Pilier sud de la Pointe de Platé

Il s'agit d'une des très grandes voies "montagne" du massif des Fiz, l'impressionnant bastion Dolomitique de 600 m de haut qui domine la vallée de l'Arve en aval de Chamonix. Approche complexe en terrain à chamois, 20 longueurs de corde pas toujours très techniques (5b/c max) mais peu équipées et sur un rocher variable, bref il s'agit plutôt d'une grand voyage d'alpinisme rocheux que d'une voie d'escalade clé en main sur du rocher verdonnesque...

Topo détaillé ici

Retour pour moi au mode de progression à 4 pattes (comprendre : en utilisant aussi ses mains...) après avoir surtout mouliné mes 2 jambes sur un beau voyage à vélo de Salzbourg à Venise.

Un vieux projet commun avec Matthias (expert local), que j'avais réussi à vendre à ma camarade malgré la réputation un peu sulfureuse du rocher des Fiz...un digne remplacement de la Cassin au Badile qu'on avait au départ aussi prévu de gravir à 4. Bon c'est pas tout à fait le même caillou, mais l'ambiance y est aussi bien plus sauvage - à fortiori quand un brouillard pas du tout annoncé la veille s'invite au rendez-vous. Ayant rêvé d'une belle journeé de grimpe au soleil automnal, j'avoue être parti le moral dans les chaussettes en imaginant déjà frissoner jusqu'en haut sans rien voir. Mais c'est ça la force du groupe, les 4 autres (et en particulier nos 2 nanas de choc !) sont restées positifs tout du long et leur bonne humeur a fini par me contaminer. Heureusement qu'il n'y a pas encore de vaccin dans ce domaine.

On a d'autant plus apprécié de sortir - quand-même ! - de la purée de poix au niveau de la Vire à bicylettes aux 2/3 de la voie. Quel choc de voir d'un seul coup le skyline du Mont Blanc et de l'Aiguille Verte dans un immense ciel bleu. Et quel plaisir de sentir le rocher tiédir en quelques minutes après avoir pesté contre ces météorologues à la c...capables de se gourrer de 1000 mètres d'altitude entre la veille et le lendemain...Au final une journée mémorable en excellente compagnie. A peine rejoint le sentier de descente que Matthias et Mika évoquaient déjà les récents rééquipements de la descente de la Noire de Peuterey ou des Drus, histoire de faire germer quelque autre projet commun saugrenu pour l'année à venir...

Conditions du jour : terrain sec, plus de neige à la descente (elle subsiste en versant N > 2500m dans la région). Equipement parcimonieux ou absent dans le terrain facile, ce qui rend l'itinéraire pas évident à suivre, en particulier dans les 2-3 longueurs après le rappel de départ : même Matthias qui avait déjà fait 2 fois la voie a pas mal cherché...en plus c'est herbeux, un peu délité mais quand même bien redressé, sans cheminement évident...sitôt trouvé la fissure-rampe caractéristique vers la D (cf image) c'est plus simple même si un bon topo (celui de G. Brunot) et une bonne expérience du TA restent de rigueur. Ainsi qu'une grosse marge pour le leader !

Le rocher est certes bien typé montagne, mais on ne l'a pas trouvé si délité que ça excepté le départ : la partie centrale est même franchement jolie jusqu'à la vire à bicyclette, la plupart des prises-tiroir se voient bien, et il y a toujours moyen de progresser sur du caillou sain - qui possède de surcroit un super grip pour les mains et les pieds. En gros les a-plats sont top et les (rares) baquets crochetants plus suspects...Le dièdre noir du L17 qui nous faisait un peu souci est en fait équipé pour éviter la zone dangereuse : on le quitte au milieu à D pour suivre des spits (un peu cachés) dans un mur en bon rocher avant de revenir à G tout à la fin (expo pour le leader, mais protégé pour le 2nd). Au final, même à 5, on n'a pas fait tomber un caillou.

La toute dernière longueur, facile mais un peu scabreuse et non équipée, s'évite facilement en empruntant les belles cannelures de sortie de la voie Nour (4c, spits, relais au pied et en sortie). On n'a pas été au sommet de la Pointe de Platé, ce que presque personne ne fait selon nos guides.

Météo : double stratus puis dans le stratus, au soleil dès la vire à bicyclette ! Tous les bulletins météo de la veille donnaient une limite supérieure entre 1200 et 1500m, l'édition du matin parlait déjà de 2000m, au final c'était même encore un peu plus haut (grrrr...). Pas de vent heureusement - donc grimpe en multicouche sous le stratus puis bien au chaud au dessus...

Accès : le Fayet --> Passy --> Plateau d'Assy. On a laissé une voiture au parking du retour de Praz Coutant (1200m) pour s'épargner 30mn de marche supplémentaire à revenir au parking du départ (téléski de Plaine-Joux, 1350m)

Hébergement : c'est pas tout à fait au pied mais pas non plus bien loin : Agnès & moi avons dormi la veille à la Ferme du Champelet des Contamines, avec une qualité d'accueil qui figurera sans doute dans notre top ten ever (et on voyage pas mal...) - chambres douillettes, vieille maison en grande partie partagée et meublée avec un goût parfait, gentillesse et serviabilité de Cécile qui a tenu à me préparer d'avance un petit-déjeuner royal pour mon départ de nuit avant de refuser de le facturer à Agnès plus tard le dimanche matin jugeant que "je n'avais presque rien mangé" (!). Elle a aussi tenu à s'assurer de l'ouverture dominicale du refuge des Prés en les appelant pour qu'Agnès soit sûre de pouvoir y déjeuner, etc...Je crois qu'on va chercher d'autres prétextes pour revenir dans le coin dès que possible !

Horaire : départ 7h20, attaque couloir (on s'est encordés) 8h20, "vrai" départ (après vires et rappel) 9h, sommet 14h / 14h45, retour au parking du bas 16h30.

Participants : Matthias et moi en 1ère cordée, Pauline, Abi et Mika en 2ème cordée.