Sattelpass, un conte de fées entre Entlebuch et Obwald

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Après deux semaines et trois week-ends de météo mitigée – c'est le moins que l'on puisse dire – le soleil est au rendez-vous pour ce dernier jour du mois de juillet. Nous partons de bonne heure de Neuchâtel et, deux trains et un car postal plus tard, c'est vers 9 heures 45 que nous arrivons à Flühli, au-dessus de Schüpfheim dans l'Entlebuch. Il fait agréablement frais ; il y a du soleil mais les sommets autour sont coiffés de nuages gris qui ne semblent pas encore vouloir abandonner définitivement le combat.
 
Il y a toutes sortes de choses intéressantes à Flühli.  Tout d'abord nous sommes acueillis par deux chatons - un gris et un roux - qui jouent au milieu de la petite route.  Plus loin, mais avant même de quitter le village, nous rencontrons une dame habillée en Petit Chaperon rouge :  un peu au-dessus, à un carrefour de chemins,  nous nous trouvons face à face avec le Grand Méchant Loup… enfin, avec un jeune homme qui porte un costume de loup mais qui a enlevé la tête et qui nous dit bonjour en suisse-allemand.  C'est comme ça que nous savons que c'est un homme et pas un vrai loup, car les vrais loups n'enlèvent pas leur tête et ne parlent pas le Schwytzerdütsch...   Mais que se passe-t-il à Flühli en cette veille de Fête nationale ? Un spectacle en pleine nature pour les enfants du village, un jeu de rôle exotique basé sur des contes de fées, qui sait  ?
 
Une petite route nous conduit le long d'un ruisseau au hameau de Chragen, où le thème insolite continue.  Des "Toblerones" militaires alignés dans la pente au-dessus de nous ressemblent à des maisons de poupée. Une demi-Mini a été encastrée dans le mur d'une maison pour faire une sorte de sculpture très originale ; quelques mètres plus loin, au bord d'un petit étang, un panneau est marqué "Vorsicht ! Fische !". Mais que peut-il y avoir dans ce petit bassin ?  Des piranhas ?  Un couple de requins affamés, peut-être ?  Le requin alpestre existe-t-il ?
 
Au-delà de Chragen, la route fait place à un sentier qui monte en bordure de forêt, puis plonge dans une vallée encaissée bordée de hautes falaises à Chessiloch. Franchissant le fond du vallon sur une série de passerelles faites de troncs d'arbre glissants,  le sentier monte ensuite, raide, par une crête effilée entre deux ravins profonds.
 
A la grande ferme de Holzhack, nous quittons la forêt. La centaine de mètres qui suit, hors sentier et à travers chanps, est désagréable : le terrain est extrêmement marécageux et il est très difficile de trouver un cheminement qui permet de garder les pieds secs. Pas de problème pour moi ; par contre, j'avais dit à ma coéquipière du jour que toute la randonnée se ferait sur de bons chemins faciles, elle m'a cru (la pauvre) et est venue en baskets…
 
Au-dessus de Schaftelemoos, nous retrouvons un semblant de sentier qui monte en forêt vers le col. Ca reste très marécageux sous les pieds et la progression est fastidieuse. Nous croisons plusieurs VTTistes venant dans l'autre sens : ils poussent tous leurs vélos, impossible de monter dessus pour profiter de la descente. Juste avant le col, nous croisons même un homme avec un vélo de route : il doit galérer !
 
Au Sattelpass, nous nous trouvons tout juste en dessous du niveau des nuages et il fait froid. J'espérais une belle vue vers les montagnes de la Suisse centrale, mais à l'est c'est complètement bouché, avec un plafond nuageux bas et gris. Le début de la descente est monotone, sur une route forestière dure pour les pieds et n'offrant aucune vue sur le paysage. Nous nous asseyons sur une grosse bûche en bordure de route pour casser la croûte, puis reprenons la descente, plus raide maintenant, vers la vallée de l'Aa et le Sarnersee. Les nuages commencent enfin à se lever, la forêt fait place aux champs et, même si nous ne voyons pas les sommets, la vue vers la vallée et le lac est belle. A Hinterbrenden, on fait les foins ; une étendue impressionnante de pâturage très escarpé a été fauchée par je ne sais pas quel moyen, car la pente me paraît bien trop raide pour un tracteur. Un peu plus bas, un homme assez âgé accompagné de deux chiens bruyants est en train de faucher la bordure de route manuellement avec une débroussailleuse… a-t-il pu faire tout le pâturage de cette manière ?  Nous sommes surpris de voir des gens travaillant dans les champs un dimanche après-midi ; peut-être à cause de la fête nationale du lendemain ?
 
Il nous reste deux kilomètres de plat jusqu'à Giswil. Nous marchons sur une espèce de grande digue toute droite, haute de quatre ou cinq mètres et visiblement ancienne au vu des grosses pierres carrées qui en constituent la fondation. S'agit-il simplement d'une protection contre les crues du torrent, ou cette digue aurait-il des origines militaires ?  Le torrent nous paraît complètement inoffensif mais, à un endroit, une vue plus large nous permet de voir que son lit est vaste et plat : malgré le petit filet d'eau qui coule au mmilieu aujourd'hui, ce torrent doit être très capricieux.  
 
Nous arrivons à Giswil par une zone industrielle poussiéreuse, traversons la rivière sur un pont couvert et continuons vers la gare. La maison de retraite du village a été construite juste à côté d'un grand cimetière : de sa terrasse, les résidents du home ont une vue panoramique sur les tombes. Cela semble être un choix particulièrement mal placé de la part des architectes et urbanistes dde la région ! Nous faisons une halte à un restaurant du centre pour nous désaltérer, puis continuons jusqu'à gare pour prendre un train qui, très vite, se remplit de randonneurs et de touristes de toutes nationalités au fur et à mesure qu'il s'approche de Lucerne.