Au-dessus des stratus, journée parfaite sur le Rigi


Publiziert von stephen , 3. November 2015 um 20:11.

Region: Welt » Schweiz » Schwyz
Tour Datum:31 Oktober 2015
Wandern Schwierigkeit: T2 - Bergwandern
Wegpunkte:
Geo-Tags: Rigigebiet   CH-LU   CH-SZ 
Zeitbedarf: 5:30
Aufstieg: 950 m
Abstieg: 1400 m
Strecke:Seeboden – Rigi Kaltbad – Dossen – Hinterbergen - Vitznau
Zufahrt zum Ausgangspunkt:cff logo Seebodenalp
Zufahrt zum Ankunftspunkt:cff logo Vitznau

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Depuis quelques jours, je prie les dieux de la météo pour que le beau temps persiste en montagne. Avec la visite d'une amie qui fait un trajet de plusieurs heures pour passer le week-end en Suisse centrale et une randonnée comme élément central de notre programme, ce serait dommage de ne pas pouvoir profiter pleinement de cette belle fin d'automne.

J'ai choisi le Rigi comme destination pour la première rando de mon amie dans la région. Paysages somptueux, absence de neige, parcours pas trop exigeant, pas besoin de se lever dès l'aube, cela me paraît idéal. La seule question concerne la limite supérieure des stratus, que Météosuisse situe vers 900 mètres. En partant de Seeboden, à une altitude de 1020 mètres, nous devrions être confortablement au-dessus.

Sauf que le stratus est plus tenace que prévu, je le vois déjà depuis le train qui nous emmène de Lucerne à Küssnacht. Seeboden a l'air de se trouver en plein dans la partie la plus épaisse. Cela se confirme depuis la petite télécabine qui nous fait monter au-dessus des prés et des maisons, puis qui frôle la cime des arbres. La visibilité se réduit de plus en plus et c'est dans un brouillard bien épais et bien humide que nous quittons la cabine. Il est clair que nous finirons par monter au-dessus des nuages, mais combien de temps nous faudra-t-il ?

Nous partons de Seeboden à 10h 30 pile, suivant la crête d'une vieille moraine vers le sud-est. Je sais d'expérience que la vue sur le Pilatus est superbe et suis déçu que mon amie la manque.  Un panneau d'information qui explique le passé glaciaire de la région offre une petite compensation : le Pilatus et tout le bassin de la Reuss sont illustrés par une grande image. Celle-ci est quand même un peu trompeuse, dans la mesure où le lac des Quatre cantons est tout en glace et il y a des mammouths sur le flanc des coteaux… tiens, la bouse sur laquelle je viens de mettre le pied serait-elle en fait une crotte de mammouth ?  Le brouillard transforme les sons autour de nous : un chien qui aboie au lointain fait une excellente imitation d'un phoque, alors que le rire d'une femme sur un sentier parallèle mais invisible ressemble au bêlement d'un mouton. Au petit restaurant d'alpage d'Altruedisegg, le brouillard est toujours aussi tenace. De la musique folklorique sort d'un haut-parleur, mais les tables et les bancs sont déserts et le resteront sans doute, à moins que les nuages se dissipent.

Jusqu'ici, nous avons marché quasiment à plat, ne gagnant que 20 mètres d'altitude en une demi-heure. Mais au-delà d'Altruedisegg, le sentier oblique vers l'est et commence à grimper vers les crêtes invisibles au-dessus. A Räbalp, situé à 1124 mètres, nous commençons à deviner du bleu à travers le gris du brouillard… puis, très subitement, nous sortons des nuages et la journée est transformée. Au-dessus de nous, le ciel est d'un bleu profond, sans un nuage pour le troubler. A quelques mètres sous nos pieds, la nappe de brouillard s'étend à l'infini, parfaitement lisse et horizontale, presque irréelle dans sa perfection. Au sud-est, voilà le Pilatus qui en sort, tel un immense iceberg noir, sa géométrie parfaitement précise grâce à l'air d'une limpidité totale. A l'horizon, la plume de vapeur de la centrale nucléaire près d'Olten ressemble à une immense montagne enneigée, échappée de l'Himalaya.  Plus près de nous, une crête herbeuse et boisée est transformée en péninsule entourée de l'océan. Je ne sais pas ce qui est plus extraordinaire : la vue elle-même ou ce passage instantané de la grisaille à la lumière. 

