs. Je suis ma routine douche-lessive habituelle, puis ressors faire le tour du village avant d'aller retrouver Sarah et son ami. Il n'y a à vrai dire qu'une rue, mais elle est sympa, bordée de vieilles maisons en pierre, dont la plupart accueille désormais des restaurants, des pubs ou des galeries d'art. Derrière cette rue, une ou deux ruelles donnent sur des petits ponts qui enjambent le ruisseau qui coule tranquillement vers la mer.
Nous nous retrouvons à six heures au Harbour Inn, cette fois-ci à l'intérieur, car le soleil est parti derrière la colline et il fait tout de suite plus frais. A la télé, le foot a fait place au rugby ; dans mon verre, le Double Dragon a fait place au Reverend James. Nous remontons la rue principale jusqu'au Cambrian Inn, quelque part entre pub et restaurant, où nous mangeons un excellent souper. Mon plat est l'interprétation du chef du cawl, plat gallois classique qui, dans sa version d'origine, est une soupe au mouton et aux légumes qui fait office de plat principal. Le chef du Cambrian Inn a transformé ce plat rustique en une délicieuse tourte, en gardant tous les ingrédients de la recette traditionnelle mais en la transformant totalement. Je me sens bien, désormais je suis vraiment dans le rythme de la randonnée… tant mieux car, après cette petite journée tranquille, les étapes restantes vont être plus longues et, pour la plupart, plus dures.
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Tourengänger:
stephen

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