Nous continuons à monter, le plus souvent à l'ombre de la crête de Geissrügge. Deux femmes qui arrivent derrière nous rattrapent petit à petit. Elles sont en pleine conversation à propos d'immobilier : en fait, l'une des femmes contribue 90 pour cent de la conversation, l'autre se contente d'un "Ja ja" pas très enthousiaste toutes les dix secondes. Elles nous dépassent et disparaissent devant, toujours en train de discuter.

Alors que nous arrivons au Chänzeli, 1464 m, mon amie me fait remarquer qu'il y a soudain beaucoup plus de monde. Puis nous quittons la forêt et elle comprend pourquoi : le Chänzeli est un point de vue exceptionnel, d'où on voit toutes les Alpes de la Suisse centrale et une bonne partie du Plateau et du Jura. Le brouillard ajoute une touche inhabituelle à ce panorama : là où on s'attendrait à voir les eaux bleu profond du lac des Quatre Cantons, il y a une immense mer de ouate. Au milieu, son point culminant dépassant à peine du brouillard, le Bürgenstock ressemble à un grand mille-pattes poilu, ou peut-être au monstre du Loch Ness. J'essaie d'identifier les montagnes pour mon amie, réussis à localiser le Titlis mais sèche complètement sur la plus imposante de toutes qui, je découvrirai plus tard, est l'Uri Rotstock.

Du Chänzeli à Rigi Kaltbad, nous suivons un large sentier qui descend en pente douce, au milieu des touristes montés en train pour profiter de la vue. Kaltbad a bien changé depuis ma dernière visite il y a deux ans et demi : le bâtiment de la gare, qui n'était pas beaucoup plus qu'un abri sommaire, a été remplacé par un gros cube qui paraît bien surdimensionné par rapport à ses environs. Nous poursuivons à plat, suivant le tracé de l'ancien chemin de fer qui, pendant quelques brèves années, a transporté des voyageurs de Kaltbad jusqu'à l'hôtel de Rigi Scheidegg, avant de fermer par manque de rentabilité.

C'est l'heure du déjeuner, mais je ne veux pas manger au milieu de la foule et propose donc de monter jusqu'au sommet du Dossen avant de faire la pause. Les quarante minutes de montée sont bien raides ; au fur et à mesure que nous grimpons, la vue s'ouvre de plus en plus vers l'est également… serait-ce le Säntis que nous voyons, tout là-bas ?  Nous arrivons au sommet herbeux (1685 m) vers deux heures moins le quart ; nous y sommes seuls.

Il n'y a pas eu le moindre vent jusqu'à présent mais maintenant, sur la crête sommitale, une petite brise frisquette se lève, nous incitant à redescendre un peu dans le versant nord pour casser la croûte. J'ai fait de la soupe aux lentilles et ai amélioré un taboulé de la Coop avec des tomates et du persil ; le menu est complété par deux fromages d'alpage différents et du Sauerteigbrot de ma boulangerie locale. Mais la brise se renforce de plus en plus et, une fois que nous avons fini de manger, nous ne traînons pas pour repartir. Nous retraversons le sommet du Dossen (cela doit bien être la première fois que je fais un sommet deux fois en une heure !), puis descendons l'arête sud, soufflés par un vent devenu bien froid qui ne s'atténue que cent mètres plus bas, à Hinder Dossen. En contrebas dans la vallée, le vent semble également s'être levé : la nappe de brouillard a perdu sa lisse perfection et, avec des bouts de montagne qui ressortent tels des rochers, ressemble maintenant à une mer agitée qui se fracasse contre la côte. Par endroits, le brouillard s'est complètement déchiré, laissant apparaître ce qui semble être de la glace en dessous, mais ce qui est en réalité la surface du lac.

Il faut plus de 1200 mètres de descente pour atteindre Vitznau depuis le Dossen. Un beau sentier descend par une série d'alpages vers la ferme de Gletti, à 1373 mètres. Au fond, c'est maintenant le Vitznauerstock qui attire l'attention, sombre, rocheux et boisé. Je pose mon appareil photo en équilibre précaire sur un poteau pour faire un autoportrait avec mon invitée du week-end. A Gletti, nous avons le choix de deux itinéraires pour descendre à Hinterbergen. L'un d'eux est marqué "Steiler Abstieg" ; nous lui préférons l'autre, moins raide mais pourtant bien pentu par endroits. Une famille est en train de ratisser du foin à la main, ramassant un dernier petit stock d'herbe avant l'arrivée de l'hiver. Un peu partout, on travaille à l'alpage ; il y a le bruit d'engins agricoles, d'outils qui tapent, de paysans qui appellent. A un endroit, juste à côté du sentier, une meule de foin ressemble exactement à une poire géante qui attend d'être mangée.

Nous atteignons le hameau d'Hinterbergen vers quatre heures de l'après-midi. Les ombres s'allongent, la lumière commencera bientôt à baisser. Il y a du monde qui fait la queue devant la station du petit téléphérique : vu qu'il ne peut tenir que quatre personnes à la fois, ils vont devoir attendre un certain temps. Nous avons de toute façon déjà décidé de descendre à pied. Un peu en dessous d'Hinterbergen, nous atteignons à nouveau la limite supérieure du brouillard, moins dense que ce matin. L'air se refroidit rapidement dès que les premières plumes de vapeur nous entourent, puis nous sommes à nouveau enveloppés par la grisaille et il fait tout de suite plus sombre.

Deux chemins sont indiqués pour descendre à Vitznau. Connaissant déjà celui qui passe par la chapelle St. Antoni, je propose de prendre le second itinéraire, qui descend par Gäbetswil. La suite est un petit parcours d'aventure complètement inattendu, qui fait basculer cette randonner définitivement dans le T2. Le sentier devient étroit, descendant en pente raide entre des barres rocheuse et au-dessus d'un ravin profond. Le sentier est complètement recouvert d'un tapis de feuilles mortes ; elles sont très glissantes et on ne voit pas du tout ce qui se trouve en dessous. Ce tronçon est sécurisé par des câbles et une main courante en bois, mais cette dernière est branlante par endroits et n'inspire pas vraiment confiance. Nous descendons une série de petites échelles qui ne poseraient aucun problème à la montée, mais qui demandent de la prudence à la descente, surtout en vue des conditions glissantes. Au bout d'une petite demi-heure, nous retrouvons du terrain plus stable et moins raide, où le son de cloches à vaches invisibles nous parvient à travers le brouillard.

Lorsque nous arrivons à Vitznau, il est cinq heures et demie et il fait presque nuit. Le bus pour Küssnacht ne part que dans vingt minutes ; alors nous marchons lentement jusqu'au bord du lac. Un groupe de mamans et de jeunes enfants traverse la rue devant nous, tout habillées en sorcières. De l'autre côté du lac, dont la surface est rendue mauve-rose par les tout derniers rayons de lumière, le Bürgenstock s'est libéré de ses nuages et est entièrement visible. Ses sombres falaises qui sortent presque verticalement de l'eau vont parfaitement avec l'ambiance de cette soirée d'Halloween : demain nous serons en novembre, après une journée qui a répondu pleinement à nos attentes.

Tourengänger: stephen
Communities: Randonneur


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